Et maintenant, que va devenir Charlie, voyageur d’affaires?

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Après cette marche républicaine, magnifique élan de défense des valeurs communes, qui a lieu ce dimanche à Paris et dans de nombreuses villes de France, comment la défense de ces valeurs va-t-elle se concrétiser pour le franchissement des frontières? Quelles conséquences pour le voyage d’affaires?

Après la colère et la revendication, l’émotion collective, que va-t-il se passer dans la vie quotidienne des Français et des entreprises ? De nombreuses voix se sont déjà fait entendre pour dire qu’il y avait eu des failles dans le fonctionnement des services de renseignement. À l’évidence, il y a eu de la naïveté, voire de l’angélisme, dans la manière de traiter la circulation des candidats au Djihad. 

Si ce 7 janvier a été comme on l’entend l’équivalent du 11 septembre pour les Américains, les Français sont-ils prêts, comme cela s’est passé outre-Atlantique, à abandonner quelques-unes de leurs libertés individuelles et collectives, au nom de la sécurité individuelle et collective ?

Exemple, la transmission des données complètes de l’identité des voyageurs dans les avions. Les Etats-Unis ont dû quelque peu tordre le bras à l’Europe pour imposer et obtenir cette transmission il y a plusieurs années. L’Europe est-elle prête à faire une surveillance plus détaillée et plus rapprochée des voyageurs ? A l’occasion de la rencontre des Ministres de l’Intérieur européens réunis hier Place Beauvau, le ministre français Bernard Cazeneuve a annoncé une coopération renforcée en Europe dans plusieurs domaines, parmi lesquels le contrôle des frontières extérieures de l'Union européenne. "Un contrôle approfondi doit être réalisé sur certains passagers, dans le respect des libertés", a précisé le ministre. Les ministres présents souhaitent également "progresser vers l'établissement d'un Passenger Name Record européen". Il s'agit précisément d'une possibilité d'échanger des données sur les passagers aériens entre membres de l'union européenne.

Le ministre de l’Intérieur espagnol, Jorge Fernandez Diaz, venu ce dimanche à Paris, y a défendu pour sa part  une modification du traité de Schengen pour permettre des contrôles aux frontières au sein de cet espace européen, afin de limiter la mobilité de combattants islamistes revenant en Europe. Le débat aura-t-il lieu ?
La France se dit prête à revoir la politique d’attribution des visas, mais comment ? Et quand ?

Les possibles mesures vont-elles perturber les déplacements professionnels ? Ne serait-il pas temps de mettre en place ce filtre «grand voyageur», sécurisant pour les entreprises et pratique pour celles et ceux qui se déplacent professionnellement?

Le temps de l’émotion passé, le débat politique qui s’est déjà esquissé va s’amplifier. La belle unité affichée peut exploser, c’est tout le risque du débat. Il faudra surveiller de près ses conséquences, et il ne faudra perdre ni la liberté, ni la sécurité du voyageur d’affaires, ni le soldat Charlie. Pas évident.

Annie Fave