Pilotes d’AF, les autres compagnies vous remercient!

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Depuis lundi, les voyageurs d’affaires qui avaient prévu de prendre le transporteur français se ruent sur les autres compagnies. Pas de chance pour Lufthansa, ce mardi leurs pilotes sont également en grève. Mais British, Iberia… et les low-cost font leur beurre pendant qu’Air France voit fondre le sien.

La SNCF a positionné des trains en plus, EasyJet a développé ses vols sur Nice et Toulouse notamment, la grève des uns fait le bonheur des autres. Mais il y a aussi les effets rebonds, le cas des compagnies qui, en code-share avec Air France, voient leurs propres liaisons en panne. A elles de trouver des avions pour assurer les liaisons et dépanner leurs clients, sinon il leur faut les reprotéger chez leurs concurrents!

Tout cela n'arrange guère les affaires des voyageurs d'affaires, un mois où ils sont beaucoup dehors. C’est une vision qui revient à chaque grève : «Et si on fermait définitivement Air France pour recréer une nouvelle compagnie, sans corporatisme ni avantages démesurés ?». Une idée sans fondement qui ne réglerait nullement les difficultés que rencontre la compagnie française. Mais de fait, là où les pilotes se trompent, c’est qu’Air France ne saurait vivre longtemps sans résoudre ses problèmes de court et moyen courrier et sans trouver une réponse low cost à la concurrence du même nom. Aujourd’hui et après l’application du plan Transform qui a permis de réduire les coûts, le moindre grain de sable pénalise le développement et met en péril l’entreprise. En interne, le corporatisme des navigants fait grincer des dents. «Ce que l’on donnera aux pilotes, on le prendra au reste des salariés», tonne un syndicaliste CGT qui reconnaît pourtant que son syndicat est bien incapable de se faire entendre des «Seigneurs de l’air».

Mais au-delà des discussions sur le futur, c’est la gestion passée de la compagnie qui remonte à la surface. Le « toujours plus » des années Spinetta se paye aujourd’hui. On ne peut acheter la paix sociale sans en payer le prix, un jour ou l’autre. Et depuis des années, comme une horloge, à chaque rentrée chaque catégorie de personnel remonte au créneau que ce soit pour les salaires ou les conditions de travail. La spirale est sans fin.

Côté pilotes, chez AF on aurait du mal à pleurer sur leur sort. Un pilote d’Emirates vole 20 % de plus que ceux du transporteur français. C’est énorme. Et pas question d’évoquer la sécurité : Emirates n’a jamais connu d’accidents graves. On ne peut pas en dire autant d’AF. Bref, cette grève n’a pas d’autres ambitions que de peser sur le dialogue social entre la compagnie et ses pilotes.

Sur le fond, les revendications sont peu inaudibles et sur le terrain, les conséquences démesurées de cette action se feront sentir longtemps. Comme me le disait un acheteur voyages à Univ’AirPlus : «Voilà 5 ans que je ne pars plus en Asie avec Air France. Non pas qu’ils soient mauvais, mais pour avoir la certitude que mes voyageurs partiront à l’heure et sans souci imprévu». Tout est dit.

Hélène Retout