Concorde : comment juger la responsabilité des entreprises ?

69

Le verdict est tombé, Continental Airlines a été reconnue pénalement responsable dans l'accident du Concorde d'Air France. Cette décision de justice, 10 ans après l'accident qui a fait 113 morts en juillet 2000, pose l'inévitable question de la responsabilité des entreprises face à des catastrophes aériennes ou politiques.

Depuis le mois de février dernier, le tribunal s'est penché sur les responsabilités de la compagnie Continental Airlines et de deux de ses employés ainsi que de trois anciens responsables de l'aéronautique française. Continental a toujours nié qu'un de ses avions soit responsable de la perte d'une lamelle sur la piste de décollage, entraînant ainsi l'éclatement d'un pneu de Concorde. Il faut toujours différencier l'approche juridique de la responsabilité réelle des entreprises. Les 175 000 € d'amendes prononcées à l'encontre de Continental sont bien loin de couvrir le drame humain. Ils sont la seule réparation judiciaire que l'on peut proposer à celles et ceux qui ont perdu un être cher dans l'accident. Peut-on alors anticiper ou prévoir ce que les spécialistes de l'assurance appel l'imprévisible ? Certainement pas, même si a priori on peut chercher à éviter qu'une telle catastrophe se reproduise. Tout, malheureusement, n'est pas prévisible. On voit bien aujourd'hui la maturité des entreprises françaises face aux risques, notamment les crises politiques qu'elles peuvent rencontrer dans le monde. L'exemple de la Côte d'Ivoire est révélateur du principe de précaution appliqué à des salariés en poste dans des pays difficiles. Fasse un climat d'insécurité pour les Français, la plupart des entreprises présentes sur place ont fait le choix de rapatrier leurs employés et de ne laisser sur place que le personnel réellement nécessaire à la continuité des activités économiques. Certaines ont même pris la décision de les encadrer quasi militairement pour éviter tout incident regrettable. Cette situation, loin d'être récente, n'empêche pas les tribunaux de condamner les entreprises qui - malgré tous leurs efforts - auraient été victimes d'attentats mettant en jeu la vie de leurs salariés. C'est toute la différence entre l'approche émotionnelle et la simple application de la loi. Le dossier Concorde, finalement, ne fait que rappeler que les textes sont à même d'analyser juridiquement la responsabilité d'un opérateur aérien. Mais on sait aujourd'hui que la responsabilité de l'entreprise ne saurait se contenter d'un texte de loi, fût-il le meilleur.

Hélène Retout