Bienvenue à Madame la voyageuse d’affaires

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En ce 8 mars, journée de la femme, il aurait été impensable de demander à un homme d'écrire sur un sujet aussi délicat : nous ! Il est vrai que dans l'univers du voyage d'affaires, aux costumes gris et aux cravates sans imagination, nous détonons toujours un peu avec nos mini jupes, nos tailleurs, nos chemisiers, nos vestes, nos bijoux et nos manteaux. Bref, une touche de couleur et de féminité dans un monde de brutes.

Mais la femme est une voyageuse comme les autres. A l'exception de deux ou trois petites choses qu'il vaut mieux savoir sur nous, disons le franchement : nous ne sommes pas plus casse pieds que les hommes. Et pourtant, ce n'est pas l'image que nous donnions que ce soit dans les avions ou dans les hôtels que nous fréquentions. Je ne voudrais pas véhiculer des ragots mais savez vous qu'il y a cinquante ans, un manuel à l'usage des directeurs d'hôtels précisait de façon clair "qu'une femme seule dans un hôtel devait attirer la méfiance et les interrogations de la direction de l'établissement". Pire, le même document de travail préconisait "de ne pas accepter plus de deux ou trois femmes en même temps pour ne pas donner une image dégradante de son hôtel". Autant le dire, nous étions mal parties. Rien de mieux du côté des compagnies aériennes. Un manuel du savoir vivre à bord des avions, publié alors par la TWA connu pour sa gestion machiste du personnel féminin, donnait aux hôtesses quelques règles essentielles de savoir vivre dont l'une a du marquer des générations "Souvent, les femmes parlent pour ne rien dire. Ne tombez pas dans ce piège. Limitez vous aux phrases essentielles à votre service et répondez de façon courte et concise aux questions qui vous sont posées". Soit belle et tais toi... Le refrain est connu. A Hong Kong, dans les années 70, les femmes d'affaires étaient mal vues sans un accompagnement masculin. L'esprit britannique qui régnait alors sur la colonie répondait à des critères très précis. Impossible pour ces dames de réserver seule une table de restaurant ou de s'installer à un bar d'hôtel. Chocking. On le comprend, les époques évoluent. La même Asie, alors fermée aux femmes à l'époque, a été la première à créer des étages réservés à la seule clientèle féminine. Une idée reprise un peu partout dans le monde avec un succès mitigé selon les continents. Faut-il pour autant penser que les femmes sont devenues des hommes d'affaires à part entière ? Sans doute, et c'est là l'une des conclusions de ce demi-siècle de "luttes silencieuses" : les hommes, après tout, ne sont bien que des voyageuses comme les autres.

Hélène Retout