Le ras le bol américain des réseaux sociaux

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Le net brûle très vite ce qu’il vient à peine d’encenser. L’exemple des réseaux sociaux est très révélateur. Après avoir porté aux nues la vie privée numérique, voilà que les experts du San Francisco Chronicle, ceux qui donnent le ton de l’informatique des prochaines années, s’attaquent violemment aux effets pervers de Facebook ou de Twitter. […]

Le net brûle très vite ce qu'il vient à peine d'encenser. L'exemple des réseaux sociaux est très révélateur. Après avoir porté aux nues la vie privée numérique, voilà que les experts du San Francisco Chronicle, ceux qui donnent le ton de l'informatique des prochaines années, s'attaquent violemment aux effets pervers de Facebook ou de Twitter. "La masse énorme d'utilisateurs qui s'est emparé du produit a tout naturellement fait croire que ces deux services étaient indispensables à notre vie quotidienne", écrit Sherry Crowler, journaliste spécialisée, "Au final, on affiche des dizaines de copains mais ceux qui écrivent sur nos murs ne sont le plus souvent que des marchands du temps. Moi je ne veux plus être l'amie de Coca Cola ou d'American Airlines".
Faut-il parier sur l'avenir de Facebook ? Pas si sûr, semblent dire aujourd'hui les spécialistes de l'internet. "En réinventant la place du village, le téléphone ou les discussions entre copines dans la cour d'école, on a eu le sentiment d'avoir de nouveaux outils de communications", poursuit Sherry Crowler,"Mais en regardant le résultat dans la vie de tous les jours, on a conservé nos trois ou quatre meilleurs amis. Pas plus. Le reste, c'est un surplus d'informations souvent impudiques, égarées sur des fils de cuivre accessibles à tous". Des propos un peu durs mais très révélateurs du ras le bol qu'inspirent ces nouveaux outils de dialogue. Car pour les rentabiliser, il a fallu ouvrir la porte à la pub. Et les résultats ne se font pas attendre : en deux semaines je suis devenu, par politesse, l'ami d'une dizaine d'agences de voyages dont le seul échange sympathique se borne à des promotions vers le Maroc ou la Tunisie ! Idem pour mes amis. Avant, ils prenaient le temps de me parler. Aujourd'hui ils écrivent en deux lignes des phrases sibyllines sans intérêt. Ils "commentent" mon mur. Comme un peintre portugais le ferait d'un carrelage fraichement posé. Un "mur", c'est terrible comme expression. Quand on est face à un mur, c'est rare que l'on puisse avancer. Pire, ils cliquent sur un bouton pour me dire "qu'ils aiment" mes commentaires. Quelle chance j'ai ! Ils m'envoient des bouts de vidéo sans intérêt censés résumer une grande cause qu'ils défendent. Parfois même on me dit que c'est drôle. Alos bêtement, je souris !
Bref, aujourd'hui, je souscris à cette idée qui dit "marre des réseaux sociaux". J'aime qu'on me parle, qu'on s'explique, qu'on m'informe. Pas que l'on vienne gratter un mur invisible qui, soyons franc, est bien le dernier de mes soucis ! Depuis la chute de celui de Berlin, les murs ne m'inspirent plus confiance.

Philippe Lantris