Seules 30 minutes de téléphone par jour sont autorisées

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Personne ne sait vraiment comment les appeler. Des «no phones», des «free phones», des «sans contact»… Bref, une nouvelle génération d’hommes d’affaires fait son apparition sur le marché. Ils se sont libérés des contraintes numériques, se bornant à répondre au téléphone portable deux fois par jour : 15 minutes le matin et 15 minutes le soir. Le reste du temps, c’est eux qui téléphoneront, en cas de besoin.

Finies les contraintes et le harcèlement permanent qu’impose un téléphone portable. Voilà résumé le sentiment de pas mal de jeunes cadres, souvent responsables de services ou de PME/PMI et soucieux de consacrer du temps à la stratégie plutôt qu’à l’actualité permanente de leurs collaborateurs. «On nous téléphone pour se protéger», constate Michel T, cadre supérieur dans une société spécialisée dans la menuiserie industrielle «C'est une façon de sauver ses fesses en cas de problème. Plus personne n’assume ses responsabilités et ne montre un esprit d’initiative». Le cas est loin d’être isolé. Si les opérateurs sont loin de ressentir ce type de clientèle dans les nouveaux entrants, ils ne se disent pas surpris par cette vision. Dans certaines boutiques SFR, le mode «vibreur» est souvent le premier à être mis en route lors de l’achat d’un téléphone. «Nous sommes dans une société qui adopte massivement les outils avant de les rejeter», explique Alain Joyet, sociologue d’entreprise «On a connu ce phénomène avec la télé. Aujourd’hui on veut que le numérique et la communication ne gèrent que l’essentiel. Cela risque d’ici dix ans de modifier profondément les relations dans l’entreprise». Pour beaucoup, maitriser ne veut pas dire tout supprimer. C’est l’utilisation même qui est normalisée. En offrant deux accès à l’instantanéité téléphonique, nos nouveaux dirigeants veulent rester accessible mais de façon claire, transparente et précise. Et en cas d’urgence ? «Nous avons des codes précis et sommes joignables dans les 30 secondes, mais comme c'est une procédure d'urgence, identifiée comme telle, les collaborateurs y réfléchissent à deux fois», explique Michel T. Comment ? Avec deux téléphones et un accès ultra réservé. Un peu comme les politiques.

Marc Dandreau