La GBTA France devient elle une association de fournisseurs, au détriment de l’acheteur ?

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Décidément, la création de la GBTA France est une lente descente programmée vers l'univers des fournisseurs. Une orientation bien éloignée de la volonté d'achat manifestée lors de la création de la structure. Mais au delà, la finalité même de la nouvelle association pose questions.

Connu pour sa neutralité et son engagement quant à la défense de la position des acheteurs dans l’entreprise, Yann le Goff (à l'origine de la GBTA France) a toujours voulu une structure simple à but non lucratif. C’est ainsi que depuis deux ans, l'association s’est peu à peu développée lançant même sur le marché Français le fameuse formation CTE (Corporate Travel Expert) destinée à initier les non professionnels aux arts et astuces de ce marché de niche. Force est de constater qu’il y a désormais une descente vertigineuse vers l'univers des fournisseurs avec comme point d’orgue, le fait que la GBTA Europe n'a pas souhaité maintenir la structure associative de la loi de 1901 ! Sans forme juridique en France, tout se gère maintenant à Londres, y compris les cotisations qui doivent être réglées en Grande Bretagne. En Euros ou en livres sterling ! Mais au-delà, la finalité même de la nouvelle organisation pose questions. Pourquoi tant de membres "Mice" au board ? Quand on sait que 5% des dépenses du voyage d'affaires concernent ce marché, on s'en étonne.

Se structurer principalement autour de fournisseurs pour "ouvrir la chasse aux TM", comme le disait un acheteur il y a quelques années en évoquant un événement associatif annuel... ? La GBTA France, loin d'innover, semble s'engager sur la voie de la "finance à tout prix". A l'exception du Directeur des achats du Voyage chez Cap Gémini, on retrouve pèle-même la Directrice d'un salon prestigieux consacré au Mice, quatre fournisseurs, un informaticien (?) sans oublier la Directrice Générale Adjointe, CWT Meetings & Events France ainsi que la Responsable des Achats Réunions et Evénements France de Sanofi. Le tout sur fond de cotisation de 250 € pour les acheteurs (270 € pour les fournisseurs). Et pour diriger l'ensemble, Carole Poillerat, Présidente par intérim. Elle est la Directrice des Achats Groupe Meetings & Events, AstraZeneca.

Et au final, à quoi cela va t-il servir ? Pour l'avoir écrit il y a quelques années, avec le lot de fâcheries qui l'a accompagné, je crois très sincèrement qu'une association qui s'appuie sur l'argent des fournisseurs perd son indépendance, quoiqu'elle en pense ! Pire, pour moi, elle quitte la neutralité attendue des acheteurs pour s'engager dans un "affectif économique" difficilement maîtrisable. Nous l'avons vu il y a quelques mois, avec d'amicales pressions sur un TM de la part d'un grand financier du mouvement associatif. Et l'inverse existe : "Ne pas cracher au bassinet associatif peut vous coûter des clients", m'expliquait un jour un fournisseur, aujourd'hui réconcilié avec ces structures. Il participe à tout ce qui bouge dans le domaine.

Au delà, de l'argent pourquoi faire ? Pour se donner le sentiment d'être important ? Pour payer des frais quotidiens de structure que l'on peut aisément réduire ? Pour devenir organisateur d'événements où l'on croise plus de fournisseurs que d'acheteurs ? Est ce réellement la finalité politique d'une association ? Comment écrire "honnêtement" sur l'action d'un "fournisseur" si l'intéressé finance l'avenir de la structure. L'exemple de la Norvège ou de la Suède est intéressant. Dans les pays du Nord, des associations se sont créés en établissant un business plan serré qui, une fois établi, permet de décider si elles doivent ou non accepter de l'argent des fournisseurs.

Bref, aujourd'hui et en l'état, la GBTA France n'apporte rien de très nouveau dans l'univers associatif. Dommage !

Marcel Lévy