Faire et défaire, c’est toujours du chemin de fer !

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«Le train et les Français, c’est une histoire d’amour et puis qui aime bien châtie bien (…), la pression est sur nous tous les jours, c’est tout à fait normal quand on est une entreprise qui appartient à tout le monde (…) » (*) Il est vrai que la SNCF, qu’on l’aime ou qu’on la déteste, on peut difficilement s’en passer. Elle fait partie du quotidien de chacun. Le regard tourné vers la nouvelle année, est venue la saison des rétrospectives. Nous vous proposons de remonter ici le temps de cette année SNCF 2014. Des airs de citadelle assiégée.

6 janvier
Coup bas. Sitôt la trêve des confiseurs terminée, c’est par une accusation de racisme que l’année commence pour SNCF (**). Le site Médiapart, cite des sources internes et laisse entendre que l’entreprise publique le sait, le reconnait mais laisserait faire.
 
8 janvier

Expertise. Dans un premier rapport, les experts judiciaires chargés d’enquêter et d’analyser sur la catastrophe de Brétigny pointent du doigt plusieurs négligences sur le réseau ferroviaire, la vétusté du matériel et l’aspect aléatoire ou léger des opérations de maintenance.
 
12 janvier
Injonction. Les pouvoirs publics exigent de SNCF que soit tiré «sans attendre» les conséquences du rapport du Bureau Enquête Accident (BEA) qui, saisi dans le cadre de la catastrophe de Brétigny, met en cause la qualité des tournées visuelles de surveillance.
 
20 janvier
Classement. Palmarès 2014 de la relation client (groupe HCG) : SNCF classée 107ème (sur 200). Ce n’est pas si mal après avoir été précédemment avant-dernier du classement.
 
21 janvier
Bons vœux. Lors de ses vœux à la presse, Guillaume Pepy indique que le résultat de SNCF aura été négatif en 2013. Objectifs immédiats pour 2014 : mener à bien les nombreux travaux sur les infrastructures (causes de perturbations sur le réseau) et faire baisser les coûts pour produire puis vendre moins cher. Une obsession : se préparer à la concurrence.
 
Du 21 au 23 janvier
Cabane sous le chien. Très grosses perturbations sur le réseau de Saint Lazare en raison d’un droit de retrait par les conducteurs de train. L’un d’eux venait d’être agressé en demandant à des fumeurs présents sur le quai d’éteindre leur cigarette. Dans la foulée, SNCF devait annoncer une tolérance dorénavant zéro pour faire respecter l’interdiction de fumer dans les gares et les trains. Guillaume Pepy annonça également son souhait de réglementer davantage et de faire évoluer l’usage du « droit de retrait ». Volée de bois vert de ses partenaires sociaux en guise de réponse.

29 janvier
Bulletin de santé. SNCF présente le bilan de trois années de plan d’action sur ses « lignes malades ». Bilan globalement encourageant, juge l’entreprise. 10 des 12 lignes ciblées affichent moins de retard qu’en 2010.

10 février
Objectif. Un an qu’on en entend parler. L’équipement des gares en Wifi gratuit, c’est lancé ! Objectif : 100 gares équipées d’ici fin 2014. Et encore 28 de plus en 2015.
 
11 février
Bons comptes. La Cour des comptes épingle SNCF à propos de l’avantage que constituent les « facilités de circulation ». Lire les titres de transport délivrés gratuitement au personnel en activité, aux retraités, à leurs ayants-droits (conjoint, ascendants, descendants) et accessoirement à quelques autres bénéficiaires triés sur le volet (certains haut fonctionnaires chargés de la tutelle et du contrôle de l’entreprise publique). Sujet identitaire, historique, sensible, commun à toutes les entreprises ferroviaires, nécessitant de prendre le temps de la concertation pour examiner de possibles évolutions, répliqua immédiatement Guillaume Pepy.

12 février
Incompatible. Le Parlement européen propose de repousser l’ouverture totale du marché ferroviaire à 2023 (au lieu de 2019). Avec faculté pour chaque Etat membre d’anticiper s’il le souhaite. Et la commission Transport du Parlement de souligner au passage que la réforme en cours du système ferroviaire français n’est pas euro-compatible.

13 février
Perte. Confirmation d’une perte nette de 130 millions d’euros en 2013. La dette de l’entreprise s’est néanmoins réduite de 131 millions. Elle s’établit à 7,4 milliards d’euros en fin d’exercice.

14 février.
Pieds dans le plat. Guillaume Pepy : "Il faut retravailler les dessertes du TGV, dont un tiers sont déficitaires. Dans certaines régions, les TGV s'arrêtent plus que les TER. Il faut mettre de l'ordre dans les dessertes". Que ceux qui sont d’accord, lèvent le doigt !

11 mars
Manifeste. Les régions revendiquent plus de liberté sur les services TER, davantage de performance et une baisse des coûts. Position soutenue par la FNAUT (Fédération Nationale des Associations d’Usagers des Transports).
 
3 avril
Visée. La Cour de justice de l’Union Européenne considère que la garantie financière illimitée accordée par l’Etat à un établissement public à caractère industriel et commercial (EPIC) est illicite.

24 avril
Des hauts, des bas. Le chiffre d’affaires de SNCF a progressé de 1,7 % au premier trimestre. Toutefois, le nombre de passagers transportés recule de 0,6 %.

