Bangkok, d’ombres et de lumière

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La capitale de la Thaïlande ne cesse de cultiver sa double face. Température torride et air conditionné glacé, l’or et le sordide, les bousculades de la rue avec les limpidités du ciel. Voilà le signe d’une vraie ville, soumettant l’effervescence des hommes à la sagesse des dieux, sa pugnacité dans les affaires à la sérénité de ses habitants.

Le livre Guiness des records accorde au vrai nom de Bangkok le titre le plus long du monde pour un site urbain. « Ville des anges, grande ville, résidence du Bouddha d’émeraude, ville imprenable du dieu Indra, grande capitale du monde ciselée de neuf pierres précieuses, ville heureuse, généreuse dans l’immense palais royal pareil à la demeure céleste, règne du dieu réincarné, ville dédiée à Indra et construite par Vishnukarn ». Quelques férus d’intégration relèveront le défi de dire tout cela en thaï. Bon courage. Les autres diront « Bangkok » en poussant les portes d’un royaume de légende dont le quotidien est rythmé par les offrandes qu’on dépose devant les temples miniatures posés au coin des avenues ou bien sur les autels des grands édifices qui célèbrent la gloire du Bouddha servi par des centaines de lamas au crâne rasé. Ici, on ne plaisante pas avec le ciel et encore moins avec les esprits qui veillent et protègent. Chacun le sien. Chaque famille le sien. Chaque quartier ou village le sien.
Bangkok, d’ombres et de lumière
A faire, à ne pas faire…
* Pour circuler sur place, taxi (ils sont nombreux et peu chers) climatisé ou voiture de location avec chauffeur. Ne pas sous-estimer la difficulté à se déplacer dans les embouteillages monstrueux et avec une signalisation en caractères thaïs.
* La société thaïlandaise est, comme toutes ses voisines asiatiques, pyramidale. En affaires, on escalade donc les marches en gravissant à chaque fois un échelon de responsabilité et de décision. Cette hiérarchie est essentielle. Quelle que soit la réunion, on s’adresse d’abord au chef. On ne lui dit jamais non, on ne joue jamais la division, on ne s’impatiente jamais, on ne montre pas sa mauvaise humeur. Sinon, les négociations sont terminées.
* Attention, les responsables sont fréquemment entourés de collaborateurs qui leurs sont totalement dédiés. Le recrutement par communauté d’origine ou par lien familial (les familles sont immenses), est fréquent.
* Obligatoire : apporter des cadeaux. Tout est bon pourvu que ce soit français. Les griffes françaises ont la cote, foulard, briquet, cravate, parfum… Ou bien du cognac, mais ni vin, ni champagne. En retour, vous en recevrez. Les accepter. Prière de les ouvrir sur place et de remercier mille fois de l’immense bonheur qu’ils apportent.
* Ne jamais, vraiment jamais, toucher ses interlocuteurs. Au mieux, une poignée de mains s’ils le proposent. Rien de plus. Avec les dames, on se parle à distance. Petit détail, ne jamais croiser les jambes avec le pied dirigé vers quelqu’un. C’est une insulte. Tout comme toucher les cheveux d’une voisine. L’horreur.
* Le roi et la famille royale sont vénérés comme des dieux. Il est hors de question de se moquer de ces pratiques. De même, ne pas ironiser sur les pratiques religieuses, elles sont quotidiennes pour tous les Thaïlandais.
* Evidemment, la négociation d’un contrat passe par les services d’un interprète et d’un avocat. Anglais obligatoire pour parler business.
* Les Thaïlandais sont d’une extrême courtoisie. Cette amabilité cache un vrai sens des affaires.
* Bonne nouvelle, les Français ont une excellente cote en Thaïlande.
* On est ici en monde asiatique. Donc, le oui ne signifie jamais que l’accord est conclu.
* Le choix de son hôtel est essentiel. On y invite ses partenaires, y compris pour le dîner. C’est une question de classe, une manière de reconnaissance.
Bangkok, d’ombres et de lumière
Les 10 millions d’habitants de cette ville hors normes traversée par la Chao Phraya, fleuve large, puissant, boueux, semblent vivre dans une bouilloire, un creuset en permanente fusion. Le fleuve irrigue de ses klongs (canaux) des dizaines de quartiers. Voilà déjà mille explications aux oppositions de la ville : béton contre pilotis ; gratte-ciel de verre face aux bicoques miséreuses ; embouteillages dantesques, pollution dense et jardinets romantiques dessinés autour d’un bassin tapissé de lotus ; marchés populeux colorés voisins de temples de totale sérénité.
Ainsi va Bangkok, sans la moindre mesure, prenant plaisir à juxtaposer les contraires, ceux qu’on pensait inconciliables. Erreur. La philosophie locale est justement celle du tout en un. Une ville, c’est le ying avec le yang, le blanc et le noir, le bien à côté du mal, l’ombre frontière de la lumière, la vitesse autant que l’immobilité la plus totale. C’est une clef essentielle pour s’adapter, se fondre et réussir en Thaïlande. Esprit carré bardé de certitudes, passez votre chemin. Mental raffiné, habile à tisser les fils d’or et de soie, aimant le subtil et la délicatesse, bienvenue au royaume de Siam. Pour s’en convaincre, jeter un regard vers sa majesté Rama IX dont le portrait est partout, dans la rue, les boutiques, le lobby des hôtels… Ou bien vers le Bouddha, lui aussi omniprésent. Tous deux affichent un mystérieux sourire. L’un comme l’autre sont généralement couverts d’or. Deux signes clairs : sérénité et richesse. Celles du ciel, évidemment. Voire. Le roi (60 années de règne quand même !) est considéré comme le souverain le plus riche de la planète avec une fortune avoisinant les 100 milliards de dollars. Encore un record.

