Qatar, le jeu ambigu de l’argent et de la religion

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En quelques mois, le Qatar est devenu un acteur qui compte dans le monde économique français. Prise de participation de 2% chez Total qui le place au rang de troisième investisseur du groupe pétrolier, 2% toujours chez Vivendi, plus de 10 % du capital chez Lagardère… On remarquera que l’énergie et les carburants sont des domaines qui attirent les qatariens. Le foot aussi, mais comme disait César dans «La guerre des Gaules» : «Amuser les foules, c’est gouverner».

Il n’y a rien d’étonnant à ce que des fonds d’investissement regardent avec attention l’économie d’un pays pour investir dans les entreprises qui obtiennent de bons résultats. Le Qatar a déjà investi dans la banque Barclay, le grand magasin Harrods ou chez les constructeurs automobiles allemands comme Porsche et Volkswagen. Les observateurs avertis signaleront que l’Émirat n’a pas annoncé, comme certains de ses concurrents, de prises de participation ou de rapprochements économiques avec d’autres compagnies aériennes. Qatar Airways aurait pourtant les moyens de faire son marché dans cet univers… Elle s’abstient. Pourquoi ? Sans doute en raison de la très faible rentabilité (doux euphémisme) voire des pertes engagées dans ce domaine industriel. Pourtant à l’ITB, le Qatar n’a pas caché que «Se développer par d’éventuelles acquisitions externes n’était pas un si mauvaise idée». Pour le directeur général de la compagnie, Akbar Al Baker «Il y a des compagnies aériennes qui offriraient de réelles opportunités». Attendons. Il reste que si l’argent n’a pas d’odeur et ne prie pas, beaucoup de politologues se demandent aujourd’hui si la stratégie du Qatar ne dépasse pas la simple vision financière. Accusé de soutenir des groupes islamistes durs, le pays est désormais montré du doigt par beaucoup de gouvernements qui, eux aussi, ne veulent pas indirectement laisser la porte ouverte à des débordements religieux. Une guerre souterraine qui explique, peut-être, les prises de participation du pays dans des entreprises de communication. De quoi réveiller le scepticisme des opposants à cette arrivée massive d’argent en provenance du Qatar.

Marc Dandreau