Etihad/Lufthansa, le mariage de la carpe et du lapin ?

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Difficile de comprendre l’intérêt immédiat d’Etihad et de Lufthansa à s’associer pour un partage de codes qui débutera en 2017. Après une décennie de critiques sur les compagnies du Golfe, la compagnie allemande fait volte-face et change son fusil d’épaule. A la clé un possible début de concentration européenne. Tête de pont de cet échange : Air Berlin.

Dans un premier temps, Lufthansa va louer pour 200 millions d’euros et pour 6 ans 38 appareils d’Air Berlin dont Etihad possède 30%. Ces avions sont affectés par le groupe allemand à ses filiales Austrian Airlines et Eurowings. Cette bouffée d’air va permettre à Air Berlin, dont les pertes abyssales (plus de 1,2 milliard d’euros) effraient Abu Dhabi, de repenser son plan de vol : seuls les courts et moyen-courriers seraient maintenus ainsi que les vols vers les USA.

Second volet de cet accord, un accord de partages de code entre Francfort et Munich vers Abu Dhabi ainsi qu’un échange entre Bogota et Rio de Janeiro, desservis par la Lufthansa, qui se refuse à commenter ce premier pas mais reconnaît tacitement qu’il y a un intérêt à travailler en toute intelligence avec ses concurrents. Carsten Spohr, le patron de Lufthansa, le dit clairement: "Il pourrait y avoir d’autres pistes de développement". La presse allemande évoque une centrale européenne d’achats propres aux deux compagnies. Le groupe germanique dément cette intention.

Il reste que l’on peut s’interroger sur les nouvelles orientations stratégiques de Lufthansa. La régulation demandée, début 2016, à la communauté européenne pour faire face à la concurrence du Golfe va vite devenir obsolète d’autant plus qu’après les prises de participation de Qatar Airways dans IAG, Air France va vite se retrouver seul dans cette bataille… Sauf si la compagnie d’Abu Dhabi fait des propositions concrètes pour être présente au capital de la compagnie française.

Cette vision, contestée en 2012 par Etihad, refait désormais surface. Avec dans ses équipes un ancien d’Air France, Bruno Matheu, qui connait bien les rouages et les faiblesses du transporteur français, tout est de nouveau possible. Les rumeurs, déjà évoquées en 2014 et 2015, ne sont pas toutes éteintes. Comme Lufthansa, Air France travaillera sans doute par étapes même si, à ce jour, il ne s’agit que d’une simple supputation. Mais Lufthansa vient de nous prouver qu’il faut toujours se méfier des déclarations péremptoires présentées comme définitives.