Mais à quoi sert un hôtel ?

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A en croire les designers et les concepteurs de tout poil, il faut aujourd'hui redéfinir ce que doit être un hôtel a destination d'une clientèle d'affaires. Pas un mois, pas une semaine ne passe sans que s'étale à la une de la presse spécialisée de nouveaux concepts dont on perçoit mal l'intérêt ou la finalité. Dernier en date, "public" proposé par Ian Schrager, le créateur du Gramercy Parc à New York, ancien boss du groupe Hudson. L'idée de base surprend: il s'agit de "se séparer de tout ce qui est inutile pour le voyageur".

Des concepts hôteliers pour les voyageurs d'affaires, il y en a eu, il y en a et il y en aura encore. A la base, tous veulent permettre au client de se sentir à la fois chez lui et à la fois au bureau. Un grand écart difficile d'autant que les enquêtes le prouvent : l'hôtel doit faire oublier la pression du quotidien. La chambre doit être zen, mais pas trop, bien équipée et suffisamment confortable pour apporter le fameux repos attendu. Dans un premier temps, on a travaillé les couleurs. Elles se devaient d'être reposantes, douces et faciles à vivre. Sofitel a été l'un des premiers groupes à travailler le sujet pour éviter le morne et le triste. Vint ensuite la literie, jugée essentielle par une majorité de clients. Là aussi le groupe français avait pris de l'avance avec MyBed, une literie avant-gardiste avec un sous matelas et une couette sans équivalent. Aujourd'hui, cartes d'oreillers et autres gadgets sont venus compléter l'offre. Alors que faut-il penser de cette envie de repenser l'hôtel d'affaires ? Que faudra t-il réinventer et dans quel but ? A ces questions, les concepteurs restent silencieux. Et pour cause, la stratégie c'est le secret. Limiter les services aux essentiels attendus est complexe. Votre essentiel n'est pas le mien. Faciliter l'accès aux chambres n'est qu'une simple affaire de technologie. Repenser les espaces communs ? C'est un perpétuel recommencement depuis la création des hôtels de luxe. Boutiques hôtels, établissements urbains, d'aéroport voire même de zones industrielles, tout existe, à tous les prix... Sous toutes les marques.
Et le client dans tout cela ? A priori, les études de marché l'auraient mis au centre de ces nouvelles attentes. Mais l'interroger ne veut pas dire l'écouter. Quand on arrive tardivement dans sa chambre pour la quitter tôt le matin, les besoins sont différents de ceux qui resteront travailler une heure ou deux dans leur chambre. La réduction de la durée des déplacements professionnels conduit à minimiser les besoins hôteliers. Ramener l'hôtel à l'épure. A moins, au contraire, que tout ce mouvement ne serve qu'à justifier des tarifs plus élevés... ?

Marcel Lévy