Essence : jusqu’où peut-on rouler ?

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Vous souvenez vous des dernières manifestations sur les routes, en juin 2008? D'opérations escargots en blocages de dépôts pétroliers, les voyageurs d'affaires avaient eu bien des difficultés à se déplacer en se glissant entre les protestations des professionnels de la route, outrés par les prix des carburants. A l'heure où le prix du baril et de l'essence à la pompe battent de nouveaux records, il y a peut être de nouvelles inquiétudes à avoir, y compris pour les budgets des déplacements professionnels.

Le record historique du gas oil, le carburant le plus vendu en France, a été atteint le 30 mai 2008, à 1,4541 le litre. Vendredi dernier, le même litre de gas oil était à 1,42 €. Le ministère du Développement durable doit publier ce lundi soir les nouveaux tarifs, mais on n'en est plus très loin. Car depuis la semaine dernière, les cours du baril ont encore augmenté, à 123 US$ pour le Brent de la Mer du Nord, le court de référence. Entre les inquiétudes sur le pétrole iranien et le léger rebond de l'économie américaine, les spéculations vont bon train pour pousser encore le pétrole à la hausse et, par conséquent, augmenter le prix des carburants à la pompe.
Il y a quelques années, les sondages express auprès des consommateurs leur faisaient déclarer qu'ils "arrêteraient de rouler" dès que l'essence aurait atteint 5 francs le litre. Aujourd'hui l'affichage en euro permet de masquer une partie de la réalité. Mais le prix converti atteint 10,36 franc le litre pour le super 95, et 9,51 franc le litre pour le gas-oil... Là où le bât blesse le plus, c'est lorsqu'on fait des comparaisons très détaillées en remontant le temps via internet. On découvre ainsi que le baril valait en 1980 l'équivalent de 99 €, et le gas oil 0,37 € le litre à la pompe. Aujourd'hui le baril est à une centaine d'euros, mais le gas-oil atteint 1,40 € au moins. Une augmentation de plus de 380 % pour le consommateur ! Cherchez l'erreur, sans doute dans les profits des pétroliers mais aussi... dans le budget de l'Etat et la fameuse TIPP. On comprend mieux pourquoi le prix de l'essence est devenu un sujet de la campagne présidentielle...

Cela pourra t-il durer ? Telle est la question. Dans les entreprises, la souplesse est la règle pour survivre. Depuis 2008, chacun a appris à "faire" avec un carburant hors de prix et les budgets déplacements sont prévus en conséquence. Le kérosène représentait 8 à 10 % des budgets des compagnies aériennes dans les années 2000. Aujourd'hui, alors que les progrès en avionique et motorisation leur ont permis de diviser incroyablement leur consommation, le même carburant représente 38 à 40 % de leurs dépenses. Même la compagnie Emirates s'est mise, mercredi, à annoncer une surcharge carburant. Jusqu'où les budgets déplacements des entreprises pourront-ils absorber ces coûts ?

Hélène Retout