Marc La Vaissière
Bangkok, d’ombres et de lumière
A voir si vous avez….

Une heure
Au pied de l’hôtel Shangri La, sauter dans une barque motorisée pour une promenade inoubliable dans les klongs, les canaux de Bangkok. C’est ici que se trouve le Bangkok des traditions, boutiques flottantes, temples pieds dans l’eau, maisons sur pilotis…

Une journée
Promenade en bateau le matin en poussant jusqu’à Ko Kret, une île sans voiture dont les habitants sont potiers depuis toujours. Déjeuner dans un des restaurants du bord de fleuve qui sert poissons grillés et crevettes géantes comme nulle part ailleurs. Ensuite, pause dans un des temples de la ville, celui du Bouddha couché ou du Bouddha d’émeraude. Pour conclure, Patpong, les deux rues commerçantes les plus chaudes de la capitale. Le paradis des contrefaçons et des bars à danseuses hot. A voir, en se contentant de consommer une bière au bar. Dîner dans un des restaurants chics de la ville.

Un week-end
Escapade à Ayuttaya, l’ancienne capitale royale qui brille par ses temples magnifiques. Le dimanche, cap sur le grand marché, juste à côté de l’ancien aéroport Don Muang. Antiquités, bijoux, vêtements, combats de poissons, concours de chants d’oiseaux, il y a tout ici. Pour une vraie pause sur la plage, vol vers Phuket ou Koh Samui.
Bangkok, d’ombres et de lumière
Pratique
* Y aller. Thaï Airways International (01 44 20 70 80 et www.thaiairways.fr et Air France (3654 et www.airfrance.fr assurent des vols directs quotidiens entre Paris et Bangkok. Le voyage dure 12 heures. Le décalage horaire entre France et Thaïlande est de 6 heures en hiver, 5 heures en été.
* Formalités. Passeport en cours de validité exigé. Le visa est délivré sur place. Pas de précautions sanitaires particulières mais ne boire que de l’eau en bouteille.
* La monnaie locale est le bath. 1 € vaut environ 50 baths.
* Le nouvel aéroport international de Suvarnabhumi est à une heure du centre-ville. Compter une cinquantaine d’euros pour la course. Noter que tous les grands hôtels proposent des transferts en limousine, genre Mercedes, à l’aller comme au retour. Compter alors une centaine d’euros.
* Se restaurer. Ne pas hésiter à déguster la cuisine de rue, soupes, brochettes, gâteaux… que proposent des mamies gourmandes à même le trottoir. Seafood Center (New Petchaburi road), une institution pour amateurs de poissons et fruits de mer. Et puis la terrasse de l’hôtel Oriental pour le cadre en bord de fleuve et la qualité de l’assiette. So chic et romantic !
* Se renseigner. Office national du tourisme de Thaïlande
(tél. : 01 53 53 47 00 et www.tourismethaifr.com.

Notre hôtel
L’Oriental évidemment, pour entrer dans la légende. Au bord du fleuve, le grand chic asiatique à chaque pas, chambres somptueuses (358), dix restaurants, spa, etc. Compter 300 € la nuit.
www.mandarinoriental.com