Le wifi, une préoccupation pour tous les hôteliers

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C'est Aude Lenoir du Réseau de veille en tourisme qui s'intéresse aujourd'hui à la relation entre les hôteliers et le wifi. Pour l'analyste québécoise, entre l’installation, la maintenance et la mise à niveau, le réseau internet sans fil donne... du fil à retordre aux hôteliers, qui ont des avis divergents sur la gratuité de ce service. Les clients ne choisissent plus uniquement un hôtel pour la gratuité du petit-déjeuner ou du stationnement, ou encore pour la taille de la chambre, mais aussi pour la connexion Internet, qu’ils souhaitent gratuite, rapide et fonctionnelle. De plus en plus d’établissements tentent de satisfaire cette demande, mais cela représente un véritable défi à relever!

Selon le rapport 2013 du magazine Web HotelChatter, 64% des établissements appartenant à des chaînes hôtelières offraient gratuitement le wifi entre mars 2012 et avril 2013, du moins dans le hall principal. Le magazine a réalisé une infographie indiquant les grandes bannières où Internet sans fil est gratuit et celles où des frais variant entre 10 et 15 dollars sont facturés au client.

De manière générale, les hôtels économiques et de moyenne gamme ont davantage tendance à offrir gratuitement le wifi. Cette décision s’ancre dans leurs stratégies de différenciation et de prix qui consistent à inclure dans le tarif de la chambre les services tels que le petit-déjeuner, les appels téléphoniques ou encore le wifi. À l’opposée, les établissements de luxe et haut de gamme adoptent le principe du «tout est offert moyennant un coût». Selon l’American Hotel & Lodging Association, plus de 75% de ces derniers facturaient des frais pour l'internet sans fil dans les chambres en 2012, comparativement à 23% pour l’ensemble des hôtels des États-Unis

L’accès à Internet dans les hôtels est souvent une source d’insatisfaction pour la clientèle, qui se plaint de son coût, du débit insuffisant ou de la difficulté à se connecter. Les sondages le confirment d’ailleurs: le wifi gratuit est devenu l’un des principaux critères de choix d’un hôtel pour les voyageurs.

Selon une enquête américaine d’Hotels.com réalisée en 2012, un réseau sans fil gratuit constitue pour le client potentiel le service le plus important, lorsqu’il s’agit de sélectionner un établissement (38% des répondants), suivi du petit-déjeuner (25%) et du stationnement (18%) gratuits. Un sondage effectué en 2013 par InterContinental Hotels Group renchérit en révélant que 43% des voyageurs refuseraient de séjourner dans un hôtel qui n’offre pas d’accès gratuit à Internet.

Cependant, il ne suffit pas pour l’établissement d’offrir ce service gratuitement pour rendre le client heureux. Selon l’indice de satisfaction 2013 des clients d’hôtels nord-américains, réalisé par J.D. Power and Associates, la connexion à Internet et sa vitesse étaient la cause de mécontentement de 31% de ceux qui avaient éprouvé un problème durant leur séjour.

Offrir le wifi gratuitement, oui, mais en limitant son accès

Entre offrir le wifi et le faire payer à tous, il existe quelques solutions intermédiaires. Plusieurs chaînes ont choisi de donner l’accès gratuit uniquement aux membres de leur programme de fidélité, et ce, dès leur adhésion, comme c’est le cas des hôtels Omni, Fairmont et bientôt InterContinental Hotels Group. Quelques établissements offrent par ailleurs ce service aux clients qui réservent directement auprès d’eux; cette pratique innovante constitue un incitatif pouvant leur permettre de réduire leur dépendance envers les agences de voyages en ligne.

Certains proposent un accès gratuit pour une période déterminée dans tout l’établissement, tandis que d’autres le limitent à certaines zones, telles que le hall principal ou le centre d’affaires. Depuis cette année, c’est devenu un standard pour la chaîne Marriott, qui offre le wifi dans le hall de ses 500 hôtels, pour les clients comme pour les visiteurs.

Quelques éléments techniques pour améliorer le service

La bande passante, qui est partagée par tous les utilisateurs connectés au réseau, permet le transfert des données. Plus les clients sont nombreux en ligne, plus le téléchargement des données est lent, d’où la nécessité pour les établissements d’augmenter le débit pour offrir un service de meilleure qualité. Ainsi, certains hôtels accueillant de multiples congrès font le choix d’accroître leur bande passante, car les clients sont nombreux à se connecter au réseau. À l’inverse, un hôtel familial de quelques chambres se satisfera d’un débit réduit.

Enfin, la tendance du multiécran, où le consommateur se connecte à partir de plusieurs supports (ordinateur portable, tablette, téléphone mobile, etc.), presse l’hôtelier à améliorer son réseau et à augmenter le nombre de points d’accès. En effet, les tablettes et les téléphones mobiles captent le signal wifi dans un rayon beaucoup moins large qu’un ordinateur portable.

Améliorer le service pour justifier les frais

De manière générale, dans un hôtel qui offre gratuitement le wifi, la bande passante dans une chambre est de 1 Mbit/s, ce qui permet au client de consulter ses courriels ainsi que de naviguer sur les sites Web et réseaux sociaux. Lorsque des frais sont appliqués pour l’utilisation d’Internet, le débit peut augmenter entre 2 et 5 Mbit/s, rendant possibles les téléchargements de photos, de vidéos et de musique, ainsi que les discussions sur Skype.

Lors d’un webinaire organisé par Hospitality Financial and Technology Professionals, Shawn Tsetsilas, de Cellular Specialties, suggérait aux hôteliers de limiter les frais d’accès wifi à un montant compris entre un et cinq dollars américains, mais de faire payer le client selon la quantité de données transférées. Cette facturation à l’utilisation implique cependant une meilleure qualité du service, le client étant plus disposé à payer pour un réseau fonctionnel. À l’inverse, l’hôtelier doit être conscient qu’un service gratuit de mauvaise qualité peut être plus préjudiciable que s’il était payant.

L’expérience numérique devient progressivement une partie intégrante du voyage, et à l’heure de la transformation des lieux publics en zones d’accès sans fil (hotspot), le wifi est devenu la norme. Les hôteliers sont-ils tous en mesure de suivre cette tendance?

Qui est Aude Lenoir

La Bretagne, terre de ma jeunesse, a soufflé sur moi un vent de passion pour le tourisme et j’ai très vite surfé sur la vague de l’inconnu. J’exerce alors différents emplois dans l’industrie, en France et au Québec, sans pour autant négliger mes études. Une fois diplômée d’une maîtrise en Tourisme, spécialité gestion hôtelière, je m’installe à Montréal et j’occupe un poste de supervision dans un hôtel. Le rythme effréné ainsi que l’interaction avec les clients et les employés me plaisent beaucoup, mais l’envie de plonger davantage dans le monde de l’industrie touristique me tenaille. Ce fut une grande opportunité pour moi que de joindre l’équipe du Réseau de veille en tourisme en 2010.

Je me passionne pour le réseau de distribution, en particulier l’hôtellerie et les agences de voyages, et je cultive un vif intérêt pour l’e-tourisme. Selon moi, développer un produit ou aménager un lieu touristique, c’est réaliser que cette richesse, ce patrimoine doit être connu et reconnu. Les acteurs québécois, de par leur foi en leurs régions et leur dynamisme, ont créé une offre diversifiée et de qualité. Les enjeux auxquels ils font face nous préoccupent, c’est pourquoi notre rôle est de les aider à mieux comprendre l’évolution du tourisme, son actualité et les tendances à travers le monde.

« Au delà de ce qui est nécessaire, il y a ce qui rend heureux » (proverbe Breton)