Quelles relations entre les voyageurs d’affaires et les acheteurs voyages ? Baromètre Mondial Assistance & DeplacementsPros

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Comme au début de chaque année, Mondial Assistance et DéplacementsPros.com prennent la température de l’année écoulée. Pour 2011, ce sont les relations entre les voyageurs d’affaires et les acheteurs qui passent ainsi au crible de notre expert, Alain Joyet, avec un questionnaire adressé aux Travel Managers et acheteurs voyages.

<img id="img-3927656-5923627" src="https://www.deplacementspros.com/photo/art/default/3927656-5923627.jpg?v=1330536565" alt="Quelles relations entre les voyageurs d'affaires et les acheteurs voyages ?
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Premier constat, leur métier et sa dimension sociale dans l'entreprise sont peu connus, pour ne pas dire très peu valorisés auprès des voyageurs. Autre remarque, l’absence fréquente d’expérience sur le terrain dans le voyage professionnel rend nos acheteurs peu crédibles aux yeux de celles et ceux qui se déplacent pour l’entreprise. C’est le grand écart entre la connaissance technique et le savoir sur place. Une opposition entre l’acheteur et le voyageur ! Enfin, la sécurité reste un point fort même si le voyageur semble peu au fait de ses droits et de ses devoirs.

En 2011, diriez-vous que, par rapport à votre mission d’acheteur :

  • Les voyageurs sont conscients de votre travail : 13 %
  • Les voyageurs l'ignorent : 59 %
  • Les voyageurs n'y accordent aucune importance : 28%
Alain Joyet : Il est évident que le métier d’acheteur voyage ou de travel manager est peu reconnu et peu valorisé dans l’esprit des utilisateurs. C’est un rouage comme un autre de l’entreprise. La mise en place de politiques voyages restrictives a fait que le responsable des achats voyage est souvent perçu comme un frein supplémentaire à la qualité du déplacement. Il n’y a rien d’étonnant à ce que la fonction soit minimisée par les voyageurs, qui restent souvent persuadés que leur TM n’est là que pour appliquer les décisions de la direction générale ou des services financiers. Visiblement, il y a du travail à faire pour revaloriser la fonction.

Dans votre entreprise, vos voyageurs ont, en moyenne :

  • Moins de 30 ans : 20 %
  • De 30 à 45 ans : 46 %
  • Plus de 45 ans : 34 %
Alain Joyet : A quelques chiffres près, nous sommes dans le profil moyen de l’emploi dressé par l’Insee. On constate que le découpage des générations est encore assez marqué avec une forte présence de quadra et une population de quinqua qui diminue. Les nouvelles générations « biberonnées » au net et aux sites de voyages pas chers sont des voyageurs différents pour ne pas dire atypiques, qui acceptent la contrainte sans trop rechigner.

Dans votre entreprise, la génération Y (moins de 30 ans) :

  • Est plus facile à gérer que les autres : 46 %
  • Est aussi complexe à gérer que les autres : 40 %
  • Est plus complexe à gérer que les autres : 14 %
Alain Joyet : On le dit, on le répète, cette génération Y va bousculer le voyage d’affaires. Elle commence à le faire dans l’instantanéité des décisions, la gestion du numérique et l’optimisation des moyens accordés par l’entreprise. À terme, on peut se demander si elle ne viendra pas bousculer la fonction de TM, par sa vision technologique avancée et le besoin d’aller vite dans la mise en place du déplacement voire même son exécution. Rompue à l’internet et à la recherche d’information, elle veut partager sur les réseaux sociaux et se nourrit de l'expérience des autres. Autant de points qui sont très peu pris en compte par les acheteurs « voyages ».

