AFTM, l’assemblée générale des futurs changements?

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Difficile d’évoquer l’avenir de l’AFTM ou son fonctionnement sans énerver quelques peu les piliers associatifs. Et pourtant, l’Assemblée Générale qui va se tenir ce jeudi soir aura la difficile mission de regarder l’avenir pour l’anticiper. Les deux dernières années de Présidence de Michel Dieleman, l’artisan de la réussite de l’AFTM, remettent en selle les vieux démons philosophiques du bureau dont les membres sont partagés entre une vision commerciale et les partisans d'une gestion « tranquille et associative », digne d’une bande de copains.

Comment ne pas évoquer les trois mails reçus en moins de 48 heures, à la veille de l’AG, qui remarquent des approches économiques associatives jugées trop commerciales. Si les documents envoyés ne sont pas anonymes, leurs auteurs ne souhaitent pas pour autant dévoiler leurs identités. Iront-ils au bout de leurs démarches au cours de l’AG ? Pas sûr. D’autant que les propos sont durs et ne reflètent pas forcément la réalité ou ce que pensent le Président et le délégué général.

Que disent-ils ? : «La plupart des actions menées ces derniers mois le sont en collaboration avec les partenaires» détaille l’auteur d’un des courriels qui ajoute que la dernière soirée annuelle de l’association «était une foire commerciale ou les quelques TM présents ont préféré s’en aller tôt pour ne pas subir les assauts commerciaux des fournisseurs ». Une assertion un peu facile si l’on en juge par la présence de plus de 800 personnes. Certes, la vision était très orientée fournisseurs mais au final, tout le monde a trouvé son compte même si certains TM sont partis plus rapidement que d’autres. L’AFTM a bien compris le besoin des membres d’être entre eux une fois par an sans grand sujet défini, juste pour une fête, et réfléchirait à une soirée privative, entre adhérents seulement.

Pour les « opposants », beaucoup d’opérations organisées par l’AFTM sont encadrées par les fournisseurs du voyage d’affaires qui financent l’association. «Ce n’est pas la finalité de la structure», évoque cet adhérent qui fait remarquer le départ de BCD, déçue de constater qu’une TMC concurrente avait utilisé le fichier associatif pour «remercier les acheteurs de leur présence à la soirée de l’AFTM ». Et de poursuivre. «Sommes-nous dans le cadre de l’éthique de nos entreprises en allant à des ateliers organisés par les fournisseurs sponsors que nous consultons ensuite dans le cadre des appels d’offre» interroge ce mail. 

Là aussi le jugement est sévère. Pour vivre, l’association a besoin d’argent et doit en contrepartie ouvrir ses activités aux partenaires. Certes, on peut regretter que des startups, sans moyens financiers, ne soient pas également invitées à de telles réunions. On peut aussi imaginer que la veille techno se fasse avec des experts indépendants. Comment comprendre le travail de la commission en charge de l’open booking quand l’un des animateurs déclare sur scène dans le cadre de la journée Acte en décembre dernier « qu’il n’y croit pas ». Autant de points à peaufiner.

Ces critiques arrivent un peu tard car la réflexion est engagée depuis quelques mois par le bureau de l’AFTM. Il travaille à un nouveau modèle économique, plus proche d’une certaine éthique professionnelle. «Il n’est pas normal que certains d’entre nous doivent prendre une journée de RTT pour se rendre à un atelier » m’explique l’un des tous premiers adhérent. Il a raison sur le fond car le savoir doit s’acquérir sur le temps de travail. Vivre l’AFTM, c’est une poursuite de son activité professionnelle.

Le discours annuel de Michel Dieleman ce soir, à l'occasion de cette AG, donnera le ton de l’avenir et devrait remettre quelques pendules à l’heure. Malgré ses activités au sein d’Orange, son départ à la retraite le condamne à quitter l’association. Le retour à l’emploi du Vice-Président replace Claude Lelievre dans la course au poste. Le prochain « patron » ne devra pas être clivant et devra écouter. Sans certitude appuyée, il aura à redéfinir la stratégie d’une association qui a quitté depuis deux ans les seules voies du travel management.  Nous sommes de plein pied dans le monde de l’achat. Le départ de certains adhérents, faute d’avoir pu conserver leur emploi ou le passage d’acheteurs chez les fournisseurs, démontre bien la fragilité de ce métier. Même reconnu, il reste peu demandé.

Enfin, l’AFTM devra définitivement s’engager sur les voies politiques pour défendre réellement le voyageur d’affaires et ses acheteurs. L’enjeu est crucial. Une fois débattus les sujets classiques sur la sécurité ou l’avenir du travel manager, il faudra aborder les vraies thématiques de fond : la technologie qui remplace l’humain, les dématérialisations profondes qui s’annoncent, l’optimisation intelligente des profils. La liste est longue.

L’ENACT, l’association européenne créée par la branche EMEA de l’ACTE et quatre associations nationales de professionnels du travel management, a montré ses limites. L’UE n’a rien entendu de ses demandes et continue à privilégier le consommateur sans penser à l’entreprise. L'association allemande des TM, VDR, ou la GBTA Europe n'ont pas souhaité rejoindre la structure européenne. Autant dire que la route est encore longue pour transformer l’inconnu en une force de conviction.

Autant de sujets qui seront débattus lors de l’AG de ce 21 mai ! Pas certain que les critiques s’étalent au grand jour. C’est toute la faiblesse du système associatif où le silence prime souvent sur les envies, les obligations professionnelles et familiales sur le militantisme. Dommage. Seule certitude, l’AFTM est incontournable, sans concurrence et au fait de sa notoriété. Évoluer est donc indispensable pour ne pas régresser. Tous les adhérents le comprennent-ils réellement ?