SNCF : il faut maintenant savoir sortir de la crise

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Quoi qu'on en pense, et quelle que soit sa position dans cette affaire, il faut désormais trouver une issue au conflit qui oppose la SNCF à ses voyageurs. Il ne se passe plus un jour sans qu'une nouvelle contestation ne remonte des régions. Hier, jeudi 3 février, ce sont même des hommes politiques régionaux qui sont montés au créneau pour dénoncer des retards ou des annulations de trains.

On peut facilement comprendre le ras-le-bol que vivent les utilisateurs qui ont fait le choix de s'installer en province et de travailler dans la capitale. A eux également de comprendre que l'univers des transports n'est pas une bande dessinée à la "oui-oui" où tout serait rose dans le meilleur des mondes. Il y a, là aussi, des aléas qu'il faut prendre en compte dans le choix de la délocalisation que l'on a fait. Cela ne veut pas dire qu'il faut absoudre totalement la SNCF de ses responsabilités. Bien au contraire. Il y a eu, et il y a, dans les choix politiques qui ont été faits par l'État et le directeur de cette grosse entreprise nationale des erreurs tragiques que ce soit au niveau du personnel ou du développement des infrastructures.
La guéguerre que se livrent Réseau Ferré de France et la SNCF est un exemple du dialogue impossible qui s'est instauré entre deux grandes administrations. Il pourrait y avoir une façon radicale de régler le problème : virer Guillaume Pépy et s'en servir de bouc émissaire pour les prochains mois. Honnêtement, ce serait facile et surtout inutile. L'homme est futé, malin et, qui plus est, intelligent. Il fait avec ce qu'il a, même si parfois il a peu. Il faut donc désormais dialoguer, se concerter, échanger, et accepter que les changements demandent du temps. Car c'est l'une des composantes essentielles de ce conflit. Il faut lentement mais sûrement déterminer les points de blocage et les éradiquer comme, pardonnez-moi cette comparaison radicale, on le ferait d'un nid de cafard dans une cuisine. Il faut préserver les hommes, les structures et bien évidemment, faire en sorte que la cuisine, pardon les trains, continue à fonctionner pendant que l'on applique le traitement.
A chacun donc de comprendre cette situation et de faire le pas vers l'autre, indispensable tant à la réconciliation qu'à l'évolution des offres et des services. En France, chacun d'entre nous est un directeur en puissance de la SNCF. Nous sommes tous des "y'a qu'à" et des "faut qu'on". Et sans doute, avons-nous du bon sens dans nos réflexions. Mais comme pour les Légos, la brique du dessus tient la brique du dessous qui elle-même cache celles des niveaux inférieurs. On ne peut bouger l'édifice sans risquer de prendre sur la tête ce qui fonctionne plutôt pas mal.

Voilà donc la situation. Je vous l'avoue, je n'ai pas plus de solution que vous. Je ne crois pas que la réponse soit radicalement chez les syndicats ou à la direction. Je pense qu'elle est dans l'échange que les utilisateurs et les cheminots auront entre eux pour comprendre les dysfonctionnements et améliorer la situation. On peut toujours faire des grèves, manifester devant des gares, refuser de payer… Et après ? Construire demande de l'humilité surtout lorsque la colère est passée. Cela ne veut pas dire que l'on a oublié, mais que l'on est tout simplement prêt à construire l'avenir.

Marcel Lévy