COP21, quels risques pour le voyage d’affaires ?

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L'enjeu de la COP pourrait se résumer en une température : 2°C. Pour les spécialistes, un réchauffement supérieur à 2°C entraînerait des conséquences graves, comme la multiplication des événements climatiques extrêmes, pénalisants pour les déplacements. À Copenhague en 2009, les pays avaient déjà affirmé leur volonté de réduire le réchauffement climatique de 2°C d’ici 2100, mais buté sur les moyens pour y parvenir. Pour les experts climatiques "les émissions mondiales de gaz à effet de serre doivent être réduites de 40 % à 70 % d’ici à 2050 et la neutralité carbone, soit zéro émission, doit être atteinte au plus tard à la fin du siècle".

Mais que veut bien dire COP 21? Tout simplement" 21ème COnférence des Parties, c'est à dire le rassemblement annuel de tous les pays désireux d'agir pour le climat.  A Paris, tous les experts évoquent de nombreuses pistes de travail dont une concerne plus directement les déplacements, privés ou professionnels. Obliger l'aérien à diminuer les émissions de CO2 va obliger les constructeurs et les compagnies à repenser les équipements et les routes empruntées : avions, approches de vol plus directes, gestion au sol… Si tous sont d'accord pour engager de tels efforts, beaucoup refusent la facture associée à ces nouveaux développements. Pour Boeing, une telle marche forcée à objectif 2030 ferait augmenter de 8 à 10% le prix des avions… Et par conséquence indirecte, provoquerait une hausse d'autant pour les billets d'avions.

Autre réflexion, la mise en place d'une taxe écologique sur le prix de tous les transports, autobus, avions et trains… Seuls les voitures et les bateaux seraient épargnés. Pour les Européens, une telle taxe ne saurait dépasser 1,2 %. Chinois et Américains en refusent le principe qui pénaliserait leur économie. La France se dit favorable à une mise en place rapide, mais contrairement à la taxe Chirac, peu suivie par nos voisins, et qui pénalise le transport français, elle veut avant toute mise en place "une prise de conscience générale et une acceptation du principe par tous les pays riches".

Ce que la COP21 n'évoquera pas, c'est la compensation carbone, vedette d'il y a deux ans et enterrée par les médias. A ce jour, très peu de sociétés compensent les déplacements professionnels de leurs collaborateurs. Eux même refusent de payer pour des voyages qu'ils n'ont pas choisis mais proposent de repenser les plans annuels de déplacements d'affaires. Au Canada, cette vision a été adoptée par beaucoup de sociétés avec des objectifs simples : baisser de 20% les voyages d'affaires en traquant tous ceux qui se révèlent inutiles. Mettant ainsi en place un cercle vertueux pour les travel managers, vers une gestion écologique mais aussi économique. Parce que les entreprises, malgré l'obligation pour les plus importantes de mettre en place un rapport annuel du développement durable, sont assez peu sensibles à la mesure de leur empreinte écologique et en particulier à celui de leurs déplacements professionnels. Qui, aujourd'hui, compense le CO2 du voyage d'affaires ? Un CO2 que, d'ailleurs, bien peu de compagnies aériennes ou ferroviaires affichent...

Au final, ce sont les moyens financiers qui manquent pour accompagner les réductions de gaz à effets de serre. Les pays développés se sont engagés, à Copenhague en 2009 et à Cancun en 2010, à mobiliser conjointement 100 milliards de dollars par an d’ici 2020 pour aider les pays en développement à faire face au dérèglement climatique. La contribution française à ce budget s'appuie sur la taxe (à venir) sur les transactions financières. La question des 100 milliards est un enjeu important des négociations parisiennes. Pour les déplacements professionnels, une réduction de 15% de leur volume, estimée à plus de 760 millions de déplacements dans le monde, contribuerait à 0,3% de l'objectif à atteindre.

Pierre Barre

Pour mieux comprendre les enjeux de la COP21, cette vidéo réalisée par Le Monde