Bientôt une surcharge «pilotes» ?

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C’est reparti. Le baril de Brent est passé au-dessus de 100$ et par voie de conséquence immédiate, Air France - précédée et suivie par la plupart des compagnies traditionnelles, à la notable exception de celles du Golfe - a aussitôt augmenté la surcharge de carburant. Et pas qu’un peu. Certes sur les courts courriers elle n’est que de 2 € par vol, mais elle passe à 28 € par vol en moyens courriers et à 96 € par vols longs courriers inférieurs à 7 heures de vol et 106 € par vol pour les parcours les plus longs. Tout de même, sur un Paris New-York qui doit se situer dans la dernière catégorie, cela fait une augmentation de 212 € à comparer aux 380 € du tarif le plus bas. En clair, la surcharge carburant est équivalente à 56% du tarif d’appel.

Il n’est pas question de nier que le pétrole étant une composante déterminante du prix de revient, celui-ci augmente ou diminue en fonction des variations de cours. Par conséquent, il est d’une grande logique de faire également varier le prix de vente pour tenir compte de ces aléas. Mais cette façon de présenter les choses aux clients est tout simplement insupportable. C’est la manière la moins élégante de les prendre pour des imbéciles. Et que l’on ne nous dise surtout pas que cette pratique est saine en mettant de la transparence dans les tarifs car ceux-ci évoluent, avec la désastreuse pratique du « yield management », à longueur de journée et de différentes classes tarifaires (une vingtaine par vol long-courrier)

Pour continuer à afficher des tarifs sans commune mesure avec ce que paie réellement le passager, les compagnies se sont lancées dans la pratique qui consiste à camoufler leurs vrais prix de vente en le saucissonnant. Ainsi, Air France, mais également les autres transporteurs n’augmente pas ses tarifs, elle ne fait que réajuster les surcharges carburant. De qui se moque-t-on ?

Dans la pratique, d’ailleurs la plupart des compagnies aériennes y compris les low costs se sont laissé aller à ces petits camouflages. Pour les low costs, c’est par exemple la surcharge pour le paiement par carte de crédit alors qu’aucune alternative n’est proposée. On pourrait multiplier les exemples de recettes dites « ancilliary », magnifique appellation, car l’imagination des compagnies est infinie. Et en plus, les responsables sont fiers de ces pratiques. Lorsque vous discutez avec eux, ils vous expliquent avec un grand sourire comment ils s’arrangent pour gruger le consommateur.

Mais pourquoi s’arrêter en si bon chemin ? Le pétrole est nécessaire pour faire voler les avions, mais après tout, les pilotes également et les contrôleurs aériens alors, et les aéroports ? Bref, chaque fois que les pilotes sont augmentés, chaque fois que les redevances aéroportuaires bougent, chaque fois que le contrôle aérien augmente ses tarifs, il devient urgent de créer une nouvelle surtaxe. J’y vois un grand avantage : c’est la transparence. En effet le consommateur saurait à coup sûr quand les personnels navigants sont augmentés ou quand les aéroports ou le contrôle aérien augmentent leurs redevances. Le public pourrait alors comparer ces hausses aux améliorations des services que les clients sont censés recevoir.

Et puis on finira bien à ce petit jeu à avoir des tarifs aériens égaux à zéro, la recette étant entièrement constituée de surcharges.

Jean Louis Baroux