Mais jusqu’où peut-on optimiser ses achats en matière de déplacements pros?

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A force de tirer et de négocier les prix, on se demande où s’arrêtera la course aux billets d’avions moins chers. La capacité d’acceptation des compagnies semble sans limite au moment même ou l’on apprend par les services du Commerce extérieur que nos relations économiques avec l’étranger continuent de baisser régulièrement. En clair, nous sommes moins bons à l’export que nos voisins.

C’est devenu un lieu commun d’écrire que le voyage d’affaires est un investissement. Je ne vous ferais pas l’injure de répéter qu’un dollar investi en voyage, c’est deux dollars de revenus supplémentaires. D’autant que cette affirmation n’a, à ce jour, aucun écho sérieux chez ceux qui sont en charge de mesurer l’activité économique mondiale. Et pourtant, même si nous sommes tous d’accord sur le besoin de se déplacer, certaines sociétés se demandent encore si le risque en vaut la chandelle! Mais elles doivent faire face à une certitude, nos marchés de proximité auront leurs limites. Il faut regarder loin, de plus en plus loin. De plus en plus cher !

Je ne suis pas spécialiste du Commerce international mais Christian de Boissieu, économiste célèbre, largement meilleur et plus informé que moi, évoquait un jour à l’EVP «L’indispensable gestion des dépenses, tout aussi importante que celle des recettes». Et à l’occasion d’un déjeuner privé, il rappelait «qu’apprendre à acheter n’était pas la même chose qu’apprendre à dépenser». Le transport aérien est l’exemple type où l’on a cherché en permanence à réduire de plus en plus les coûts. Premier acte face à la crise : déclasser tout le monde, la business vers la premium et l’éco. Deuxième geste fort : négocier l’éco comme si c’était une business. Au final, on a des politiques voyages insipides qui ne valorisent pas, pour le voyageur, l’envie de voyager.

L’exemplarité a été une bonne et une mauvaise chose. Bonne pour montrer, de la hiérarchie la plus élevée aux employés de base, que toute l’entreprise tirait dans le même sens. Mauvaise quand il fallait évidemment adapter la politique voyages en fonction de la durée du vol, du séjour voire de l’importance du contrat. La règle générale ne souffrant d’aucun compromis, on a décidé de l’appliquer à tout le monde ! Erreur fatale.

Aujourd’hui, on peut aller à Montréal pour moins de 400 €, à New York pour à peine plus et en Asie pour 700 € en moyenne. A l’évidence, c’est tentant de chercher à payer toujours moins. Une vision d’acheteur, pas de « dépenseur ». Là est la limite de l’exercice. A vision limitée, résultats médiocres. Et ce sont les compagnies aériennes qui, en raison de la concurrence, se sont engagées sur le terrain glissant du toujours plus bas. Soit elles sont suicidaires, soit elles nous mentent depuis des années en affirmant qu’elles ne gagnent pas d’argent. Pour ma part, je suis certain qu’elles disent vrai. Par contre, je sais qu’à force de payer peanuts, on verra encore quelques belles faillites du domaine. Et là, faute d’une concurrence solide, le prix de l’aérien explosera.

Autant le dire, acheter un peu plus cher et mieux aujourd’hui, c’est se garantir demain des prix raisonnables.

Pierre Barre