T’es allé au Bourget… Alors, raconte ?

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J’aime bien ces rencontres internationales ou pendant plusieurs jours quelques milliers de personnes, tels des pingouins inversés, marchent lentement les yeux rivés en l’air ! Un simple «Rafale» au bruit assourdissant suffit à figer tout le monde sur place. Impressionnant. J’ai vu des dingues dans de petits appareils tomber comme des feuilles mortes avant de repartir de plus belle. Epoustouflant. J’ai vu des dizaines de jolies filles pour qui l’aérien se limitait à deux heures de vol avec leur chéri… Touchant.

J’en ai croisé des connecteurs, des récepteurs, des allumeurs, des contacteurs et même des réflecteurs. J’en ai vu des radars, des petits, des gros, des moyens. Y’en avait des avions de toutes les tailles, de toutes les formes de toutes les couleurs, avec ou sans hélice, avec ou sans pilote, avec ou sans armes (factices). J’ai croisé dans les allées, des petits constructeurs venus d’Auvergne, d’Alsace ou de Normandie, aussi fiers que Boeing ou Airbus. A juste titre d’ailleurs. L’aérien, c’est un monde et en 2200 exposants, tout ce qu’il compte d’important est sur les stands ou dans les allées !
 
Sur place, ma première remarque - après avoir payé mes 13 € de parking pour garer mon scooter (Augustin de Romanet d’ADP a raison : l’argent se fait au sol et non dans les airs) - se résumait en un mouvement de recul. Le Bourget, c’est aussi et beaucoup une démonstration militaire. Des drones qui tuent, des missiles qui explosent, des hélicoptères qui bombardent. Mais pourquoi diable le ciel se veut-il aussi noir ? Face à un drone militaire, j’ai croisé une femme enceinte. Quel avenir pour son enfant si l’homme ne se transcende qu’en imaginant des outils de destruction ?
 
Au risque de jouer les « Oui Oui » au milieu des militaires, je pense que donner tant de place à la mort n’est pas digne de notre vision française des droits de l’homme. OK c’est du business et des emplois. Mais tout est-il piloté par cette seule vision financière d’une industrie de destruction Heureusement, le pavillon des métiers de l’aéronautique, avec ses dizaines de jeunes de l’école Airbus, vient démontrer que l’aviation civile aussi sait imaginer, que ce soit pour l’avion électrique voire l’avion sans pilote. Et à quelques mètres des rafales, j’ai vu l’A350 ou le Dreamliner, une aviation qui rapproche les hommes et leur donne l’occasion de se connaître.
 
Mais j’ai aussi aimé, au Bourget, le regard de passionnés, de ceux qui comme moi, s’étonnent toujours de voir décoller un engin plus lourd que l’air. Des fous qui notent photographient, discutent, visitent. Bref des professionnels convaincus qu’il flottera toujours dans l’air un parfum de liberté.
 
Et puis après ce moment d’égarement, en reprenant mon regard de journaliste spécialisé dans le voyage d’affaires, je me suis rendu compte que l’aérien ressemblait au travel management. On parle beaucoup du voyageur mais très peu le connaissent vraiment. Un nouvel avion se résume en deux mots : économie et rentabilité. Alors oui on met un nouveau siège, plus rentable et plus économique à gérer. Un nouveau service, rentable me dit-on. Un nouveau moteur, si économique. Pour paraphraser Edouard Leclerc, « le quotidien du transport aérien serait si beau sans les voyageurs ».
 
Et puis au-delà, j’ai vu des milliers d’exposants, des petits des gros, ultra spécialisés, venus du monde entier présenter des produits dont j’ignorais totalement l’existence. Certains ne font, en tout et pour tout, qu’un seul type de vis. Mais toutes sont numérotées et traçables, indispensable dans l’aérien. J’ai vu les fauteuils de demain, le divertissement amélioré, le streaming intelligent… Autant de sujets sur lesquels nous reviendrons.
 
Bref, j’ai adoré le Bourget qui a fini dans ma tête en feu d’artifice après avoir commencé aux sons des bruits de bottes. Alors ce week- end, précipitez-vous au salon  ! Oui vous ferez la queue pour voir les avions, oui vous aurez du mal à y accéder en voiture ou en bus… Mais comme le disait Coluche, «il faut souffrir pour voir une bielle».

Marcel Lévy