Nous avons testé La Compagnie sur le Paris/New York

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Comment voulez-vous rédiger le compte rendu d’un voyage avec un transporteur aérien dont le nom générique est La Compagnie. Complexe, comme le dialogue entre Villeret et Lhermitte dans le « diner de cons » à propos de Juste Leblanc: «C’est Juste son prénom». Idem, dans notre cas. Attendez-vous à ce que l’interlocuteur à qui vous expliquerez que vous êtes parti avec La Compagnie vous réponde, étonné : «Laquelle ?».

On ne peut pas dire que les premiers jours de la Compagnie se sont déroulés en douceur. Un retard à l’allumage et une montée en puissance un peu plus longue que prévue, voilà pour l’été 2014. «Heureusement, nous avons pu reprotéger tous nos clients sur les premiers vols annulés», précise Jean-Charles Périno, directeur commercial et marketing de La Compagnie. «Aujourd’hui, nous montons en puissance semaine après semaine. Nous améliorons chaque point du service et optimisons l’offre pour nous adapter aux demandes de nos clients». Ce sont entre 35 et 50 voyageurs par vol qui partent avec La Compagnie. Un taux d’occupation moyen de 46 à 54 %. Pas mal en deux mois de temps.

Des clients, des vrais? Oui et nous en avons rencontré pendant notre voyage. Ils viennent tous de l’ex Avion, devenu OpenSkies dans le groupe British Airways, déjà assuré commercialement par Jean-Charles Périno et créée en 2006 sur une idée de Frantz Yvelin et Marc Rochet. «Nous avions adoré l’Avion», explique une réalisatrice en voyage d’affaires avec son producteur de mari, «Dès que l’on a su que le même modèle revenait sur le marché, nous avons réservé nos places pour notre semaine new-yorkaise».

Quid d’OpenSkies ? Abandonné le tout business pour un retour à un vol tri classes, commercialement assuré sur internet par British Airways. Même les tarifs ne sont plus aussi attractifs. Difficile aujourd’hui d’expliquer l’abandon de l’offre «tout business» qui, même segmentée en BizBed et BizSeat, semblait prendre sa place sur la liaison Paris-New-York. Willy Walsh, le patron de BA a-t-il rejeté d’un revers de main ce qu’il avait adoré la veille ? C’est possible car l’homme n’est pas facile et ses sautes d’humeur sont réputées au sein de la compagnie anglaise. Dommage pour Patrick Malval en charge désormais d’OpenSkies en France et qui avait une vision moderne et réaliste de ce que pouvait devenir le produit.

La Compagnie reprend tous les codes de L’Avion à son lancement. Une classe business, une seule, riche de 74 sièges qui se transforment en un lit (pas réellement plat, incliné avec une cassure au niveau des genoux pour reposer les pieds), d’un service de repas traité par un grand chef et d’un système de divertissement est basé sur des tablettes Samsung. «Nous n’avons pas une offre pléthorique de films ou de séries», reconnait Jean-Charles Périno, «Pourquoi faire ? 80% de nos clients utilisent leur portable ou leurs propres écrans une fois à bord. Serrer les prix, c’est aussi prendre en compte les habitudes de nos clients». Cette étude poussée de la clientèle démontre que dans bien des cas le rapport qualité/simplicité/prix séduit. «Comme pour L’Avion, nous avons une clientèle issue du monde de la mode, de la pub et de la musique mais nous voyons arriver aujourd’hui des voyageurs d’affaires de grandes entreprises ». Voilà pour la base de l’offre. «Nous ne disons jamais que nous sommes la meilleure business au monde», explique Jean-Charles Perino, «Mais nous affirmons que nous sommes le meilleur rapport qualité/prix sur le créneau». Et de fait le pari est tenu avec un prix moyen de billet à 1350€ TTC l’aller-retour. Qui dit mieux sur la ligne ? Le test a révélé quelques manques que La Compagnie devrait très rapidement améliorer, et globalement les amoureux de l’Avion retrouvent là le produit d’origine.

