Volcan islandais : fausse alerte, mais vraies questions

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L’affaire n’a pas eu le temps de bouleverser l’actualité, qu’elle est déjà étouffée dans l’œuf. Ces derniers jours, plusieurs médias britanniques faisaient état d’une nouvelle éruption volcanique en prévision. L’Islande, encore elle, et à la tête du casting, un volcan au nom tout aussi poétique, et plus facilement médiatique : Bárdarbunga. L’office islandais de la météorologie a finalement démenti toute explosion, évoquant un « malentendu ». Les compagnies aériennes reprennent leur souffle. Mais la question se pose : l’Europe a-t-elle retenu les leçons d’avril 2010 ? Que se passerait-il en cas de nouvel incident ?

Quid de la possibilité d’une nouvelle éruption, en Islande ou ailleurs, qui viendrait à nouveau semer la panique dans le ciel européen ? Officiellement, la leçon d’avril 2010 a bien été retenue. «Et pour cause» serait-on tentait de dire, vu la facture indigeste présentée aux différents acteurs du voyage aérien. On évoque le chiffre de 5 milliards pour les compagnies aériennes. La faute, notamment, au manque de coordination au niveau européen, chaque pays y allant de sa propre interprétation, et de sa propre action.
Du côté de la DGAC - Direction Générale de l’Aviation Civile – on assure aujourd’hui que tout est désormais prévu pour parer à une nouvelle éruption, ou presque. En s’interrogeant sur les mesures concrètes pour assurer cette coordination, c’est déjà plus flou. On évoque «une réaction cordonnée, tout en respectant la souveraineté de chaque état» : équilibre précaire s’il en est, comme a pu le montrer la dernière crise. Interrogé sur l’action de la Commission Européenne en avril dernier, le représentant de la DGAC ne se souvient pas d’une véritable gestion, «à part pour critiquer… ». Quoi de nouveau, donc, sous le nuage ? En cas de nouvelle éruption, l'organisme européen Eurocontrol gère le dossier au plan européen. C’était déjà le cas l’an dernier. «Difficile de graver dans la pierre une réaction face à un nuage qui bouge», nous répond-on ensuite, avant de lâcher : «Nous sommes toujours dans une phase de brainstorming». C’’est plus clair.
La seule évolution concrète est d’ordre scientifique : la norme de 2mg de cendres par mètre cube d’air ingéré par les moteurs a été retenue, et devrait faire l’objet d’une certification. Ce chiffre est le fruit d’une mise en commun des connaissances accumulées par l’industrie aéronautique, les volcanologues et autres météorologistes, au niveau européen. Pour le reste, on navigue à vue.
Les responsables politiques semblent avoir pris conscience du problème, et de la nécessaire coopération en cas de nouveau caprice volcanique. En matière de volcans comme ailleurs, l’Europe ne s’est pas faite en un jour. Il reste à savoir si, du côté des entreprises, tout le monde est maintenant assuré... et organisé pour faire face ?

Florian Guillemin