Connu pour son franc-parler et ses prises de position qui bousculent les idées reçues, le patron français d' Emirates Jean-Luc Grillet se dit déçu de la façon dont les entreprises gèrent aujourd'hui leurs contrats Corporate. Pour ce spécialiste du transport aérien, arrivé à l'ouverture du bureau d'Emirates à Paris, la confiance et le réalisme sont les deux éléments essentiels à toute négociation tarifaire avec les acheteurs ou les travel managers. Il ne cache pas qu'il faut parfois bousculer les situations établies pour faire comprendre au client qu'une bonne affaire n'existe que lorsqu'elle est partagée par les deux partenaires. Pour Déplacements Pros, Jean Luc Grillet revient sur les grandes thématiques du transport aérien. Sans langue de bois !
Déplacements Pros : Comment jugez-vous aujourd'hui le travail des Travel managers et des acheteurs voyages en entreprise ?
Déplacements Pros : Et si nous revenions aux contrats Corporate ?
Déplacements Pros : On dit de Jean-Luc Grillet qu'il n'est pas facile en négociations et parfois même on vous traite de « voyou » ?
J'ai la même rigueur dans les négociations que je mène. Je veux bien faire tous les efforts demandés à condition que ce ne soit pas simplement pour le plaisir de négocier. Pour avoir un bon prix, il faut avoir quelque chose à proposer. Chez Emirates, nous partons du principe qu'il y a d'un côté les tarifs publiés, pour ceux qui ne veulent absolument pas s'engager avec nous, et de l'autre des contrats privilégiés pour permettre à nos clients fidèles
Je préfère n’avoir que 5 contrats Corporate qui fonctionnent bien que 120 qui ne rapportent rien.
Etre référencé n’est pas un but en soi.
Il m'est arrivé de mettre fin à des négociations tout simplement parce que nous étions dans un échange stérile qui n'apportait rien à la compagnie aérienne. J'ai vécu des réunions qui ne dépassaient pas 20 minutes. Nous n'avions rien à nous dire !
Déplacements Pros : Comment faites-vous avec les agences de voyages ?
Nous avons expliqué à nos interlocuteurs que la qualité tant de nos produits que de notre réseau faisait qu’une forte demande existait et que ces deux éléments étaient suffisamment forts que quoiqu’il arrive les TMC nous commercialisent. Après quelques années, elles ont en grande partie oublié ce droit d'entrée et nous constatons aujourd'hui un fait étonnant : Carlson Wagonlit Travel, avec qui nous n'avons pas de contrat particulier, fait une progression de plus de 40 % de ses ventes cette année et Amex, avec qui nous avons un contrat, en est loin. Evidemment il ne faudrait pas en tirer de conclusions hâtives, de nombreuses agences conservent encore une véritable force de conseil auprès de beaucoup d’entreprises et c'est particulièrement vrai dans les PME-PMI et les professions libérales qui représentent une bonne part de notre clientèle professionnelle. Mais la qualité de l’offre Emirates est difficilement contournable.
Déplacements Pros : Quelle est aujourd'hui la part de marché entre l'affaire et le tourisme ?
Déplacements Pros : Vous avez souvent dénoncé le peu d’efficacité des contrats avec les réseaux volontaires, qu’en est-il ?
Déplacements Pros : On se souvient, il y a quelques années déjà, qu'Air France n'avait pas ménagé ses attaques contre Emirates. Il y a quelques semaines, Pierre-Henri Gourgeon est revenu sur le sujet. Comment vivez-vous cela ?
De même, « on » nous accuse aussi d’avoir des comptes opaques, de nouveau c’est mensonger, tous nos comptes audités des 5 dernières années (PriceWaterhouseCoopers), sont en ligne sur notre site. On peut y constater en particulier que le premier poste de dépense d’Emirates c’est le Jet Fuel avec un poids de 30% de nos dépenses 2009-2010 quand d’aucuns prétendent que nous l’avons gratuit.
On voit bien que des éléments simplissimes comme le nombre d'heures travaillées par les pilotes ou l’amplitude d’ouverture réduite des aéroports français sont autant d’éléments qui pénalisent Air France mais ne sauraient en aucun cas être imputés à Emirates.
Quand les taxes d’atterrissages sur Dubaï sont très inférieures à celles de la France, ce n’est pas l’Emirat qui souhaite soutenir son tourisme qui est à blâmer mais les coûts élevés des aéroports parisiens.
Enfin sur le Top 38 des routes les plus vendues par Emirates en France, 15 seulement sont desservies par Air France. Cela démontre parfaitement que nous ne sommes en rien le pilleur qu’on nous accuse d’être.
Nous prouvons aussi chaque jour que des aéroports secondaires peuvent recevoir des lignes long-courrier pour le plus grand bien économiques des régions : Nice évidemment mais aussi Manchester, Dusseldorf, Venise, Hambourg, Glasgow, Prague, Munich, Perth, Cochin.
Nous prouvons aussi que le choix que nous avons fait autour de l'A380 démontre qu'il y a véritablement un vrai phénomène de demande dans l'aérien pour cet avion. C'est ce qui explique partiellement nos résultats de 351 % en un an.
Déplacements Pros : Quels sont alors les innovations que vous allez mettre en place ces prochains temps, compte tenu de vos observations sur les Travel Managers ou les agences de voyages ?
Propos recueillis par M.L.