Distribution : Un monde standardisé qui génère de nouvelles opportunités pour la chaîne de valeur

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Des changements majeurs dans le développement des produits et services et dans la façon dont ils sont proposés au voyageur sont en train de s’opérer. Les fournisseurs, compagnies aériennes en tête, cherchent à tisser une relation plus riche avec le voyageur. Au-delà des considérations commerciales, il y a de réels bénéfices à ce que la distribution des offres soit simplifiée, et ce, pour l’ensemble de la chaîne de valeur. Cela passe notamment par la technologie et l’adoption de standards.

Moderniser la distribution. C’est la mission que s’est donnée l’écosystème du Travel. Comment ? En élaborant des standards de messages informatiques pour encourager l’innovation, la personnalisation et la reconnaissance des marques à travers un process de shopping simplifié. En d’autres termes, des langages informatiques unifiés pour le contenu air, hôtel, etc. Tout cela avec l’ambition de le rendre disponible sur tous les canaux de distribution en temps réel, quel que soit le modèle de distribution associé.

Si le secteur de l’aérien a été précurseur en inventant le concept d’e-commerce dans une ère pré-Internet (les GDS), tout est dit : il s’agit d’une technologie ancienne qui par définition engendre un certain nombre de limitations. Rappelons que les GDS ont été créés par et pour les compagnies aériennes, mais dans un environnement régulé et réglementé bien loin de la concurrence et de l’hyper connectivité qui dominent le marché aujourd’hui. Nous ne reviendrons pas sur la révolution du web qui explique le fossé entre les outils BtoB et les sites web des compagnies aériennes. Aujourd’hui, les compagnies aériennes cherchent à mettre en avant leur proposition de valeur. Routehappy a bien compris leurs problématiques : l’acteur technologique fournit aux compagnies aériennes une infrastructure qui est une source unique de contenu riche et différencie toutes les offres de manière à ce que les consommateurs sachent ce qu'ils achètent.
D’après Robert Albert, CEO de Routehappy by ATPCO, cela semble simple, mais c'est un problème assez compliqué à résoudre : chaque vol, chaque cabine, chaque siège, chaque service ancillaire, chaque billet d'avion exige un contenu riche (descriptions, photos, bénéfices associés, restrictions) pour avoir une compréhension de base de l'expérience de vol. « Nous construisons cet ensemble massif de contenu et devons être en mesure de le fournir à tous les canaux sous une forme standard », explique t-il. Routehappy a développé deux normes de contenu riche : UPA (Universal Product Attributes) et UTA (Universal Ticket Attributes). Ce sont des moyens standards pour les compagnies aériennes d'identifier leurs offres et pour les distributeurs d’agréger leur contenu. Robert Albert poursuit : « L'un des principes clés chez Routehappy est d’être agnostique en termes de canaux, de plateformes et de méthodes de livraison de contenu. Cela signifie diffuser notre contenu via toute méthode de distribution incluant celle de longue date comme les GDS, mais aussi nous assurer que notre contenu soit conforme aux dernières avancées de la distribution comme NDC. »

D’ailleurs, NDC se développe. IATA vise la masse critique, portée par le « NDC Leader board airlines » récemment formé. D’ici 2020, 21 compagnies aériennes qui pèsent 30% du total des passagers IATA ont l’ambition de contribuer à l’objectif commun de l’industrie qui est de réaliser 20% de leurs ventes indirectes via une API reposant sur NDC ! Par ailleurs, 2018 fut un tournant concernant l’adoption du standard avec l’implication active d’Amadeus, Sabre, Travelport et de certaines TMC. Les bénéfices du standard deviennent tangibles. Heike Birlenbach, Senior Vice President Sales Lufthansa Group Hub Airlines et CCO du Hub Frankfurt, a annoncé lors de Phocuswright Europe que l’API NDC de la compagnie aérienne était connectée à 35 fournisseurs IT, lui donnant accès au marché des agences de voyages et des TMC. Et de lancer un message à l’industrie : « Il est question de partenariats. L’aventure vient tout juste de commencer. »

Une alliance pour les réunir tous

Au-delà de l’aérien, l’interopérabilité entre l’ensemble des prestataires de voyages est un objectif porté par Open Travel Alliance, une association à but non lucratif fondée en 1999 par des entreprises du Travel. Elle a pour mission principale de créer des structures de messages électroniques pour faciliter la communication entre les différents systèmes de l'industrie du voyage au niveau mondial. Brian Bell, Executive Committee Board Member, Secretary de Open Travel Alliance et Président & CEO de Links Rez, rappelle la problématique : « Avant les normes Open Travel, beaucoup de temps et d'efforts étaient consacrés à la connexion et à la maintenance des messages propriétaires avec chaque partenaire commercial. La norme Open Travel permet l'utilisation d'un ensemble de messages communs à tous les partenaires commerciaux, accélérant ainsi la mise sur le marché, ce qui accroît l'efficacité du maintien des connexions tout en réduisant les coûts. » Et d’ajouter : « Les normes OpenTravel sont très largement adoptées dans l'industrie du voyage. »
L’alliance Open Travel regroupe des sociétés représentant des compagnies aériennes, des loueurs de voitures, des hôtels, des croisiéristes, des compagnies ferroviaires, des tours-opérateurs, des vendeurs d’excursions, des agences de voyage, des sociétés technologiques et des distributeurs. Brian Bell affirme que chaque jour, des dizaines de millions de messages sont échangés entre partenaires commerciaux et précise : « Open Travel est un standard ouvert et fournit un cadre dans lequel toutes les entreprises de la chaîne d'approvisionnement de la distribution électronique peuvent travailler ensemble avec l'objectif commun de créer une structure acceptée pour les transmissions électroniques utilisant les messages standardisés. » Quant aux bénéfices pour le secteur du voyage d’affaires, Brian Bell est d’avis que « cela permet aux fournisseurs et aux distributeurs de parler le même langage d'interopérabilité, de partenaire commercial à partenaire commercial. Les consommateurs quant à eux bénéficient d'un accès à davantage d'options plus stables, facilitant ainsi leurs recherches et la réservation de voyages, d'excursions et d'activités. »

Les prémices d’une véritable révolution

L’étape suivante ? ONE Order. C’est le concept d'un référentiel unique contenant l’ensemble des données obtenues et requises pour l'exécution des services par les prestataires (NDLR : « order » signifie commande). Ceci englobe les données clients, les services/produits réservés et les informations de paiement et de facturation. Le standard utilise les avancées en matière de communication de données rendues possibles par la mise en œuvre de NDC. ONE Order entraînera en outre la disparition progressive de multiples références de réservation (vol, hôtel, voiture…) au profit d’une référence unique. Pour les fournisseurs, ONE Order entraîne un process de distribution et de gestion unifié, simplifié et plus agile. Il y a fort à parier que l’on ne se soit qu’aux prémices d’une véritable révolution dans le paysage de la distribution. A suivre de près !
Cette interview est issue du MOOK #2, plus d’infos ici

Propos recueillis par Aurélie Krau.