Concorde, douze ans de procédure pourquoi faire ?

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La cour d'appel de Versailles a rendu ce jeudi 29 novembre son verdict dans l'affaire du crash du Concorde qui avait fait 113 morts le 25 juillet 2000 à Gonesse, dans le Val-d'Oise. Continental Airlines, et deux employés également poursuivis, sont relaxés même si la compagnie américaine devra verser 1 million d'euros Air France et près de 300 000 € à diverses parties.

Ce jugement, comme dans beaucoup d'autres cas de crash aérien, ne devrait pas satisfaire les différentes parties qui s'opposaient. D'abord, pour les familles, le choc est de taille : il n'y aura pas de responsable officiel malgré la longueur de la procédure et l'importance du dossier. Pour Air France, et son président Jean-Cyril Spinetta qui avait été fortement bousculé par le drame, la décision débouche sur une simple ligne comptable. Une vison purement financière. On sait aujourd'hui qu'un accident d'avion est la forme d'apprentissage la plus terrible. Chaque crash livre son lot de conclusions techniques qui conduisent a l'amélioration des avions et des processus de pilotage. Seuls les morts rappellent la dimension affective de l'accident et permettent à la justice, comme aux compagnies aériennes, de suivre le long et douloureux chemin qui mène à la compréhension des faits. Et le vol AF 447 Paris /Rio est dans l'esprit de tous. Mais n'oublions pas que Concorde a été imaginé il y a presque 50 ans. C'est énorme en matière de conception technologique, à une époque où l'on parle de matériaux composites, d'avion sans pilote ou de carburant bio. Les ordinateurs de Concorde étaient moins puissants que la plus petite des tablettes que nous possédons aujourd'hui entre les mains. Ainsi va l'aventure de l'aérien. Entre l'imagination et les rêves des ingénieurs et le premier vol... Tout évolue, tout se perfectionne. Le temps technologique va plus vite que la réalisation des idées. Concorde, ne l'oublions pas, a permis quelques belles avancées que ce soit en matière de transport supersonique, d'ABS ou de gestion de matériaux complexes. Il est vrai qu'aujourd'hui, on ne construirait pas de la même façon cet appareil. Loin d'être abandonnée, l'idée du supersonique est toujours dans les cartons des gros avionneurs, persuadés que la technologie reste d'actualité même si le subsonique s'impose lentement mais sûrement dans l'esprit des ingénieurs.
Que faudra-t-il donc retenir de Concorde, hormis le drame humain ? Son inventivité, sa créativité, sa vitesse, sa capacité d'adaptation ? Sans doute, et aussi qu'il a été l'un des plus beaux avions de son époque. L'homme a payé un lourd tribu à ce bel oiseau blanc, aujourd'hui vedette passive des musées de l'air. C'est une aventure tragique et magnifique à la fois. Le grand écart entre la tristesse et le bonheur est décidément toujours le lot à payer dans le monde du transport aérien.

Pierre Barre