Voyageurs d’affaires, dites stop au phubbing

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Un mot nouveau chasse l’autre. Une nouvelle attitude en bouscule une autre, même si le modernisme a parfois ses travers. Pour l’heure, décomposons ce fameux phubbing : le « ph » de phone et l’« ubbing » de snubbing (snober). Bref, les petits malins auront déjà trouvé : il s’agit de stigmatiser celles et ceux qui en public, oublient leur entourage pour se pencher, smartphone en main, sur la lecture de leurs mails.

On les connait ces cadres et autres salariés qui oublient votre présentation pour lire un mail ou surfer sur Facebook. Pire, on les retrouve à table, pendant un repas d’affaires, où ils jettent en permanence le regard sur leur écran comme si votre discussion les ennuyait sérieusement. Mais à leur décharge, les exemples viennent d’en haut. D’un François Hollande pendant un meeting (ou le match de foot de l'équipe de France, entre 2 buts!), de Silvio Berlusconi pendant un sommet européen, du Prince Charles à l’occasion d’une conférence internationale sur l’environnement.

Mais inutile d’aller chercher aussi loin. Regardez autour de vous. Votre mari, votre femme, vos enfants, votre patron, votre supérieur… Bref, le monde fait du phubbing sans même s’en rendre compte. Pire, quand ils remarquent votre étonnement, ils lâchent laconique un « désolé vieux, j’attends un message important ». Ne le croyez pas.

Bref, le phubbing est partout. Agaçant! «Un jour, face à un fournisseur dont l’un des collaborateurs passait son temps sur son smartphone entre deux échanges techniques, j’ai décidé de mettre fin à l’entretien en demandant que l’on revienne me voir une fois que ma clientèle aura de l’importance pour eux», explique un chef d’entreprise auvergnat spécialisé dans l’agroalimentaire. Et cette attitude se multiplie en Europe. En Allemagne, comme en Angleterre, des sites proposent une formation à la gestion des outils digitaux. Comprenez à lutter contre le phubbing, jugé d’une impolitesse extrême.

A force de pratiquer le phubbing sans s’en rendre compte, on risque le pire. En Chine, le procédé est jugé discourtois. Il irrite les interlocuteurs et même les fournisseurs. Idem en Inde où l’on regrette cette coutume occidentale qui se répand à très grande vitesse dans le pays. Aux USA, on organise des réunions « free phone » où chacun doit éteindre son portable pendant la durée de la réunion. Impossible d’y jeter un œil sans se faire rappeler à l’ordre.

Bref, le phubbing devient l’ennemi à abattre dans les entreprises. Une bonne nouvelle. Il reste à savoir si c’est juste une mode ou un phénomène de fond. Éradiquer le phubbing, voilà une mission d’intérêt public.

Marcel Lévy