Les low cost asiatiques peuvent-elles réellement intéresser les acheteurs français ?

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Scoot, la filiale de Singapore Airlines, qui a débuté ses vols entre Singapour et Sydney ce 4 juin pose indirectement la question de l'utilité de toutes ces low cost asiatiques qui ont vu ou verront le jour ces prochains mois. Par définition, ce mode de transport aérien à bas prix s'adresse principalement à une clientèle locale ou extra locale dans un périmètre de une à trois heures de vol. Mais pourquoi pas ?

Dans le cas de Scoot, on peut se demander si cette concurrence qui émane d'une compagnie aérienne mondialement réputée, répond à une stratégie bien établie. Pour les acheteurs actifs sur le continent asiatique pour leurs voyageurs, il est généralement plus facile d'organiser un déplacement complexe au départ de Paris avec là où les compagnies associées capables d'organiser le voyage. C'est d'ailleurs le rôle des alliances que de faciliter la construction d'un programme aérien qui dépasse le point à point. Dans le cas de Singapore Airlines et de son hub, on peut se demander si l'idée ne serait pas à terme de limiter l'activité de la compagnie mère aux vols entre Singapour et le reste du monde, et de laisser le soin aux low cost d'assumer les fins de ligne, que ce soit vers l'Australie ou d'autres destinations plus proches. Quel intérêt ? A priori, la haute qualité de service proposée par Singapore Airlines ne peut se plier facilement aux exigences économiques de l'exploitation d'une ligne à bas prix. L'image de la compagnie originelle se trouverait écornée. De quoi nuire à SIA. Sur une low cost, dotée d'un autre nom, les services peuvent être payants ou adaptés à la classe de vol choisi. On sait aussi que les low cost ne passent pas l'international avec succès. Le cimetière aérien est plein de sociétés qui avaient fait le pari du prix bas. Air Asia X, la dernière en date vers Paris, a jeté l'éponge, préférant se limiter à sa zone traditionnelle de couverture.
Singapore n'en est pas à sa première prise de participation. Sa présence dans Virgin, à hauteur de 49 %, montre son intérêt pour le transatlantique. Les deux sièges au sein de China Eastern ne l'éloignent pas de l'immense marché chinois. Enfin, Silkair, la filiale déjà présente sur le marché australien, ne cache pas ses ambitions sur les pays limitrophes. Bref, en mettant à plat le réseau de SIA, on se rend vite compte que la compagnie a parfaitement compris que toute stratégie de développement réussie passait par une segmentation de l'offre aérienne. Un exemple à méditer, pour ne pas dire à copier. Il reste à savoir si ces low-cost du bout du monde ont une visibilité suffisamment établie et des réservations accessibles par GDS, ce que le modèle économique interdit au départ. Faute de quoi, les acheteurs voyages vont devoir trouver des stratégies de réservation ou faire appel aux spécialistes des voyages complexes, les agences ! Mais à quels prix ?

Hélène Retout