Et si on parlait des avions qui arrivent à l’heure?

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Je me fais souvent écho dans ces colonnes des problèmes et dysfonctionnements du transport aérien, mais il ne faudrait tout de même pas oublier que la grande majorité des vols arrivent à l’heure. En juin dernier, c’était le cas des ¾ des vols avec cependant quelques disparités : l’Europe est dans la moyenne alors que l’Asie est nettement au-dessus et les USA très en dessous.

Notons cependant que les compagnies aériennes calculent leur ponctualité à 15 minutes, ce qui revient à dire qu’un vol est réputé à l’heure même s’il part avec 15 minutes de retard. Par contre, aucun délai n’est accordé au passager qui arrive à l’enregistrement avec 1 minute de retard sur la fameuse HLE (Heure Limite d’Enregistrement). Mais enfin, le fait est là. Dans leur grande majorité, les avions partent et arrivent à l’heure. Et ce n’est pas une mince performance. Dans le fond personne n’imagine la quantité de travail, la complexité de l’organisation, le nombre d’intervenants qu’il faut mettre en opérations pour faire partir un vol à l’heure.

Tout d’abord il faut avoir les avions et, pour cela, se les procurer soit par l’achat, soit par la location. Ce n’est pas une mince affaire. Il s’écoule plusieurs d’années entre la décision d’acquisition d’un appareil et sa mise en fonctionnement. Cela demande des études très poussées, non seulement sur les flux de trafic, mais sur les routes à opérer. Une erreur sur la composition de flotte d’une compagnie aérienne peut entrainer sa disparition.

Ensuite il faut assurer la maintenance. Les opérations sont complexes mais parfaitement codifiées par les constructeurs et contrôlées par les organismes nationaux compétents. Personne ne se pose plus la question de la fiabilité des appareils, mais cette dernière ne va pas sans d’énormes investissements.

Puis il faut détenir les droits de trafic, et les créneaux de décollage et d’atterrissage sur les aéroports les plus encombrés, en clair ceux où tout le monde veut aller. Cela réclame une anticipation d’un an au moins et si les vols ne sont pas enregistrés par les régulateurs, ils ne peuvent tout simplement pas opérer.

Une fois les vols programmés, il faut encore amener les appareils en porte d’embarquement. Ils ne sont pas tous positionnés convenablement. Cela dépend des rotations lesquelles sont sous la surveillance des opérations aériennes. En fait il suffit que le tracteur qui doit amener l’avion en position ne soit pas très bien coordonné pour que le vol parte en retard.

Mais cela n’est pas tout, avant de quitter son point de stationnement et même de recevoir les passagers, l’appareil doit être inspecté pour déceler le plus petit défaut et alors procéder à sa réparation, mais il doit être également nettoyé et avitaillé. Le catering doit être chargé à bord, rien de plus désagréable lorsque pour une raison quelconque l’équipage annonce qu’aucune prestation ne peut être servie. Mais pour charger l’appareil, il faut connaître le nombre de passagers, les exigences culinaires ou culturelles de telle ou telle catégorie et ce suffisamment à l’avance pour que la société de catering puisse amener le nécessaire à l’avion, tout en ayant été inspectée afin de vérifier que les règles de sûreté sont strictement appliquées.

Et ce n’est pas fini. Il faut charger l’appareil et bien entendu le décharger à l’arrivée. C’est le rôle de l’agent de handling. Les bagages sont attendus avec impatience. La coordination entre les équipes au sol et l’appareil encore en vol doit être particulièrement efficace. A quelle heure l’avion doit-il arriver, où sera-t-il positionné, sur quel tapis les bagages doivent-ils être délivrés ? C’est là qu’apparaît le rôle essentiel des aéroports.

Ces derniers doivent être capables d’anticiper leurs investissements une dizaine d’années en avance, sans pour autant connaître la stratégie des compagnies. Mais ils doivent également traiter les vols tous les jours et à la minute près quelques soient les conditions météo : rien de plus désagréable par exemple d’attendre la mise en place de la passerelle.

Et puis, il faut avoir des passagers à bord. Et pour ce faire, les équipes commerciales, les agents de réservation et d’enregistrement et les équipes de sûreté doivent déployer un savoir-faire très particulier.

Enfin, il y a les impondérables. Une météo défavorable au point de départ ou à l’arrivée, une congestion du trafic aérien - il y a par exemple en permanence 600 avions en vol en région parisienne - un accident sur l’autoroute, bref tout ce qui peut perturber la bonne marche d’un secteur d’activité si complexe.

Alors il m’arrive souvent de râler lorsque tout n’est pas parfait, mais tout de même quelle magie de relier une ville ou un continent à l’autre en parfaite sécurité, dans des conditions de confort sans cesse améliorées, le tout à 900 km/heure, même si pour cela nous devons avoir quelques minutes de retard!

Que tous les acteurs du transport aérien, et j’en ai oublié dans mon énumération, reçoivent mes remerciements et l’assurance de mon plus grand respect pour leur métier.

Jean-Louis Baroux