Arrêtez le « bashing » sur le transport aérien

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Lors de son intervention au récent déjeuner de l’USAIRE, Alexandre de Juniac le CEO de IATA a attiré l’attention des convives sur le danger de laisser se développer les récentes critiques sur le transport aérien, sans réagir. Et il a bien raison.

Depuis quelque temps, on voit poindre une offensive contre le transport aérien accusé de tous les maux et d’abord de polluer la planète. Aux dires largement médiatisés de ces « écologistes » il est urgent d’arrêter de voyager avec ce mode de transport et pour cela, il n’y a qu’à taxer le kérosène. Une communication de la Commission Européenne parle même de 33 centimes d’€ par litre. Tant qu’à marcher sur la tête, autant que ce soit payant !

De quoi s’agit-il et à quoi sert le transport aérien ?

Comme l’a fort justement claironné Alexandre de Juniac lors de son discours, le transport aérien c’est d’abord la « LIBERTE ». On ne saurait mieux dire. Les échanges multiples entre les consommateurs du transport aérien ont permis aux peuples de mieux se connaître et pourquoi pas de s’apprécier. Voilà qui constitue un facteur de paix dont tout le monde pourra reconnaitre l’intérêt majeur.

Et maintenant entrons un peu dans les faits. Certes le transport aérien est un gros consommateur d’énergie et il produit du CO². Inutile de le nier, même si les experts ne sont pas d’accord sur le pourcentage créé par cette activité : 2,2% pour ceux de l’ATAG (Air Transport Aviation Group) et 3,2% pour ceux de l’AIE (Agence Internationale de l’énergie). Bon, cela fait tout de même un sérieux écart de 30% entre les deux analyses. Mais le fait est là et acteurs du transport aérien doivent le prendre en compte. D’autant plus qu’avec une croissance moyenne de 5% par an, l’impact sur les émissions de CO² sont amenées à prendre une part plus importante dans le futur.

Seulement les compagnies aériennes sont dépendantes de leur environnement, sans pouvoir faire grand-chose, si ce n’est compenser les émissions produites par des actions périphériques comme la plantation de millions d’arbres. Elles peuvent aussi arrêter de se développer, mais alors cela conduit à écarter des populations entières des indéniables bénéfices du transport aérien. C’est en particulier le cas des pays émergents dont la croissance a été accélérée justement par ce mode de transport.

Les constructeurs ont déjà fait d’énormes progrès. Les appareils actuels font 5 fois moins de bruit que ceux des années 1980. Ils consomment beaucoup moins de carburant. Une « Caravelle », par exemple qui transportait autour de 100 passagers consommait 4 tonnes de kérosène à l’heure alors qu’un A 320 qui enlève 180 passagers n’en brule que 3 tonnes. Autrement dit la consommation par passager a été divisée par 2,40. Ce n’est pas suffisant. Il reste beaucoup à faire et d’abord arrêter de penser que la propulsion solaire est impossible. A ce compte-là, faire voler un plus lourd que l’air serait resté un vœu inaccessible si les frères Wright n’avaient pas fait la preuve du contraire le 17 décembre 1903 avec leur premier vol motorisé. 56 ans plus tard seulement, on traversait l’Atlantique en Jet à 900 km/h avec le Boeing 707. Bertrand Piccard a montré la voie en faisant voler le Solar Impulse autour de la terre rien qu’avec l’énergie solaire.

Et puis les Etats ont eux aussi une sérieuse capacité d’amélioration de l’efficacité du transport aérien en taillant des routes aériennes plus directes et en harmonisant le contrôle aérien au moins à l’échelon de l’Europe. Cela vaut bien quelques abandons d’une pseudo souveraineté.

Au fond, les premières victimes de cet acharnement sur le transport aérien sont les compagnies aériennes. Elles subissent les fluctuations du prix du jet A1 passé en 10 ans par des pointes à 87 cts de dollar le litre et des creux à 23 cts. On voit ce que donnerait une taxation de 33 cts le litre préconisée par certains. Rappelons que le carburant est détaxé pour tous les vols internationaux à la suite d’une décision de la Convention de Chicago qui a créé le transport aérien moderne en novembre 1944.

Tous les jours 12 millions de passagers empruntent un avion de ligne pour faire une distance moyenne de 1900 km. On peut toujours arrêter le progrès et interdire d’une manière ou d’une autre l’accès de ce formidable mode de transport aux nouvelles couches de population. Les efforts des uns et des autres en ont fait un produit de masse. Il est urgent de le protéger au lieu de le dénigrer.



Jean Louis BAROUX