Des voyages d’affaires la peur au ventre

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Il y a une un mot en arabe qui résume assez bien ce qu’est la vie : mektoub. On pourrait le traduire simplement par « la destinée ». Une idée présente également dans la littérature asiatique et que l’on résume aisément par le sort et la malchance d'être, parfois, «au mauvais endroit au mauvais moment». Mais on ne saurait se contenter de phrases toutes faites pour accepter l’inacceptable. On peut accuser le monde entier de ce que qui s’est passé à Nice mais cela ne servirait à rien si rien n’est fait pour l’éviter.

La polémique qui agite aujourd’hui les politiques et les familles des victimes résume assez bien le besoin de responsabilité que demande le peuple. Pourquoi cela s’est-il produit en plein état d’urgence ? Pourquoi peu de choses ont-elles été faites pour l’éviter ? Des questions complexes qui vont se perdre dans la nuit du temps pour des réponses partielles qui ne satisferont personne. Secret stratégique ? Manque de compétence ? Chacun jugera de ce qui lui semble le mieux correspondre à l’idée qu’il s’en fait.

Dans les grandes entreprises allemandes, les voyageurs apprennent fréquemment à lire les risques et à tenter de se protéger d’une éventuelle attaque, qu’elle soit aux armes automatiques ou au couteau. Les stages proposés sont suivis avec intérêt par celles et ceux qui se déplacent en zone sensible. Tous sont formels, ils ne voient plus le monde comme avant. Des stages de même nature sont organisées en France par l'armée notamment. Ils sont notamment suivis par les reporters de guerre mais pas seulement.

Qu’apprend-on réellement ? Tout d’abord à savoir repérer les risques éventuels et à analyser les comportements dans des zones où la foule est nombreuse. Autre enseignement, la gestion des zones à risques. Vérifier la fermeture de ses portes d’hôtel, analyser d’emblée le chemin pour rejoindre une issue de secours et, chose toute simple, identifier le bruit d’une arme à feu pour ne pas le confondre avec des pétards d’un soir de fête. En Allemagne comme en France, les stages se déroulent sur plusieurs jours, en donnant aux participants le sentiment qu’ils apprennent à devenir des agents secrets et à se comporter comme le ferait le meilleur élément de la DGSE ou du Mossad.

Beaucoup le confirment, voyager en se protégeant n’est pas plus difficile que de voyager sans le faire. On apprend des réflexes, on modifie son regard sur son environnement et on prend conscience que ce qui change doit être intégré à son quotidien. Plusieurs entreprises allemandes affirment sans le détailler que ces stages ont sauvé la vie de quelques-uns de leurs meilleurs voyageurs. On veut bien les croire. Reste à parler prix. Une semaine de formation coute près de 5500 €. Un peu plus de 200 sessions sont prévus d’ici à la fin 2016. Combien en France ?

Marcel Lévy