Un départ de Roissy… Vers Newark

La Compagnie décolle de Roissy. Un choix qui ne plait pas à tous les voyageurs en route vers les USA, Orly étant un argument pour les entreprises du sud de l’île de France, mais force est de remarquer que le transporteur exploite au mieux CDG1, totalement rénové depuis quelques mois. Les parkings sont aisément accessibles et l’enregistrement dans le hall 2 se fait en six minutes maximum. D’autant que là encore, les clients habitués à voyager n’enregistrent que peu de bagages en soute. Le seul point noir reste le salon Icare de CDG1. ADP n’a jamais fait aucun effort pour l’améliorer. Heureusement, il y a encore des boissons et quelques grignotines pour faire passer le temps. «Voilà encore un exemple de la réalité des besoins», commente Jean-Charles Périno, «Nos clients arrivent à la dernière minute pour un vol qui décolle à 17h50. Ils peuvent ainsi travailler une bonne partie de la journée avant d’arriver à New York vers 20h30». C’est un fait, les derniers passagers déboulent à 17 heures. Du salon Icare à la porte d’embarquement, il y a quelques minutes de marche. La sécurité est loin d’être surchargée, les passagers de la Compagnie sont appelés au dernier moment.

La découverte de l’appareil, un 757 200, est une bonne surprise. Un fuselage bleu acier qui se termine sur un bleu nuit pour l’empennage. La compagnie joue sur le Co (de la COmpagnie) en signature sur les winglet et la queue de l’appareil. Une fois à bord, le premier regard est tout en douceur, l’éclairage à leds diffuse une lumière assez douce. Dommage qu’en vol il devienne plus agressif au moment de dormir, un point noir qui sera réglé ces prochains jours et que compense le masque contenu dans les trousses d’accueil. La découverte du siège se fait en deux temps. Le siège lui-même terminé d’un repose tête aux couleurs de l’appareil repose sur une moquette bleu nuit étoilée. Joli contraste. Le picth est généreux et l’environnement semble complet. Sur le siège, une couverture bleue (évidemment), un oreiller et un casque qui sera utilisé avec la tablette glissée dans des rails de maintien face à soi. Une bonne idée que d’avoir choisi la Samsung Galaxy Tab Pro 12,2 de 30 cm. Haute définition, elle est confortable à manipuler (pas trop lourde) et facile à orienter pour lire la presse déjà téléchargée.

Autour du siège coque, le concepteur a prévu un rangement pour les chaussures, un repose-pied pour les personnes de grande taille (je ne l’ai jamais atteint) et un rangement pour de petites bouteilles d’eau. Dans l’accoudoir, bien positionnés, une prise électrique universelle (US et européenne) et un connecteur USB pour son téléphone ou sa propre tablette. Voilà pour la cabine. Mais le spectacle est ailleurs. Dans l’uniforme des hôtesses par exemple composé d’une sorte de bermuda (une jupe culotte améliorée). La trousse de toilette est réduite à sa plus simple expression : chaussettes, masque pour la lumière, bouchons d’oreille et deux minuscules tubes de produit de fraicheur signés Caudalie dans une trousse en tissu enduit un peu «cheap». «Cette trousse ne nous satisfait pas non plus», reconnait Jean-Charles Périno qui devrait totalement la changer ces prochains mois. L’heure est au départ. Petit bonheur à bord, pas plus de 5 annonces sonores dans la demi-heure qui suit le décollage. Voilà qui fait du bien.

Une cabine agréable

Un vol aller réussi

Il faudra attendre 30 minutes avant de voir arriver l’apéritif. Rien que du très classique : petite pochette de biscuits salés accompagnée d’une boisson alcoolisé ou non. Le choix est limité mais le service se fait à volonté. Puis vient l’heure du repas. Le plateau reste à peaufiner. Le tartare de saumon, servi sur assiette, arrive en même temps que le fromage et le dessert. Dommage de laisser les couvercles en plastique transparent sur les assiettes, cela fait cantine. La Compagnie a bien noté ce point négatif du vol et devrait revoir sa procédure à bord d’ici à la fin du mois. Regrettable d’autant plus que l’ensemble se tient bien en bouche. Un remarquable Saint Emilion grand cru complète le tout.

La prise en main de la tablette ne déçoit pas. Deux séries et 9 films sont offerts aux voyageurs. Soyons franc, en remontant l‘allée centrale de l’appareil, très peu de voyageurs l’utilisaient, préférant leur PC ou leur mp3 à toute autre forme de distraction. A noter que malheureusement, la géolocalisation via wifi présentait des faiblesses. Impossible de suivre l’avancée du vol.

