A Dublin, no c’est non

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Petite, d’accord, mais terriblement attachante. Verte comme le regard de ses rousses et rousse comme la bière qui enchante ses pubs. Telle est Dublin, capitale d’Irlande et nouvelle étoile des affaires autant que des tendances européennes.

L’Irlande, Dublin en tête, vient de dire Non au projet de Constitution européenne. Les observateurs se sont tapotés le menton. Bigre : comment le pays qui a le plus bénéficié des subsides de l’Union, comment le pays qui est passé en trois décennies du rang de parent pauvre du continent à celui de fief des lumières (l’Irlande est devenue le paradis fiscal des artistes et des créateurs de tout poil), du bien vivre à la ville comme si on était à la campagne, a-t-il pu renier son appartenance au continent qui l’a si longtemps porté à bout de subventions ? Simple. L’Irlande, Dublin en tête a pointé le doigt sur ce qui gêne tous les Européens, les Français et les Hollandais avant eux, tout pareil. L’uniformisation, la normalisation, la banalisation. C’est justement la marque du caractère irlandais, il est trempé, et celui de son pilote dublinois. Pas question de se fondre dans les habitudes ordinaires de la mondialisation. Dublin veut laisser parler la poudre. Qu’on lui laisse son accent à couper au couteau, sa musique qui fait oublier la nuit à l’abri de pubs enfumés, ses boissons avalées sans grande modération, sa solide culture sculptée à la façade de monuments d’exception, préservée dans des bibliothèques séculaires ou enregistrée dans les meilleurs studios de la région. Sans oublier des traditions catholiques (l’évêché y a été installé en 1080…) pour lesquelles c’est un peuple entier qui est prêt à se dresser, croix à la main. Toucher aux fondamentaux de l’âme irlandaise, c’est sonner la révolte. Elle s’est exprimée : No, c’est non et qu’on n’en parle plus.
A Dublin, no c’est non
A faire, à ne pas faire…
*Coup de chance, les Français ont vraiment la cote à Dublin. Une vieille histoire de nos soldats venant appuyer les troupes irlandaises face à l’armée anglaise. Les Irlandais n’oublient pas cette main tendue.
*Inutile quand même d’espérer que le français soit fréquemment parlé. Donc, réviser son Assimil avant de débarquer ici.
*Malgré un style tranquille et une volonté affichée de préserver son cadre de vie, Dublin est totalement au goût du jour, aussi hi-tech que Singapour, branchée que Berlin, business que Chicago.
*Pour circuler en ville, taxi ou transports en commun, ils sont très efficaces. Inutile de s’embarrasser d’une voiture de location.
*Côté tenue, on est parfaitement conventionnel. Alors adoptez le chic français, discret. Cravate quasi obligatoire.
*Les messieurs irlandais sont très souvent membres d’un club. Leur cravate ou le pin’s épinglé à leur boutonnière en atteste. Soyez curieux de l’activité de ce club, de ses origines, sa vocation, ce sera parfaitement bien vu. En remerciement, vous serez peut-être invité à y passer une soirée. Boiseries séculaires, vieux whisky, trophées de chasse, cuir patiné… Les conversations prennent soudain des allures d’homme.
*Faire un cadeau à ses partenaires n’est pas obligatoire. Si vous le décidez, privilégiez la bouteille de grand bordeaux ou de bas-armagnac. Aux dames, offrir un carré griffé.
*Et ne pas résister au plaisir d’organiser une soirée dans un pub. L’Irlandais aime la fête, surtout en fin de semaine. Cette initiative rehaussera singulièrement votre prestige et vous permettra au passage, de communiquer avec vos nouveaux amis sur un autre mode que celui des affaires.
*Ne pas hésiter non plus à proposer une activité verte entre deux séances de travail ou de négociation. Golf, équitation, tennis, chasse et pêche sont les activités reines du pays.
*Evidemment, avant de venir, renseignez-vous sur les derniers résultats de l’équipe de rugby. Si elle vient d’être battue par le XV tricolore, louez sa bravoure.
*Ne jamais ironiser sur la religion. Les affaires du ciel sont prises très au sérieux par tous les Irlandais. La preuve, n’importe quel pub de la capitale informe sur les vols charters à destination de Lourdes ou de Rome. Ne pas oublier non plus que le divorce ou l’avortement demeurent des sujets à fort potentiel de fâcherie. A l’inverse, accompagner ses partenaires à la messe dominicale est parfaitement bien vu.
A Dublin, no c’est non
La promenade dans Dublin est, en ce sens, édifiante. Petite (500 000 habitants), jolie lorsque la visite se faufile dans les ruelles du centre, plaisante quand elle traverse des jardinets entretenus à la britannique, émouvante à la vue de maisons qui firent la glorieuse histoire de l’Irlande (les premières références à la ville datent de 140, dans les écrits de Ptolémée, c’est dire !), romantique à souhait si elle s’attarde sur les rives de la Liffey, la capitale a tout pour séduire. Elle ne s’en prive pas. Prière d’adhérer sans lésiner, de rester œil aux aguets et coeur grand ouvert. Alors Dublin se livre et c’est tout bonheur. Sinon, méfiance, elle est capable de dire No.