Avez-vous, vous-même, voyagé professionnellement en 2011 :

  • Jamais : 23 %
  • Au moins une fois : 49 %
  • De 2 à 4 fois : 21 %
  • Plus de 4 fois : 7%
Alain Joyet : Le premier chiffre est effarant : 23 % de ceux qui font voyager leur entreprise ne sont pas partis en déplacement professionnel en 2011 ! Au-delà de la surprise, on se demande si cette non reconnaissance de la fonction n’est pas liée à l’absence totale de connaissance du terrain. Une bonne négociation dans un bureau, mais pas de vision au-delà. Si la moitié de notre panel a fait au moins un voyage en 2011, on constate que seuls 28 % ont voyagé plus de deux fois en 2011. Des chiffres encore assez bas au regard de ce que font nos voisins proches, comme les Allemands ou les Anglais pour qui « aller sur le terrain » est une composante tout aussi importante que la fonction achat. A l’évidence, si nos sondés voyagent à titre privé (ce qu’ils font sûrement), on pourrait se dire qu’ils possèdent une vision transversale du déplacement. Mais peut-on comparer un départ en vacances au stress d’un voyage international sur deux jours ?

Personnellement, au quotidien, vous regrettez :

  • De ne pas pouvoir voyager : 68 %
  • De ne pas pouvoir décider seul des engagements à prendre : 61 %
  • De ne pas avoir une écoute plus forte dans l'entreprise : 74%
  • De ne pas être intégré aux décisions stratégiques de développement : 56 %
  • De ne pas avoir de missions clairement identifiées : 29 %
(Réponses multiples possibles)

Alain Joyet : Il y a des reproches dans les résultats à cette question. Si le besoin de reconnaissance se confirme, on constate que ce sont les points qui permettraient de faire évoluer la fonction et les résultats qui sont le plus souvent montrés du doigt. L’absence d’écoute comme la prise d’engagements sont les deux éléments clés de la gestion du voyage. Pour bon nombre des personnes sollicitées, il apparaît clairement que ce sont des points qu’ils ne maîtrisent pas directement. Rattachés aux RH ou à la direction financière, nos spécialistes du voyage ne sont que des éléments d’enrichissement des décisions qui seront prises, sans pour autant participer à la construction économique de la fonction. Sans doute un élément et une vision à préciser de la part des dirigeants d’entreprise pour qui cette fonction « voyages » reste peu claire.

Selon vous, quels sont les points qui pénalisent le plus vos voyageurs d'affaires :

  • L’impossibilité de fixer à l'avance les dates de départ et de retour : 44 %
  • Les voyages d'une journée : 68 %
  • Le fait d'avancer les dépenses professionnelles engagées : 17 %
  • Le temps perdu dans les aéroports : 68 %
  • L’impossibilité de choisir les horaires de mon voyage : 55 %
  • L’absence d'infrastructures de qualité dans les aéroports : 36 %
  • Le choix de l'hôtel fait par l'entreprise : 43 %
  • Le manque d'informations concrètes sur leurs voyages : 6 %
(Réponses multiples possibles)

Alain Joyet : Ces chiffres confirment ceux du baromètre mensuel en donnant une vision panoramique des contraintes qui pèsent sur les voyageurs d’affaires. Au-delà de la simple notion qualitative du voyage, ce sont les décisions stratégiques de l’entreprise - et le lot d’économies à réaliser qui les accompagne - qui semblent difficiles à faire accepter aux voyageurs, persuadés que l’acheteur « voyages » est un maillon de la direction opposé à toutes évolutions qualitatives du voyage d’affaires. Il reste que la contrainte est une composante naturelle de l’entreprise où se plier à des règles établies garantit la bonne marche d’un ensemble. Il est donc évident que ce n’est que par la communication acheteur/voyageur que peut se mettre en place une bonne perception du pourquoi de la politique voyage et de son respect. On le voit de plus en plus, dans le cadre d’une crise économique comme celle qui plane, associer et expliquer à l’ensemble des personnes concernées les choix qui sont faits permet une cohérence forte et une adoption naturelle des règles imposées bien supérieure à la moyenne.

Vous considérez-vous comme :

  • Bien formé à votre métier : 41 %
  • Assez bien formé mais sans formation continue : 36 %
  • Mal formé et en attente de formation : 23 %
Alain Joyet : Se former à quoi ? C’est sans doute la question que nous aurions dû poser. Car la formation est complexe dans un univers où les fonctions, même si elles portent le même nom, sont si différentes d’une entreprise à une autre. Sans doute faut-il oublier ces formations globales qui dispensent un savoir théorique global au bénéfice de modules plus pointus, évolutifs en fonction du marché et des tendances constatées sur le terrain. Se former, voilà l’enjeu de ces prochaines années. Une multitude de petites formations pour une multitude de sujets adaptés aux attentes de chacun.

