Peut-on s’affranchir de l’immatriculation pour la vente ou le conseil de voyages ?

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C'est une question importante posée dans le monde du MICE : faut-il une licence d'agence de voyages pour l'organisation d'un événement ? Oui, disent les agences qui mettent en avant la sécurité de leurs clients. Non, répondent les consultants qui affirment qu'en aucun cas ils n'achètent pour tiers. Une réponse qui ne satisfait pas l'ANAE comme l'explique son Président, Michel Bensadoun.


Qu'en est il de la réglementation ?

Peut-on s’affranchir de l’immatriculation pour la vente ou le conseil de voyages ?
Un certain nombre d'acteurs s'affranchissent de la réglementation française en terme de vente de voyages, ce qui déclenche chez les professionnels régulièrement et depuis des années des réactions vives.

En France, contrairement à d'autres pays européens, la vente de voyage est réglementée. Il faut bien comprendre que cette réglementation est une volonté avant tout destinée à la protection du consommateur. Le passage de la Licence de voyage à l'immatriculation a été l'occasion de moderniser cette réglementation, mais tout en gardant l'esprit de la loi : la protection du consommateur. La nouvelle immatriculation, a introduit un assouplissement des modalités d'obtention, en contrepartie, le gouvernement s'était engagée à faire davantage respecter la loi. Pour avoir fait parti de la commission qui a travaillé sur le passage de la licence à l'immatriculation, je peux vous assurer que la vraie volonté a bien été de protéger les consommateurs. Fallait il abolir totalement cette loi, et laisser à chacun la liberté de vendre des prestations de voyages ? Peut être cela aurait eu le bénéfice de la clarté et de l’égalité pour tous, mais ce n’est pas le choix qui a été fait !

Cette loi est certes contraignante, mais elle existe. Pourquoi certains veulent aujourd'hui s'en exonérer ? ou pensent ils ne pas être concernés ?

Il y a plusieurs cas de figure, ceux qui tout simplement de bonne foi (on veut le croire), ignorent la loi, et ceux qui font une interprétation de la loi, à leur avantage.

Consultant, pas agent de voyage…

L'immatriculation est indispensable, dès lors que sont vendus des prestations de voyage, ou que des personnes servent d'intermédiaires, et perçoivent une rémunération pour cela.
C'est bien le dernier point qui est souvent au cœur des débats. Un consultant qui va organiser un voyage pour un client, qui va percevoir des honoraires pour ses conseils, mais qui fera facturer le voyage directement par une agence en règle, doit il avoir une immatriculation ?
Pour ces consultants la réponse est non, pour la profession et ses représentants, la réponse est bien entendu oui.

Le comportement de ces consultants posent plusieurs problèmes :
- Le problème de la concurrence déloyale, en effet l'immatriculation représente un cout pour l'entreprise en règle, en terme de garantie financière. Les consultants s'en exonèrent totalement. Au total, une agence va également jouer le même rôle de conseil, que le consultant, mais n'aura pas les même couts.
- Le problème de la responsabilité : en effet si un accident ou incident se produit suite aux recommandations de ce consultant, qui dit que le client final n'appellera pas en garantie ce consultant ? pour les professionnels du voyage, et les compagnies d'assurances, il est clair que sa responsabilité est engagée.
- Aujourd’hui la plupart des entreprises sont très regardantes sur les garanties et la sécurité. Cette démarche, largement inspirées des process qualité est normale. En cas de problème, l’ensemble des points sera audité, et le non respect d’une loi est un manquement grave. La plupart de nos contrats nous obligent aujourd’hui à disposer de toutes les habilitations pour mener à bien notre mission.

L’immatriculation est un pré requis évident. Qui aurait envie dans une entreprise de prendre le risque juridique de travailler avec un consultant dont le statut est plus que polémique ? Je ne suis pas certain que les services juridiques soient actuellement totalement informés de ce type de pratique et les risques encourus. Aujourd'hui la nature des contrats que nous signons, les audits auxquels nous sommes soumis par la plupart de nos clients, n'iront pas à l'avenir, vers ce type de prise de risques.

Il ne faut pas oublier qu’un consultant fait le même métier qu’une agence conseil, il est normal qu’il respecte les mêmes contraintes.

La position des agences de voyages événementiels, et de meetings

En tant qu’agences conseils immatriculées, nous trouvons anormal que tous les acteurs ne jouent pas avec les mêmes règles, et nous soutenons l’action du SNAV pour remettre de l’ordre.
En tant qu’agences travaillant essentiellement en BtoB, nous sommes moins impactés, car les risques qu’un particulier peut prendre, une entreprise cliente, hésitera à les prendre si elle est informée.

Ce qui nous paraît plus gênant, c’est de la part de certains consultants un dénigrement de la loi, et de ceux qui la respecte.

Cette loi, nous ne l’avons pas particulièrement voulu, mais à partir du moment ou elle existe, il paraît normal que chacun joue le jeu et la respecte.

Un certain nombre d’acteurs, agence de voyages, atypiques, de consultants l’ont compris et se sont mis en règle, je pense que leur business ne peut que profiter de cette mise en conformité.
Il est regrettable, que les différents gouvernements n’ai jamais eu à cœur de faire respecter la législation, il serait temps que l’on fasse soit respecter la loi, soit qu’on la supprime !

A propos de l'auteur

Michel BENSADOUN est le Directeur associé de La Fonderie
Il est également Président de l’ANAé (association des agences de communication évènementielle).