Cinq conseils pour voyager ou faire voyager durable

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Alors que le Grenelle de l'Environnement n'en finit pas de déterminer la mesure et les méthodes utilisables pour les futurs bilans carbone des sociétés, bien des entreprises qui veulent s'adapter à leur époque et à leurs voyageurs regardent comment apporter une approche durable à leurs déplacements professionnels. Une tâche difficile, au regard des contraintes: il s'agit de ne pas exploser les dépenses et d'assurer une qualité de voyage au moins égale à celle dont disposent aujourd'hui les voyageurs.

Voyager mieux, en tous cas plus respectueux de l'environnement, et respecter les budgets voyage. C'est sûr, c'est "Une quadrature du cercle", explique Marie Claude Schlimk, experte dans ce domaine et auteur d'un livre à paraître : l'entreprise durable. Et les difficultés, selon elle, ne manquent pas : absence de procédures dans l'entreprise, mise en place de processus de "bonne conscience" moins efficaces que des gestes concrets, sans oublier le credo sur le manque de volonté du personnel quant à l'implantation de pratiques durables. Au demeurant, les voyageurs sont en réalité bien d'accord pour aller dans le sens du vert, si cela ne leur "coûte" pas: ni en confort, ni en temps, ni en énergie supplémentaire pour assurer leurs déplacements d'affaires. Et compte tenu des bilans carbone à faire, pour la plupart des entreprises l'heure est à la prise de conscience. "Nous nous devons d'intégrer les attentes durables de nos voyageurs dans la politique voyage de l'entreprise", affirme ainsi Abdelaziz Bougja, patron du travel chez Veolia et Vice Président de l'Association Marco Polo qui publiera précisément dans quelques jours le Guide des bonnes pratiques en matière de déplacements professionnels. "On ne peut pas négliger la demande, ni même éluder le sujet tant il est évident que l'entreprise se doit d'être en avance sur ces sujets", conclut Abdelaziz qui précise en souriant "Le durable, ce n'est pas une mode, c'est une autre vision de notre relation à la nature qui nous entoure".

1 - Penser durable, agir durable

Inutile de se lancer dans des grands projets qui ne verront pas le jour. Autant faire petit et simple, mais efficace. C'est le conseil de tous les experts qui affirment qu'une multitude de petits projets est bien plus efficace qu'un seul gros, suivi par peu de monde. A ce niveau, les idées ne manquent pas : limiter l'impression du carnet de voyage au profit d'un PDF téléchargé sur le smartphone, regrouper les déplacements sur place, réserver les navettes communes, publiques ou privées, plutôt que des taxis individuels pour aller à la gare ou l'aéroport. Bref, la liste des bonnes résolutions faciles à prendre est sans fin. Pour ne pas en oublier, plusieurs entreprises ont même créé des comités de réflexion ou toutes les bonnes volontés sont les bienvenues. Organisées après le temps de travail, ces réunions d'une heure maximum permettent de dresser la chek-list des projets durables que l'entreprise peut assurer sans perturber son fonctionnement.

2 - Partager doit devenir la règle de base

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Pourquoi faire tout seul ce qui peut être partagé ? Cette règle, basique dans l'univers des déplacements professionnels, est celle qui conduit naturellement à l'auto-partage ou au covoiturage. Soyons francs, tous les exemples ne sont pas forcément des réussites et créer un site internet dédié ne suffit pas à assurer le succès de l'opération... Pas plus qu'insérer un ou deux articles sur l'intranet de l'entreprise. Partager demande des efforts importants. En Suisse, des entreprises comme Nestlé ont créé des "tables du partage". Installées à l'entrée du restaurant d'entreprise, elles permettent à des employés volontaires d'expliquer le principe du covoiturage et d'aider leurs collègues à trouver un ou plusieurs partenaires pour les trajets de base entre le domicile et le lieu de travail. A l'heure où l'essence augmente en permanence, le discours passe incroyablement mieux. Ecologie rime avec écologie, mais aussi convivialité. Et l'habitude prise pour les déplacements quotidiens infuse progressivement les déplacements d'affaires. Définitivement, l'engagement prime sur la communication froide et sans âme. Richard Branson, le patron de Virgin, a été le premier à s'impliquer pour vanter les qualités écologiques de ses entreprises... Y compris de sa compagnie aérienne !