En matière de sécurité, trouvez-vous que votre entreprise :

  • En fait trop : 28 %
  • Est dans la bonne moyenne attendue par les voyageurs : 61 %
  • N’en fait pas assez : 11 %
Alain Joyet : Il est clair que la sécurité est essentielle… Mais pour qui ? Pour la responsabilité de l’entreprise et le bien-être de l’acheteur ou pour le voyageur ? A l’évidence, le sujet est déjà largement abordé même si le principe de précaution, poussé à l’extrême, fait dire à 28 % d’entre vous que l’entreprise en fait trop. Est-ce un reproche ou une lassitude ? Difficile de lire entre les lignes.

En matrière de sécurité, vos voyageurs vous interrogent-ils le plus souvent :

  • Sur les protections dont ils disposent en voyage : 53 %
  • Sur leur contrat d'assistance : 41 %
  • Sur le protocole de crise mis en place dans l'entreprise : 6%
Alain Joyet : On constate ici aussi le poids du voyageur sur les besoins formulés auprès de l’acheteur voyages. Les risques en voyage, présents aujourd’hui dans l’esprit des voyageurs, sont devenus des sujets à part entière. Les questions sur cette thématique se font pressantes. Notons que la notion de crise fait son apparition en 2011. Les effets volcans et Japon sont autant de points qui doivent conduire à des protocoles de crises capables de rassurer le voyageur. Là aussi, la communication est essentielle à la perception des efforts engagés par l’entreprise.

Parmi ces compagnies, laquelle a la préférence de vos voyageurs :

(Réponses multiples possibles)

• Air France : 59 %
• Lufthansa: 32 %
• British Airways: 31 %
• Singapore Airlines : 16 %
• Easyjet : 15 %
• Ryanair : 6%
• Autres : 32 %

Alain Joyet : On retrouve ici les chiffres traditionnels du transport aérien pour les voyageurs d’affaires. La compagnie privée « nationale » (celle qui opère sur son territoire) fait le plein car elle offre des vols directs en règle générale très appréciés par ceux qui se déplacent. Il est surprenant de retrouver EasyJet à un tel niveau de satisfaction alors que sur le même créneau de la low cost, Ryanair ne fait absolument pas le plein. On remarquera que British comme Lufthansa, qui sont de vraies alternatives au départ de la province, tirent fièrement leur épingle du jeu. Ce qui est intéressant à souligner, c’est que poids des miles, pour Air France et les autres membres d’alliances, doit jouer un rôle assez décisif dans le choix d’une compagnie aérienne. Il suffit de voir la part des alliances dans le classement exprimé pour le comprendre. Enfin, en glissant une compagnie réputée comme Singapore Airlines, on se rend compte que le poids du réseau joue à fond. Pour cette ville/pays, hub de l’Asie, le poids de la qualité devient un vrai critère de choix.

Globalement, en regardant les premières semaines de 2012, vous êtes :

  • Pessimiste par rapport à 2011 : 49 %
  • Dans le même état d'esprit qu'en 2011 : 38 %
  • Plus optimiste qu'en 2011 : 13 %
Alain Joyet : Voilà la confirmation du poids de la crise sur le moral des entreprises. Pour autant, on peut s’étonner du relatif bon état d’esprit des acheteurs. 38 % se disent dans le même état d’esprit qu’en 2011 qui, globalement, n’aura pas été une année catastrophique pour le voyage d’affaires. Il est également difficile de faire la part des choses entre le poids de l’économie et la période électorale qui s’annonce. Avec les législatives qui vont suivre les présidentielles, on risque d’assister à un long tunnel d’attentisme, ce qui n’est pas bon pour les affaires. Enfin, la hausse du chômage, la crise de l’euro, les incertitudes à long terme sur l’économie chinoise font réfléchir les dirigeants persuadés qu’il a mieux à faire que voyager.