Acheter, un joli mot pour une belle fonction

66

Voilà quelques années lorsqu’un gamin n’était pas bon à l’école, ses parents savaient qu’ils en feraient un bon vendeur… Pourvu qu’il ait du bagout et un sens aigu de l’observation. Un raccourci facile qui a conduit bien des jeunes dans la vente de voitures, l’immobilier ou la distribution.

Si vendre était une punition, acheter, au contraire, relevait d’un savoir-faire douteux. «Allons bon», me disait ainsi l’un de mes amis, chef d’entreprise à la retraite, «Acheter, c’est facile. Cela demande du bon sens et une curiosité à toute épreuve». Erreur fatale. Acheter demande une réelle maîtrise des besoins et un vrai talent d’analyste pour l'avenir, qui s’apprend. Dans le monde du voyage, bien des agents de comptoir se sont reconvertis, à coup de formations «spécialisées» et avec plus ou moins de talent, dans le monde des achats. Car, contrairement aux idées reçues, «acheter» demande des connaissances qui vont au-delà du simple maniement de la calculette. Dans le monde du voyage d’affaires, optimiser et anticiper sont deux qualités nécessaires qui demande une bonne vue comptable des dépenses engagées et une maîtrise du développement souhaité par l’entreprise. Si choisir à bons prix est facile, choisir intelligemment est plus complexe. Heureusement.
C’est sans doute l’analyse de la fonction qui a conduit bien des entreprises à restructurer depuis quelques années leurs services «achats». D’un côté la production, de l’autre le hors production avec des passerelles entre les deux mondes pour éviter les cloisonnements parfois coûteux. Ces services, placés sous la direction d’un patron des achats, sont depuis peu associés à la direction financière de l’entreprise dans le seul but de créer une synergie entre l’acheteur et le payeur… Le tout sous le regard de spécialistes financiers patentés qui, dans l’entreprise, jouent un peu le rôle des "cost controleurs" d’hier. Car l’achat dépasse le simple cadre du produit. Aujourd’hui, l’interopérabilité des besoins est source d’économies. Cette constante adaptation besoins/fournisseurs ne saurait se faire sans la connaissance approfondie des besoins, des marchés et de l’offre. Un travail bien plus complexe qu’on ne le pense. Mettre au grand jour la fonction achat est une mission noble et nécessaire. Un but à atteindre pour ne pas enfermer les acheteurs dans un carcan économique, bien trop étroit pour être réaliste.

Alain Joyet