3 - Analyser pour optimiser

Il n'y a rien de pire qu'une débauche de moyens mis en place par facilité plus que par efficacité. Il vaut mieux perdre une heure et atteindre un réel résultat écologique pour son déplacement. Choisir une compagnie aérienne sans escale (atterrissages et décollages sont couteux en énergie et en production de CO2), privilégier celles qui mettent en place des descentes douces... Et privilégier le train pour tout trajet domestique raisonnablement possible. Autant de pistes qui permettent de limiter les conséquences d'un voyage sur la planète.
La réflexion doit ensuite se porter à tous les niveaux du voyage. Mon hôtel est-il engagé dans la gestion énergétique ? Puis je louer une voiture électrique pour mes déplacements urbains ? Quelles sont les solutions collectives pour se déplacer dans la ville qui m'accueille ? Plusieurs entreprises européennes intègrent désormais dans leur SBT des pastilles de couleur qui précise l'engagement écologique du produit présenté. Un must.

4 - Communiquer par l'exemple

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Montrer et donner l'exemple sont les deux mamelles d'un projet d'entreprise, qu'il soit "vert" ou non. Il en va de même dans l'univers du voyage où chaque décision en faveur du durable est un effort à faire pour en montrer les bienfaits. Aux USA, plusieurs dizaines de sociétés, dont Microsoft, ont décidé de prendre en charge le montant de la compensation aérienne de deux voyages annuels de leurs salariés. Charge au voyageur de décider s'il complète ou non, à hauteur de 20 $ maximum. Le projet ainsi financé a été choisi par toute l'entreprise qui en suit les évolutions, obtient des résultats et constate clairement le résultat de l'effort financier de compensation réalisé par l'entreprise. Autre exemple en Allemagne, où chaque euro économisé sur un voyage permet de récolter 10 centimes versés à une organisation choisie par toute la société. Chaque voyageur dispose d'un budget de base, à lui de trouver moins cher. On a vu des voyageurs faire le choix d'une classe éco alors qu'ils avaient la possibilité de faire le trajet en business ! Le gain pour l'ONG justifiait pour eux cet effort.

5 - Bénéficier de la confiance et de la volonté du top management

Inutile de parler de déplacements durables si la tête de l'entreprise n'est pas convaincue du bien fondé des idées avancées. C'est d'en haut que partiront les décisions essentielles. C'est de là qu'elles iront vers les différents services. Mais attention, pour qu'un dossier soit accepté par la direction, il faut qu'il soit bien ficelé. Inutile de dérouler une longue liste de lieux communs. Chaque décision doit être analysée et pesée. Elle doit avoir un retour sur investissement mesurable et dont la finalité apporte un réel bénéficie à l'entreprise, que ce soit pour son rapport annuel Développement durable (si elle figure au CAC 40), en terme d'image globale ou de qualité de vie au travail.
Chaque projet défendu doit être mesuré dans le temps, dresser des hypothèses de réussite et d'échec, donner une vision de son apport réel dans l'entreprise. Autre point à travailler : comment exploiter le choix retenu. En interne ? En externe ? Quelles sont les valeurs qu'il porte et comment sera t-il perçu ? Avant de monter à la direction, il faudra donc prendre la température de tous les échelons de l'entreprise. Que ce soient l'équipe de travel management, les voyageurs comme les syndicats, tous doivent être porteurs de l'idée que vous irez défendre à votre hiérarchie. Indispensable: le soutien du service de communication, lorsque l'entreprise en dispose.
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