Faut-il s’attendre à une fronde des voyageurs d’affaires ?

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Autant dire que le sujet est sensible et peu évoqué dans les médias même s'il commence à naître dans quelques grandes entreprises françaises. Face aux restrictions sensibles des politiques voyages, se déplacer n'est plus une récompense où la marque d'une qualité commerciale ou technologique reconnue, c'est devenu un pensum pour beaucoup et plus particulièrement les femmes, souvent mères de famille aux contraintes professionnelles et privées souvent très supérieures à celles des hommes.

"Nous avons aujourd'hui des salariés qui refusent un voyage d'un jour sous prétexte qu'il n'apportera rien au développement d'un projet", m'expliquait à l'EVP le travel manager d'une grande société cotée au CAC 40. "Ce n'est pas un refus puéril ou caractériel, net et clair, mais souvent une démonstration logique du pourquoi et du comment de l'inutilité du déplacement programmé". Et de m'expliquer que le discours bien compris des économies à réaliser autour des déplacements professionnels, n'incitait pas les salariés à engager un voyage. Voire leur fournissait peut être une bonne raison de sursoir à un déplacement. D'où leurs réactions face aux demandes de la société. Ce n'est pas la première fois que la baisse des prestations offertes aux voyageurs suscite des mouvements d'humeur compréhensibles. En 2008/2009 déjà, deux grands syndicats français étaient montés au créneau pour exiger des textes clairs et précis sur la récupération des heures voyagées mais également sur la qualité globale du déplacement. Un sujet alors oublié rapidement par les mêmes organisations, empêtrées dans l'opposition à la réforme des retraites. Le recul des classes avant, le choix d'une hôtellerie intermédiaire, le développement des plages horaires de voyage, voilà qui finit par lasser celles et ceux qui se déplacent pour leur entreprise. Un Paris-Pékin en classe éco, cela peut refroidir les enthousiasmes. Cela veut-il dire que les voyageurs d'affaires se rebiffent ? Certainement pas. Tout au plus grognent -ils, mais ils se soumettent finalement aux besoins de l'entreprise. Ces réactions conduisent tout naturellement au développement de l'idée d'une "politique voyageurs" qui prenne le pas sur la seule "politique voyages". Un sujet complexe qui engage Alain Joyet, sociologue d'entreprise, à se pencher pour DéplacementsPros sur une nouvelle thématique de la relation voyageur/entreprise : "Communiquer autour des règles économiques du voyage pour un nouveau contrat social du déplacement professionnel". Réponse sur son analyse dans quelques semaines.

Marcel Lévy