21 mai
Polémique. Les nouvelles rames commandées pour les TER sont trop larges pour les quais. Il va falloir raboter ces derniers. Il faudra plusieurs jours pour que le soufflé retombe. SNCF et RFF expliquent que les normes internationales sur le matériel roulant destiné aux voyageurs ont changé (notamment pour améliorer l’accessibilité des personnes à mobilité réduite). Le réseau étant ancien, les largeurs de quais sont disparates et localement inadaptées à ce nouveau matériel. Le Gouvernement demande une enquête. Celle-ci conclura à l’absence de dysfonctionnement majeur mais soulignera un manque de communication et de coordination entre RFF et SNCF. Pas d’erreur dans les commandes passées mais une découverte tardive de cette incompatibilité en certains points du réseau ferré. Promis, cela ne doit plus se reproduire !

22 mai
Protestation. Les syndicats CGT, UNSA et SUD manifestent à Paris contre le contenu de la réforme ferroviaire. Un tour de chauffe. Le pire pour les voyageurs sera rapidement à venir.

9 juin
Accablée. Catastrophe de Brétigny. Un expert indépendant accable SNCF dans un premier rapport remis aux trois juges d’instruction d’Evry et met en avant ce qu’il qualifie de  maintenance erratique des voies. SNCF ne commente pas, disant ne pas avoir eu accès à ce rapport destiné à l’instruction judiciaire.
 
10 juin
Illimitée. Grève reconductible contre la réforme ferroviaire à l’appel de CGT et SUD. Elle ne terminera totalement que le 24 juin. Démarrée avec un taux de participation de 30 %, elle se terminera (plus exactement, sera suspendue) à 12 % (mais avec quand même un sur quatre des personnel d’exécution et 10 % de l’encadrement de proximité).

23 juillet
Compliqué. Le Conseil d’Administration du groupe SNCF étudie trois scénarios à dix ans pour reconstituer un modèle économique pour le TGV. Repli sur un réseau noyau de 40 gares (soit 80 origines ou destinations au lieu des 180 combinaisons actuelles).  Baisse de prix de 10 à 20 % pour doper le taux de remplissage mais il manquerait alors 400 millions de recettes par an pour atteindre l’équilibre ! Augmenter la productivité pour gagner un point de marge par an pendant 10 ans. Un peu de tout ça sans doute. Les négociations avec la tutelle de l’entreprise et la mesure de l’acceptation sociale et politique des mesures que ces scénarios contiennent sont lancées. Que ceux qui sont d’accord lèvent le doigt (bis repetita).

4 août
Réunification. La loi sur la réforme ferroviaire est définitivement adoptée par l’Assemblée Nationale. En lieu et place de SNCF qu’on connaissait bien et de RFF qu’on connaissait mal, il va falloir se familiariser avec le G.P.F. (Groupe Public Ferroviaire SNCF, un et indivisible) et ses deux établissements SNCF Réseau et SNCF Mobilités.

21 août
Convocation. SNCF et RFF devant les juges d’instruction chargés d’enquêter sur la catastrophe de Brétigny.

9 septembre
Priorité stratégique. Nouveau Secrétaire d’Etat aux Transports (et à la Mer et à la Pêche), Alain Vidalies annonce un plan d’action pour la sécurité du système ferroviaire et enjoint SNCF et RFF de faire de la maintenance des infrastructures une priorité stratégique.
 
11 septembre
Sauvegarde des recettes. SNCF prépare un plan anti-fraude. Parmi les pistes envisagées : fin de l’accès libre aux quais du TGV et des amendes plus élevées et dissuasives en cas de défaut de titre de transport valable.

18 septembre
Mise en examen. Catastrophe de Brétigny : SNCF mise en examen pour homicide et blessures involontaires. L’avant-veille, RFF avait fait l’objet de la même décision judiciaire.

2 octobre
Sanction. L’Autorité de la concurrence sanctionne la SNCF pour pratiques abusives dans le secteur de la distribution des billets de trains. SNCF prend 13 engagements pour que les agences de voyages aient les mêmes facilités techniques et commerciales que celles qu’elle accorde à sa filiale Voyages-sncf.com.

23 octobre
Au rapport !  Selon la Cour des comptes qui n’y va pas par quatre chemins (de fer), le TGV c’est de la gabegie, de la gestion incohérente et c’est trop cher.

24 octobre
Fuite. Un plan secret pour redresser les comptes de la SNCF sort dans la presse. Dans le collimateur : les voyageurs d’affaires. C’est leur entreprise qui paye et donc ils sont normalement moins regardants. Le MEDEF n’a pas été le dernier à s’en émouvoir.

30 octobre
Des plus et des moins. Le chiffre d’affaires du groupe SNCF a progressé de 1,3 % pendant les 9 premiers mois de l’année, grâce notamment au développement à l’international porté par Keolis. L’activité TGV est toujours en recul (-1,5 %, en cause l’augmentation de la TVA de 3 %, non répercutée sur les prix de vente).
 
5 décembre
Queue de conflit. CGT et SUD provoquent quelques débrayages et perturbations dans le cadre d’un préavis de grève, surtout parmi les contrôleurs.

9 décembre
Transparence. SNCF publie les résultats de son enquête interne « Voie libre, modernisons notre sécurité ». 96 % des cheminots considèrent la sécurité comme une priorité dans leur métier mais il arrive à  13 % d’entre eux de ne parfois pas appliquer à la lettre les procédures.

PAT

(*) Guillaume Pepy, Président de SNCF, cité dans l’introduction de « 130 lettres caustiques et cocasses à la SNCF » (Editions La Vie du Rail).
(**) On ne doit plus dire la SNCF mais SNCF sans article. Nous allons essayer !