Chez Air France, le jeu des hypothèses est engagé

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A quelques heures de la présentation du plan de relance d’Air France par Jean-Marc Janaillac, le jeu des "peut-être" est lancé. En interne, on sait désormais que le nouveau boss de la compagnie veut changer pas mal de choses. Un "big bang" nécessaire, selon les experts, qui doit bousculer l’esprit des clients mais aussi les habitudes des salariés.

Nouvelles têtes, nouveaux développements, nouvelles discussions avec le personnel, le patron d’AF KLM est bien décidé à frapper fort même si les syndicats se disent "prudents" sur ce qu’ils entendent aujourd’hui. Le discours officiel aura lieu ce mercredi devant le Conseil d'administration avant une présentation aux salariés demain jeudi en Comité Central d'Entreprise, puis présentation à la presse.

En devenant le nouveau Président d’Air France, en remplacement de Frédéric Gagey qui reste aux finances du groupe, Janaillac a une idée en tête : trouver un DG efficace capable de le seconder pour gérer le quotidien, lui-même devant suivre le dossier social. Inutile pour certains d’aller le chercher en interne. Le nom de Lionel Guérin, qui a abondamment circulé, n’est plus d’actualité. Comme le préconisait Jean-Paul Bailly dans son rapport sur l’état de la compagnie, il faut du sang neuf. On pourrait voir arriver des anciens de Transdev en qui Janaillac a toute confiance. Pure hypothèse à cette heure.

Autres changements possibles, l’organisation du travail pour renforcer la productivité. Le sujet est complexe en raison de la diversité des emplois. Mais pour baisser le coût de l’exploitation, il faut la repenser. "L’imagination doit primer sur ce qui existe", expliquait Jean-Marc Janaillac lors de son récent voyage en Chine. Et il aurait des idées que ce soit en termes de promotion interne voire, projet un peu fou, repenser le processus de séniorité qui sert aujourd’hui à l’avancement des pilotes. Un projet de taille, complexe, mais dont la formule est jugée peu égalitaire par les jeunes pilotes. Si cela était vraiment le cas, nul ne doute que des grincements de dents et autres mouvements sociaux seraient rapidement à la une de l’actualité.

Et les changements attendus vont au-delà de l’humain : refonte de la carte des destinations, lancement d’une vraie compagnie low cost (avec ou sans le groupement XL et la Compagnie) qui pourrait aussi s’articuler à l’international autour de Transavia. Les Hollandais sont pour. Les pilotes français ne seraient pas prêts à accepter une compagnie au rabais. Le talent de Jean-Marc Janaillac sera de les convaincre.

Enfin, le dernier point concerne plus directement les voyageurs et plus spécifiquement les déplacements professionnels. Air France va devoir repenser ses prix. D’autant que la rumeur met en cause la gestion tarifaire de la compagnie qui serait à deux vitesses : compétitive sur les destinations concurrentielles mais verrouillée là ou Air France est en situation de force. La tentation de Jean-Marc Janaillac serait de chercher à développer des niches à fort potentiel économique, un peu comme le vol direct vers le Costa Rica qui débute ce 2 novembre. Mais il ne faut pas négliger les poules aux œufs d’or, que ce soit vers l'Afrique, les USA ou l’Asie.

Pour l'heure, tout cela n’est que supputation. Nous serons dans quelques heures à quoi va ressembler l’avenir d’Air France. Les marges de manœuvre sont courtes et les possibilités économiques limitées. Jean-Marc Janaillac devra convaincre avec peu. Tous ceux qui le connaissent l’assurent : il peut soulever des montagnes.

Hélène Retout