Il est l’heure de tester le siège en position nuit. Personnellement, mais je peux comprendre ceux qui contestent ma vision et préfèrent des lits totalement plats, l’inclinaison presque totale du buste et des jambes est très largement suffisant pour qui, comme moi, s’endort facilement en avion. Ni mal au dos, ni courbatures ne sont venus me titiller à l’arrivée. Trois heures de sommeil que les bouchons d’oreille de la trousse de toilettes ont facilité. Mais quand même, il faudra les choisir plus souples et mieux isolants. Le masque pour les yeux est de bonne qualité et s’adapte par velcro. A priori, je ne suis pas le seul à avoir profité de ce temps de sieste. Seuls quelques stakhanovitchs du travail ont passé le vol le nez sur leur ordinateur. C’est le point fort d’une classe affaires où chacun adapte le vol à ses besoins. Un snacking très « Haribo » est proposé pendant tous le vol. Des bonbons goûteux (fraises et autres gélatines) qui rappellent son enfance. Là aussi le clin d’œil plait.

Juste avant l’arrivée à NY, une collation, copieuse et goûteuse, est servie aux passagers. Quelques gâteaux, un café, de la charcuterie, des crevettes… De quoi se restaurer avant de quitter l’avion. Malheureusement la sécurisation du casque et de la tablette conduit le personnel à les récupérer dès l’annonce de la descente. Pour ceux en plein suivi d’un film, il faudra le terminer au retour. L’avion arrive avec ¾ d’heure d’avance à Newark et la sortie sur cet aéroport reste un bonheur. Entre l’arrivée dans la salle du contrôle de l’immigration et la sortie de l’aérogare, moins de 10 minutes suffisent.

Une restauration simple mais bonne

Un retour très court

Pour rejoindre l’aéroport, une navette, Newark Express, part du centre de Manhattan et met entre 35 et 45 minutes pour rejoindre la plateforme aéroportuaire. Une porte dédiée accueille les clients qui, là aussi, vont enregistrer très rapidement. Le salon business, celui d’El Al aujourd’hui (anciennement Virgin) est situé avant les contrôles de sûreté. Une duty free (il n’y en a pas à bord) et deux vendeurs de journaux et de souvenirs occupent le hall. Le lounge, totalement repensé, est désormais consacré à l’art. Des tableaux, reproductions et autres éléments de sculpture occupent un espace ponctué de fauteuils et de table. La restauration est nettement meilleure qu’au salon Icare. Petite parenthèse, le salon est ouvert à tous les voyageurs moyennant 35$. Bien évidemment, il est gratuit pour les passagers de La Compagnie. Si a priori tout est fait pour le confort du client, un process mal verrouillé nous fera quitter le salon une heure avant le décollage de l’avion. Nous patienterons alors dans le hall d’attente situé après la sûreté sans que personne ne nous donne les raisons de ces choix. Le retard sera de très courte durée : nous partirons à 22h05 au lieu de 21h45, mais c’est un délai qui se rattrape. «Ce sont ces dizaines de petits détails que nous voulons peaufiner avant de passer en quotidien dès novembre prochain», reconnait Jean-Charles Périno, agacé du contretemps.

Collation allégée, servie 45 minutes après le départ pour une durée de vol de moins de 7 heures au final. Petit plus au réveil, un excellent petit déjeuner servi, à la demande, avec un expresso. Les européens apprécieront le détail. Bien vue, l’assiette de fruits frais et l’omelette/bacon plutôt réussie. L’arrivée à Paris prévue à 11h15 se fera finalement à 10h45. Retard rattrapé donc, grâce à des vents favorables.

À une époque où le best buy est sur toutes les lèvres, la Compagnie arrive à point nommé. Le rapport qualité/prix est imbattable. Le sentiment d’être dans une vraie business s’impose. Certes, le voyageur n’est pas sur Emirates ou Air France... Mais faire un autre choix sur New York serait une faute professionnelle pour un acheteur qui marie avec la Compagnie sa politique voyage et la satisfaction voyageur.

Marcel Lévy
Pratique

Le test a été réalisé du mercredi 10 septembre (départ 17h50) au vendredi 12 septembre (vol retour à 21h45 de Newark).

Tarif La Compagnie : 1199,33 € A/R en best buy (non modifiable, non échangeable) – Taxes comprises. 3033,33 € en fullflex (modifiable et échangeable à volonté – non remboursable si no show).

Tarif Openskies : pas de best buy proposé sur le site en vols directs. Des offres « prix le plus bas » via Londres. Full Flex à 4033,44 €. Pas de miles sur ces vols. Openskies propose des tarifs "best buy" via Londres.

Les billets A/R entre Paris et NY de ce test ont été offerts par La Compagnie.

Pour joindre directement Jean Charles Périno : +33 7 85 64 86 54
 

La réservation Openskies (fullflex - meilleur prix offert en vol direct - pas d'offre bestbuy en vol direct)