Carlson : une grève peut en cacher une autre

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Comme dans une bataille marine bien réglée, un coup de semonce n'est pas forcément synonyme de conflit dur. Ce mardi 18 avril, les syndicats de Carlson Wagonlit Travel ont appelé le personnel à se mettre en grève pour quelques heures. Globalement, le mouvement a été bien suivi. Seule inconnue : la direction va-t-elle entendre la grogne des salariés et améliorer le PSE ?

En évoquant la menace dans nos colonnes le 4 avril dernier, peu de clients de CWT s'imaginaient que les syndicats de CWT lanceraient un arrêt de travail inattendu pour demander une refonte des offres proposées aux salariés dans le cadre du PSE. Aujourd'hui, les syndicats doutent de la volonté de la direction de proposer mieux que ce qui avait été accordé en 2013, même si le plan était qualifié de "généreux". Bref, la situation est bloquée.

Les demandes n'ont pas changé : une amélioration sensible des conditions de départ. Selon le tract de l'intersyndicale CGT-FO-CFTC, "La Direction CWT sacrifie 132 salariés sur l’autel de la STRATÉGIE 3.0 mais ne veut pas indemniser dignement les salariés alors que CWT dispose de moyens conséquents mais préfère les investir dans les nouvelles technologies, ces mêmes technologies annonciatrices de prochain PSE". D'après Zelda Couteau de la CGT, "Le mouvement ne continuera pas demain. Pour le moment, nous attendons de renouer le dialogue autour de propositions secrètes mais il faut savoir que ce sont les personnels eux-mêmes qui nous ont demandé ce mouvement".

Zelda Couteau ne cache pas que la situation est difficile : "CWT ne peut pas faire de profit au niveau mondial, les réinvestir dans le numérique et ne rien proposer à ses salariés. C'est impensable". Pour elle "il faut reprendre les négociations en tenant compte de la crainte des personnels sur l'avenir de leur travail". Les délocalisations en Pologne et en Roumanie énervent fortement les syndicats pour qui le dumping social ne peut exister dans le monde du voyage d'affaires où le professionnalisme est fait d'expériences. "Nous craignons surtout que dans quelques mois, les comptes soient eux aussi délocalisés sur des plateaux uniques, là où le travail est moins cher", conclut Zelda Couteau.

Au delà des conditions de départ, les salariés sont donc inquiets pour l'avenir, et semble-t-il à juste titre : "Ne nous leurrons pas, les 132 licenciements annoncés en France ne sont que les prémices d'une très vaste réorganisation" précise sous couvert d'anonymat un cadre américain. C'est déjà le siège qui avait annoncé les 2.000 licenciements dans le monde tout en évoquant la "possible reconversion numérique d'une partie des salariés concernés". Mais les syndicats français en veulent plus. "Nous pensons qu'avec un volume d'affaires qui frôlé les 2,3 milliards de dollars, CWT peut mettre sur la table un peu plus que ce qui est proposé aujourd'hui" explique un délégué syndical qui ne cache pas que sans réponse concrète, "la mobilisation des salariés sera forte".

Côté clients, pas de gêne sensible cet après-midi même si mouvement a été très suivi sur les deux plateaux qui doivent fermer, ceux de Saint Etienne et Nantes. "CWT a un réel retard technologique" précise un compte du CAC 40, "Que ce soit dans le mobile ou la gestion numérique des besoins du voyageur. La TMC a laissé partir KDS qui était dans son périmètre sans avoir d'autres solutions à proposer. C'est surprenant".

Tout va désormais se jouer ces prochains jours. Si les syndicats tiennent parole, le mouvement peut repartir en quelques heures. Pas sûr alors que les clients apprécient. Alors que la bataille commerciale fait rage avec Amex GBT, CWT s'engage sur une pente douce, dangereuse pour son avenir dans l'Hexagone.