Harmonisation sociale à la SNCF : les grandes batailles sont engagées

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Pas contents, les nouveaux entrants européens du rail qui réfutent la demande de Guillaume Pepy de voir le statut des futurs cheminots privés calqué sur celui de la SNCF. «Une attitude provocante et très éloignée de la réalité économique actuelle», précise même l’AFRA, l’Association Française du Rail dans une lettre ouverte publiée le 28 février dernier.

Pour les membres de cette structure qui regroupe tous les concurrents européens de la SNCF, il faut aujourd’hui s’opposer aux monopoles divers et variés de la société ferroviaire nationale. Et c’est là, sans doute que se porteront les premiers combats de la privatisation du rail. Un enjeu de taille. Inutile d’ailleurs de demander à la DB ce qu’elle pense du statut des cheminots français. Officiellement, personne n’en parle. Mais dans le calme d’un couloir, vous apprendrez vite que ce statut est loin d’être favorable à la concurrence. «Imaginez que les cheminots du secteur ferroviaire privé puissent bénéficier de tous les avantages de ceux, aujourd’hui fonctionnarisés, de la SNCF? Ce serait un coup fatal porté à l’ouverture du rail», explique mon interlocuteur qui reste persuadé que les hausses de la SNCF sont le résultat de mauvaises négociations sociales. «Trop de personnels, trop d’avantages, peu de productivité, peu d’innovation», poursuit notre spécialiste.
Cela veut-il dire que le poids du statut de cheminot est responsable des difficultés de la SNCF ? Il serait naïf de le croire. Certes, les cheminots disposent d’avantages mais dont le poids financier a toujours été jugé raisonnable par les présidents de la SNCF. Non, ce qui serait sans doute responsable de cette situation difficile, c’est le maillage ferroviaire de notre pays qui va bien au-delà du raisonnable. La décentralisation conduit les présidents des Conseils Régionaux à vouloir des TGV partout. Dans un pays d’à peine 1100 km dans sa plus grande largeur : 3 heures 15 de TGV suffisent pour le traverser. A condition d’avoir les lignes. C’est là que se complexifie la situation. Là que se trouve le nœud du problème. L’AFRA s’est-elle engagée dans un mauvais combat ? Certainement pas. Chaque entreprise veut avoir la liberté de sa gestion sociale et l’accès à une convention collective qui lui soit, plus ou moins, favorable. C’est tout l’enjeu de ce qui se discute aujourd’hui… En silence. L’Europe du rail devrait naître dans la douleur. Mais qui souffrira le plus ?

Marcel Lévy