Air France et les pilotes solidaires contre l’expertise judiciaire demandée par Airbus

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« Toute vérité est destructrice quand elle oppose les faits » écrivait Emile Zola lors de l’Affaire Dreyfus. Certes la contre-expertise menée à la demande la justice sur reuqête d’Airbus ne cherche pas un bouc émissaire mais souhaite établir la vérité suite au crash du Paris/Rio en 2009. En l’état, si l’équipage est montré du doigt, les responsabilités possibles de l’avionneur ne sont pas pour autant évoquées.

Air France a rapidement réagi aux premières informations diffusées dans la presse ce 14 mai et qui font état « d’une responsabilité appuyée de l’équipage ». La compagnie conteste cette vision et dépose un recours en nullité de cette contre-expertise devant la Chambre de l'Instruction de la Cour d'Appel de Paris. La compagnie affirme dans un communiqué que « cette contre-expertise a été conduite de manière unilatérale et non contradictoire, en violation du principe même du procès équitable ».

Air France reproche également à la justice de ne pas l’avoir associé à ce nouveau travail d’experts et affirme que « les éléments de ce rapport font une présentation partiale et tronquée des causes de l'accident qui porte atteinte aux droits fondamentaux de la défense d'Air France ». Il faut dire que les premiers commentaires mettent en cause le manque de formation des pilotes en cas d’incident en haute altitude et l’absence de réactions face à certaines causes. Deux conclusions que ne saurait accepter la compagnie.

Enfin, la compagnie précise également que « le rapport omet de nombreux éléments, qui concernent en particulier le fonctionnement de l'avion et qui figuraient dans le rapport définitif du BEA et le premier rapport d'expertise judiciaire. Certains des éléments omis ont d'ailleurs fait l'objet depuis de mesures correctrices de la part de l'industrie »

De son côté le SNPL Air France, souvent montré du doigt par les familles des victimes pour une vision corporatiste appuyée, constate lui aussi que le rapport fait la part belle uniquement « aux questions posées sous l’angle exclusif du rôle tenu par l’équipage ».

Il est vrai, et le syndicat le précise à nouveau, que bien des faits présents dans les rapports précédents (et contestés par le SNPL à l’époque) ne sont plus évoquées dans ce rapport. Le BEA (Bureau Enquête et Accidents) avait pourtant soulevé quelques questions techniques non traitées dans la contre-expertise. Et le SNPL de citer des faits relevés par le BEA comme
- le rôle de l’EASA en tant qu’autorité de certification des tubes Pitot ;
- le rôle du constructeur Airbus dans la conception des systèmes de l’avion ;
- le rôle de la DGAC devant l’absence de prise en compte des nombreux évènements précurseurs.

La bataille juridique qui s’engage risque de durer sans que la vérité soit connue. Sans doute le crash est-il du à un faisceau de faits, techniques et humains, entremêlés et complexes à comprendre. Pour la plus grande tristesse des familles qui auraient apprécié une information claire et non contestable.