Par Marc La Vaissière
A Dublin, no c’est non
A voir si vous avez….

Une heure
Une heure. Au minimum, la passer dans un pub, n’importe lequel. C’est ici que patiente l’âme irlandaise pur jus. Les plus typiques s’alignent le long de Baggot street. Ambiance paisible durant la journée, souvent torride en soirée, surtout en fin de semaine où la musique live sonne de tous côtés.

Une journée
Une journée. Commencer par la visite de Trinity College qui abrite une bibliothèque d’exception. Elle renferme, entre autres, une bible du VIIIème siècle, illustrée par les moines de Kells. Puis, visite obligée de la cathédrale Saint-Patrick, le patron adulé des Irlandais. Passer devant la belle rangée de façades géorgiennes de Merion Square. Et conclure à Temple Bar, un quartier où tout se passe à l’heure à laquelle les lions vont boire.

Un week-end
Un week-end. Il est temps de répondre à l’appel de la verte Irlande. Killiney, à 30 minutes de route de Dublin, une autre planète. Parcours de golf, troupeaux de moutons, parcours de pêche, randonnées, haras… A savourer selon sa passion, mais sans modération. Comme un whisky irlandais.
A Dublin, no c’est non
Pratique

*Y aller. Aer Lingus (www.aerlingus.com, Air France (www.airfrance.fr et Ryanair (www.ryanair.com assurent des vols quotidiens entre Paris et Dublin. Ils durent un peu moins de deux heures. L’aéroport international est à une grosse demi-heure de route. En taxi, compter environ 30 €.
Heure. Quand il est midi en France, il est 13 heures en Irlande.

*Formalités. L’Irlande, c’est l’Europe, donc pas de formalités particulières. Avoir une pièce d’identité avec soi, histoire de satisfaire aux éventuels contrôles.

*Se loger. The Merrion (00 353 603 06 00), évidemment, invariablement considéré comme le plus beau de Dublin. Le plus chic, c’est certain, avec une piscine intérieure, un spa et une table de référence tenue par un chef français. En prime, atmosphère feutrée façon vielle Irlande des manoirs. Dans un genre comparable mais beaucoup plus intime puisque la maison ne compte que 11 chambres, viser Browne’s, une pépite posée sur Stephen’s Green.

*Se restaurer. Pour faire branché et sans prétention, toujours sur Stephen’s Green, pousser les porte de The People’s, un bistro à vins qui fait fureur. Sinon, L’Ecrivain, au 109 Lower Baggot street, pour partager le registre sur lequel excellent les Dublinois : chic, intellectuel et branché.

*Se renseigner. Office national du tourisme irlandais (tél. : 01 70 20 00 20 et www.irlande-tourisme.fr.

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