Bijoux de famille à vendre

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Les deux plus grandes compagnies européennes : Lufthansa et Air France/KLM seraient-elles les plus malades ? Il n’était pas évident au vu des résultats de 2011 que le transporteur allemand soit dans une situation difficile avec seulement 13 millions d’euros de pertes, aussi a-t-on pu être étonné de voir les mesures drastiques prises alors. Depuis les résultats du premier trimestre sont tombés et les décisions du début d’année s’expliquent tout à fait bien. Avec un résultat négatif de l’ordre de 500 millions, il y a le feu dans la maison germanique.

Bijoux de famille à vendre
Les mesures décidées rapidement en Allemagne sont importantes. En plus des économies déjà enclenchées : suppression de 3500 postes administratifs, baisse des frais de transport de 20% et amélioration du produit Affaires, Lufthansa envisage maintenant de vendre ses bijoux de famille à commencer par sa société de catering, leader mondial dans son domaine, j’ai nommé LSG Sky Chefs, tout au moins si on en croit quelques publications économiques. L’affaire est importante à plus d’un titre.

D’abord on ne parle pas d’une petite transaction puisque Sky Chefs est estimée à 900 millions d’euros. Ensuite parce que cette cession, si elle va à son terme, montrera une grande évolution dans la façon de faire des grandes compagnies qui, jusqu’à présent, intégraient la quasi-totalité de la fabrication de leur produit. Gageons d’ailleurs que la politique de désengagement ne s’arrêtera pas là. Pourquoi alors ne pas de séparer de Lufthansa Consulting par exemple ? Il n’est pas certain que de grands cabinets d’audit ne soient pas intéressés. Bref, on voit assez clairement les grandes compagnies se recentrer sur leur métier de base qui est d’exploiter et de vendre des sièges avion. Il reste que se séparer de filiales telles que celle qui fournit le catering doit être un vrai crève-cœur, à tel point que dans un premier temps tout au moins, le transporteur allemand souhaite ne vendre qu’un stock minoritaire de 49%

Lufthansa a vraiment pris le taureau par les cornes. Cela suffira-t-il à enrayer la perte de parts de marché au profit de concurrents plus légers, et peut-être plus performants ? Nous le saurons certainement d’ici la fin de l’année.

Discrètement, Air France/KLM a également entamé la cession d’actifs. D’abord en vendant une part importante de ce qui lui restait dans Amadeus pour un montant de 467 millions d’Euros. Ensuite, en prenant la décision de se séparer de son réseau régional, ce qui est tout de même un peu compliqué. Mais cela s’arrêtera-t-il là ? Notre compagnie nationale détient également des sociétés sans doute parfaitement vendables si nécessité se faisait sentir.

Servair tout d’abord. Certes elle n’est pas comparable en valeur à LSG Sky Chefs : elle représente ¼ du volume d’affaires de son concurrent allemand et elle peine à dégager des bénéfices : 5 millions d’euros en 2011 contre 85 millions à Sky Chefs. Mais enfin cela constitue encore un actif non négligeable.

Et il sera peut-être nécessaire d’y faire appel car les échéances approchent dans le groupe franco/néerlandais. Il est prévu de publier le nouveau cadre conventionnel, correspondant à la gestion du personnel d’ici à fin juin. Comment vont donc réagir les salariés peu habitués à ce qu’on leur réclame de vrais efforts ? Et puis il faudra bien faire remonter le cours de l’action qui est cotée maintenant à 3,402 € soit une division par 5 par rapport à son cours d’introduction qui était de 14 € au 19 février 1999. Rappelons qu’elle est montée à 39,40 € le 4 juin 2007, son plus haut niveau avant de s’effondrer à partir de 2009.

Il n’est pas inutile de rappeler la déclaration qu’a faite le Président Directeur Général du Groupe lors de la présentation des résultats 2011, je cite :

« Aujourd’hui, le groupe Air France/KLM sort de la crise plus affaibli que ses concurrents : la structure financière est préoccupante en raison de notre faible niveau de trésorerie et de l’évolution de notre dette, notre compétitivité n’est pas assez forte pour que nous soyons rentables et la qualité de notre recette unitaire est insuffisante pour compenser l’augmentation de notre facture carburant. »

On ne saurait faire un constat plus lucide. Il reste à trouver les remèdes appropriés.

Jean-Louis BAROUX