Singapore Airlines : « Nous devons être la compagnie qui offre la meilleure expérience globale »

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Même si la "star" des compagnies asiatiques reconnait que l'année qui vient de se terminer aura été difficile, le staff parisien de Singapore Airlines avoue avoir été un peu bousculé par la crise économique de 2009 mais souligne qu'au final, les résultats 2011 seront bons : un chiffre d'affaires en hausse de 3% pour un peu moins de 100 000 voyageurs transportés sur les 260 000 qui se rendent annuellement à Singapour.

Côté chiffres, SIA reste toujours leader de la destination en nombre de passagers mais souhaite aujourd'hui que les voyageurs regardent au delà de Singapour car le hub qui se met en place vers l'ensemble des destinations asiatiques est devenu une plaque tournante du voyage d'affaires dans la région. Pour Andrew Yip, le patron français de Singapore Airlines, "Il faut penser que chaque vol sur la compagnie Singapourienne est une expérience globale qui repose sur un ensemble de services offert aux voyageurs". Il se refuse naturellement à entrer dans le jeu du "best price" et dans cette course aux promotions permanentes. Il regarde même d'un œil amusé l'arrivée des frais ancillaires dans certaines compagnies. Rencontre avec un francophile au fait de son marché et atypique dans sa vision à moyen et long terme du transport aérien vers l'Asie.

DéplacementsPros.com : Comment analysez vous l'année qui se termine ?

Andrew Yip : Chaque année il se passe quelque chose qui vient perturber le transport aérien, que ce soit un volcan, la neige, ou même des grèves. 2011 est incontestablement l'année du changement dans le monde. La crise économique naissante bouscule les habitudes de nos clients et nous oblige à nous adapter à leur demande. Je dirais qu'en 2011, nous avons eu la chance d'avoir toujours cet effet A380 qui reste un appareil très demandé et très apprécié par les voyageurs, même s'il n'est plus le seul en circulation. L'équipement de notre business class est reconnu comme étant l'un des meilleurs au monde. Je dis souvent qu'au-delà des simples faits économiques, il faut bien regarder ce qu'offre la compagnie. Pour Singapore Airlines, notre leitmotive réside dans cette expérience globale que nous offrons à nos voyageurs, quelle que soit la classe dans laquelle ils voyagent. Il y a un réel engouement du public pour notre compagnie. Enfin, je dirais que nous sommes portés par le développement des voyages à Singapour qui connaît tous les ans une hausse de 8 à 10 %.
Au-delà des chiffres, nous insistons beaucoup pour dire que nous sommes la compagnie naturellement ouverte vers le reste de l'Asie car Singapour n'est pas systématiquement une destination finale mais un point de départ vers d'autres destinations. Nous ouvrons la Birmanie, la Thaïlande du Sud, les Philippines, le Cambodge et le Vietnam qui sont autant de pays desservis quotidiennement par la compagnie.

DéplacementsPros.com : Quelles sont vos craintes pour 2012 ?

Andrew Yip : A l'image de nombreuses compagnies dans le monde, la mise en place des taxes carbone en Europe est pour nous source d'inquiétude car elle va augmenter nos coûts d'exploitation. On peut regretter une telle décision qui pénalise les compagnies qui volent le plus loin. Au-delà de ce constat, nous n'avons pas de craintes particulières car notre but est de poursuivre l'optimisation des déplacements d'affaires en Asie et de nous adapter aux besoins de notre clientèle française. Nous sommes, de fait, très impliqués dans les partenariats économiques qui se nouent entre la France et l'Asie comme par exemple avec la société Bouygues qui a en charge la construction du stade de Singapour. Comme je le disais, 60 % des passagers vont au-delà de Singapour sur des destinations non desservies par la compagnie qui porte le pavillon français. Cela veut dire que nous devons répondre, au maximum, aux besoins de nos clients, qu'ils soient avec des contrats "corporate" ou non, pour rester compétitifs et réactifs. Deux qualités qui nous semblent nécessaires dans le transport aérien.

DéplacementsPros.com : On parle beaucoup de l'arrivée des nouvelles technologies à bord, qu'en est-il pour Singapour Airlines ?

