Grève Air France: un pilote qui ne fait pas grève s’explique

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Tous les points de vue sont bons à entendre dans cette grève Air France qui, au-delà des conditions propres à la compagnie, évoque en réalité la question de toutes les compagnies "régulières" face aux low cost....

Vous avez peut-être lu ce point de vue d'un pilote qui explique pourquoi il fait grève. Les réponses à son propos qui nous parviennent éclairent le débat, c'est pourquoi nous vous en rapportons deux:

Un pilote qui ne fait pas grève

Je fais également partie des « dinosaures » d’Air France avec plus de 30 ans dans les cockpits d’Air France. Aujourd’hui, j’ai le sentiment de revivre ce que j’ai connu de l’extérieur avec l’arrivée de l’équipage à 2 au sein d’Air France dans les années 80. L’attitude du SNPL était très claire à l’époque: « le PEQ 2 sur les avions d’Air France: jamais »…quitte à ne pas acheter les 737 et laisser par terre de nombreux jeunes pilotes en attente…résultat, nous avons été les derniers à accepter de voler à 2…

Aujourd’hui, aucun adhérent du SNPL n’envisage de refuser de partir en vol à 2 sur MC comme sur LC…même au-delà de 8h de vol sur LC, ce que refusent toujours nos collègues américains…

Les pilotes d’Air France qui sont partis, sur volontariat incité, voler sur les avions de Transavia dans le strict respect de l’accord signé récemment par le SNPL n’ont pas demandé, que je sache, à revenir voler sur MC au sein de la maison mère…et s’ils étaient heureux de voler sur Transavia?…

Le SNPL s’est mis, tout seul dans une situation bien difficile en signant il y a quelques mois l’accord permettant d’exploiter 14 avions Transavia avec des équipages AF aux conditions Transavia, et en refusant aujourd’hui de permettre l’extension de cet accord à un nombre plus important d’avions, accord qui une fois de plus est basé sur le seul volontariat.

Ce que mon collègue décrit plus haut dans son post, c’est l’arrivée de la mondialisation et les méfaits du dumping social qui en découle…mais que propose-t-il pour y faire face?…rien malheureusement car la mondialisation est en marche et frappe tous les secteurs de l’économie…Que propose le SNPL?…l’immobilisme à la façon « docker marseillais »? …Le SNPL vient d’engager ses adhérents et la population pilote par voie de conséquence (ou plutôt par « panurgisme » pour beaucoup) dans une lutte suicidaire en prenant le risque invraisemblable de laisser des 737 achetés par un groupe français voler en Europe avec des équipages non français alors que nombre de jeunes pilotes français resteront à terre…

Cette attitude guerrière a donné les résultats que l’on connait il y a 30 ans lors de l’arrivée de l’équipage à 2, et plus récemment lors du déplafonnement…Aujourd’hui, après avoir refusé en 2008 de laisser voler des pilotes au delà de 60 ans, après avoir incité les pilotes à faire grève 4 jours sur ce motif, le SNPL est bien obligé de constater que plus de 60% des CDB, dont bon nombre d’adhérents du SNPL, demandent à prolonger leur activité au delà de 60 ans…preuve s’il en est que le combat que nous proposait le SNPL à l’époque n’était pas le bon…ce qu’il fallait, et je suis pas le seul à le dire, c’était négocier au mieux ce qui était à l’époque négociable pour inciter les anciens à partir…ce qui n’a pas été fait…

Aujourd’hui, plutôt que de continuer à s’entêter dans une attitude jusqu’au-boutiste suicidaire, attitude nouvelle de la part du SNPL après tant d’années de « cogestion », attitude que l’on peut bien entendu comprendre après le dernier échec électoral subi par le SNPL, et à quelques mois des prochaines élections internes, il est maintenant grand temps de revenir à la table de négociation et d’obtenir ce qui peut encore l’être: le maintien sinon l’amélioration des conditions définies dans le précédent accord signé par le SNPL concernant Transavia (notamment les primes d’incitation), la définition précise du périmètre de Transavia France, Transavia Pays Bas et Transavia Europe, avec pour objectif de faire en sorte qu’un maximum de pilotes français puissent voler sur les avions de Transavia Europe… Bon nombre de jeunes pilotes français apprécieraient de pouvoir voler sur des avions appartenant au Groupe AF-KLM aux conditions Transavia en attendant de poursuivre leur carrière au sein du Groupe plutôt que d’aller voler, au mieux, sur des avions mal entretenus au fin fond de l’Afrique, ou, au pire, de rester caissier dans le centre commercial le plus proche de leur domicile…

Un CDB 777
Autre point de vue, celui d'un observateur de l'aérien qui répond directement aux pilotes grévistes

Votre vision demeure très simpliste.
Avec celle-ci, Volkswagen ne lance jamais une usine hors d’Allemagne, puisque les ouvriers et les ingénieurs s’y opposeraient au nom de la concurrence déloyale, des coûts inférieurs et blablabla…

Pourtant, aujourd’hui, VW est dans le TOP 3 avec des usines partout dans le monde, aucun métier à valeur ajouté délocalisé et des salariés allemands qui ont bénéficié à plein de la croissance sur des marchés externes.

Quel est l’avenir d’Air France vu de l’intérieur et au coeur de la stratégie du groupe?
Air France KLM n’a plus la taille critique pour grandir, ses coûts sont trop élevés, en partie par des charges de structures trop élevés (Siège et staff sol) et des coûts variables aussi trop élevés (PNC et PNT, Escale). Sur des destinations de plus de 10h, les pilotes coutent deux fois plus chers que la concurrence, pas en salaire mais aussi par des règles beaucoup plus souples que celle standard!

Sans croissance, on parle de quoi? Moyen-Courrier : Easyjet/Vueling récupère nos slots de Orly, attaque nos parts de marché sur le segment affaire et boum plus de Point à Point et de hub.
et après sans moyen-courrier ce sera le Long-Courrier : La bataille du moyen-orient est perdu, celle de l’Asie du Sud-Est en passe de l’être, celle de la Chine et du Japon, très fluctuante au gré des taux de change. Sur l’Atlantique Nord, Delta est dans une santé insolente et met la pression sur la joint-venture dans son ensemble. Sur l’Amérique Sud et l’Afrique, nous sommes à la merci des Turkish et des Latam qui se restructure et devienne compétitif.

Aujourd’hui, nous devons ralentir les low-cost? Aux USA, leur part stagne à 45%. Pourquoi, parce que les couts de DL, UA, AA et autre sont équivalent aux low-cost. Transavia c’est ca, un outil qui doit bloquer les low-cost, les faire ralentir, occuper le terrain. Et une low-cost qui ralentit perd un de ces avantages compétitifs.
Et vous, un avis à nous faire partager avec des explications argumentées?