Baromètre American Express, les limites de l’exercice européen

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Si 20 ans est un bel âge que bien des entreprises aimeraient fêter avec brio comme Amex, il faut remarquer que pour une société, 20 ans c'est un peu l'âge de tous les dangers. Le poids du passé et de l'habitude, la taille et la vision mondiale d'un groupe font souvent oublier l'ADN même de l'activité. Amex en est loin même si son traditionnel Baromètre, disons-le d'emblée, a pris un coup de vieux. Malgré une vision européenne, il reste à l'image de ce qui est publié depuis des mois : sans éclat ni réel profondeur. Comparer l'univers anglo-saxon à celui des latins que nous sommes a le mérite d'européaniser le discours, mais sans lui donner la puissance locale que tout le monde attend.

"Brillante", voilà le qualificatif généralement entendu à la fin de la présentation pour évoquer la prestation d'Eric Audoin, le VP du groupe. Mais, il y a toujours un mais, les résultats eux n'apportent pas grand chose à la recherche de prévisions attendue par les acheteurs ou les Travel Managers. "Il manque cette ligne bleue des Vosges", reconnait un acheteur du monde des télécommunications, "Ligne qui, au delà de l'activité, donne une tendance utile à l'analyse de nos dépenses et de nos besoins". Car c'est dans cet univers confus du local que l'on sera resté sur notre faim. La vision européenne, sur 296 entreprises, est bien trop courte pour coller à la gestion de proximité. Certes, les datas fournies (nous reproduisons aujourd'hui la synthèse publiée par Amex) résument assez bien ce que d'autres études disent depuis des mois mais ne permettent pas de positionner son entreprise dans un enchevêtrement de pistes économiques complexes. D'autant que la conclusion proposée apparaît à tous les participants d'une logique trop présente. Faire de la TMC le seul et unique artisan de la réussite des voyages d'affaires en entreprise reviendrait à limiter le rôle des acheteurs à choisir entre Amex et Carlson Wagonlit Travel. Un peu court pour être juste, même si au final bien des entreprise pourraient arriver à cette conclusion pour l'organisation de leurs déplacements professionnels.
De cette longue série de chiffres présentée à l'EVP, je n'en retiendrai qu'un : celui évoqué lors du point de presse, qui concerne le volume estimé du marché du voyage d'affaires en France en 2010. Pour Concomitance, qui a piloté le Baromètre, il serait de l'ordre de 14 milliards d'euros. Un chiffre épuré des dépenses annexes et qui serait plus révélateur de la réalité de l'activité. Un chiffre cependant en baisse sensible, comparé aux 18 milliards de 2008, mais qui synthétise assez bien la frilosité actuelle des investissements pour le voyage d'affaires.
Sans doute, à l'image des déplacements professionnels, le baromètre devra-t-il évoluer ces prochaines années faute de quoi le rendez-vous, fût-il le plus agréable possible, laissera sur sa faim celles et ceux en charge d'investir sur l'une des activités de l'entreprise dont on comprend parfaitement l'intérêt mais dont on ne mesure jamais totalement les coûts.

Marcel Lévy