Andrew Yip : Avant de répondre à votre question, je voudrais vous rappeler que nous avons été parmi les premiers à faire des études auprès de nos voyageurs pour connaître leur sentiment sur l'arrivée de l'Internet ou du téléphone à bord des avions. Contrairement à ce que l'on peut penser, ils sont très nombreux à considérer que cette innovation n'est pas forcément une bonne chose. Beaucoup nous disent : "Lorsque nous montons à bord de l'un de vos appareils, nous sommes certains de ne pas être dérangés, d'être au calme, de pouvoir travailler ou de nous reposer". Pour autant, et depuis le mois de janvier 2012, nous équipons nos avions - au fur et à mesure des visites techniques qui sont programmées - d'une connexion internet qui sera disponible dans toutes les classes. Nous allons également, mais progressivement, implanter Internet à bord de nos A 380. On ne sait pas encore quel sera le montant du supplément éventuellement appliqué pour accéder à ce service. On se demande toujours, et ce afin de respecter ce que nous disent nos clients, si nous aurons l'accès téléphonique à bord de nos appareils. Quand je dis que nous sommes une compagnie d'expérience globale, il faut bien le traduire par "une compagnie proche des attentes de celles et ceux qui choisissent de voyager avec nous". Ce n'est pas une phrase toute faite mais la réalité d'une vision qui existe depuis la création de Singapore Airlines. Un exemple : nous allons installer sur le pont supérieur de l'A380 une classe exclusivement business. Avec 86 sièges en business, 311 en classe économique et 12 suites, nous restons l'une des compagnies dont la densité à bord de cet avion est la plus faible. C'est la concrétisation de notre volonté d'apporter un réel bien être à nos clients... même dans les classes économiques.

DéplacementsPros.com : Qu'en est-il de votre projet d'augmenter vos fréquences au départ de Paris ?

Andrew Yip : Nous n'avons pas abandonné l'idée d'avoir une fréquence biquotidienne entre Paris et Singapour d'autant que nous avons les droits de trafic pour assurer ces nouvelles liaisons. Encore faut-il avoir les avions. En 2013, nous projetons d'avoir des vols supplémentaires avec l'arrivée de nouveaux B 777 300 ER dans notre flotte. Cela nous permettra de revenir à un vol de nuit, très apprécié par nos clients, et dont l'heure de départ pourrait se situer vers 22H30. On peut toujours chercher à augmenter le nombre de rotations mais il m'apparaît important de remplir les avions sans pour autant casser le marché. Nous nous adapterons à la hausse de la demande tout en veillant à ce que nous ne soyons pas en surcapacité.

DéplacementsPros.com : La mode aujourd'hui est à l'arrivée de frais supplémentaires associés au prix du billet d'avion, les fameux frais ancillaires. Qu'en est-il pour Singapore Airlines ?

Andrew Yip : Nous avons toujours été « full services » et, a priori, nous nous ne voulons pas entrer dans cette politique qui consiste à transformer le billet d'avion en un meuble à tiroirs où chaque avantage à un coût. Encore une fois, notre vision d'expérience globale fait en sorte que tout soit intégré au prix payé par le client. Que ce soit l'animation, la restauration ou même l'ensemble des petits services que l'on peut trouver à bord pendant le vol. Il ne faut pas chercher à être tout le temps le moins cher car au final le rapport qualité/prix n'existe plus et ne peut se retrouver qu'avec des investissements supplémentaires de la part du voyageur. Je ne suis pas certain qu'il apprécie.

DéplacementsPros.com : Quels sont les grands projets de SIA pour 2012 ?

Andrew Yip : Nous allons développer nos liaisons avec l'Australie et nous ouvrons le 26 mars prochain un vol Singapour/Darwin, assuré par Silkair. Cette ligne nous permet de proposer 100 vols par semaine vers l'Australie dont 7 à 10 vols vers Adélaïde. Ces vols viennent en complément de ceux que nous assurons déjà vers Sydney. Nous nous développerons également vers l'Inde, vers les Maldives ou la Corée-du-Sud. Bien évidemment, tout cela nous a demandé une optimisation des horaires pour nos passagers en provenance d'Europe et la garantie pour eux de trouver, en moins de 2h30, une cinquantaine de correspondances vers les principales destinations asiatiques ou australiennes. L'autre point qui nous tient à cœur, et qui est notre quotidien, c'est de garantir à nos clients la même qualité de service sur tous les vols qu'ils feront avec nous. Cette "fameuse" expérience Singapour Airlines nous apparaît essentielle. D'une certaine façon, c'est l'engagement que nous prenons avec nos voyageurs.

Propos recueillis par Marcel Lévy.