Hôtellerie: peut–on faire un paiement centralisé et une facturation centralisée avec une carte virtuelle ?

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Dans un contexte propice à la recherche d’économies dans les frais de déplacement des entreprises, l’attention se focalise sur le périmètre hôtel, second poste de dépenses après le transport. Malgré son importance, ce poste reste difficile à contrôler et encore plus à optimiser, et l’ensemble de la profession fait consensus sur la nécessité de recourir au paiement centralisé et même de la facturation centralisée.
Mais ces termes sont-ils toujours bien définis et bien utilisés ? Les promesses faites par les différents acteurs en la matière sont-elles tenables ? Sont-elles tenues ? C'est sur ce sujet qu'a planché Stéphane de Laforcade, Président de HCorpo.

Rappelons brièvement tout d’abord le principe de la carte virtuelle.
Dans le cadre d’une transaction, disons une réservation d’hôtel, il est nécessaire de garantir et/ou de régler avec une carte de crédit.
A cet effet il existe 2 options :
  • Une carte physique
dont le numéro est transmis à l’hôtel qui la chargera du montant du séjour. Ceci comporte des inconvénients importants en terme de sécurité (risque de piratage) de contrôle du montant chargé et bien sûr de traçabilité.
  • Une carte virtuelle
qui est générée pour chaque transaction. Dans ce cas il est possible d’en borner les dates d’utilisation, le montant maximum chargeable et même le type de commerçant. La sécurité s’en trouve grandement renforcée.
Il est possible aujourd’hui de coupler l’utilisation de certaines plateformes de réservation avec une génération automatique (web service) de cartes virtuelles en garantie et/ou paiement. Pour rappel, il s’agit de cartes émises au nom de l’entreprise et non pas du voyageur qui n’a plus à utiliser sa propre carte fut-elle corporate ou personnelle.

Peut-on parler dans ce cas de paiement centralisé ? Non
L’argent « sort bien de la poche de l’entreprise » et non pas de celle du voyageur mais un règlement est envoyé pour chaque réservation à chaque comptoir d’hôtel. Il s’agit donc par essence même d’un paiement décentralisé.

Quid de la facturation centralisée ?
Il suffit de se pencher deux minutes sur le process mis en place dans le cas du règlement d’une réservation d’hôtel par carte virtuelle pour comprendre qu’il ne s’agit pas du tout d’une facturation centralisée.

Que se passe-t-il en pratique ?
Le voyageur au moment de son départ ne règle pas avec sa carte car le règlement se fait au moyen de la carte virtuelle au numéro unique émise à cet effet.
Il ne réclame donc pas de facture pour sa note de frais. Et l’hôtelier ne lui en remet pas puisqu’il est d’usage de remettre une facture au payeur.
Une fois le collaborateur parti, l’hôtelier n’envoie pas non plus de factures à l’entreprise car il ne dispose pas des informations pour le faire, ni non plus de la motivation nécessaire : il a déjà eu son règlement.

La situation en l’espèce est plus grave qu’il n’y parait, à plusieurs titres.
Tout d’abord force est de constater qu’il n’y a pas eu de facturation centralisée, le terme est erroné voire trompeur. Mais surtout il n’y a pas de facturation du tout. Et l’entreprise ne dispose pas de la pièce comptable, légalement exigée par l’administration fiscale, face à sa dépense. Au-delà de l’aspect absence totale de traçabilité et reporting , une obligation légale n’est pas remplie.

D’un point de vue organisationnel dans les services comptables de l’entreprise, on peut aussi soulever un point qui ne manque pas d’achopper : le paiement sera prélevé par la carte sur le compte de l’entreprise que celle-ci dispose ou non des pièces comptables.

En résumé, l’utilisation d’une carte virtuelle en règlement de réservations hôtelière peut être une excellente solution pour un professionnel plateforme hôtel pour régler ses achats à la volée dans le cadre d’un flux financier très sécurisé et d’un contrat engageant par exemple la chaîne d’hôtel à fournir ses factures. L’utilisation pour une entreprise doit être faite en toute connaissance de cause afin d’éviter les désillusions ou pire, mais assez probablement, les ennuis comptables et fiscaux.

Comment avoir la facturation centralisée sur l’hôtellerie ?

On ne peut pas « bricoler » la facturation centralisée. Celle-ci a de grandes vertus (facilité pour les collaborateurs, économies sur les coûts de traitement, visibilité complète…) mais impose de passer par un modèle économique spécifique.

En effet, le pré-requis indispensable à la facturation centralisée est que ce soit une seule et même entité juridique qui facture toutes les réservations de l’entreprise, on appelle cela la prise en charge. Toutes les réservations sont donc payées par cette entité intermédiaire qui les refacture ensuite à l’entreprise. Le paiement est cette fois vraiment centralisé puisqu’il ne se fait qu’en un seul point centralisé : l’entité qui refacture l’entreprise.
Si cette entité est une TMC on entend le terme « Bill Back ». Si cette entité est une plateforme hôtel, on dit « prise en charge » et facturation centralisée (central billing).
Dans ce cas spécifique, on peut donc parler de la vraie facturation centralisée.

Il est alors possible de régler cet intermédiaire avec tout moyen de paiement, y compris une carte logée ou BTA avec, en cerise sur la gâteau, les avantages de ce type de paiement (data niveau 3, traçabilité analytique, consolidation, délais de paiement etc.).

Stéphane de Laforcade
Président de HCorpo