La SNCF devant la justice pour discrimination

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Plus de 800 cheminots de nationalité ou d'origine marocaine demandent réparation à la SNCF. N'ayant pas été engagés sous le statut cheminot en raison de leur nationalité, ils estiment avoir été victime de discrimination durant leur carrière. Le tribunal va examiner leur dossier cette semaine.

Le bras de fer entre la compagnie ferroviaire et les "Chibanis" (cheveux blancs en Arabe) de la SNCF a débuté en 2005. Ces 849 employés de nationalité ou d'origine marocaine ont principalement été recrutés au Maroc au début des années 70. N'ayant pas la nationalité française, ils n'ont pas été embauchés en tant que cheminots mais comme contractuels. Ils dépendaient ainsi d'un contrat de droit privé et ne pouvaient pas bénéficier des avantages du statut de cheminot en matière de protection sociale et de retraite par exemple. L'un de leurs avocats, Me Olivier de Boissieu, explique qu'ils «ont travaillé dans des conditions difficiles, faisaient exactement les mêmes tâches que leurs collègues français au statut mais ont vu leurs carrières bloquées et ont eu des retraites moindres». Sa consœur Clélie de Lesquen-Jonas ajoute qu'ils «ne remettent pas en cause le statut», ils demandent l'application du principe «à travail égal, salaire égal». Elle précise que «les deux tiers des cheminots au statut finissent agents de maîtrise» alors que les Marocains ont été condamnés statutairement «à rester des agents d'exécution».

Ben Dali, 63 ans, l'un des porte-parole de l'association des cheminots marocains, le souligne: «On n'a pas été traités à égalité. Je ne peux pas m'empêcher de ressentir un sentiment d'humiliation». Les différences entre ces salariés et leurs collègues cheminots sont également visibles à l'heure de la retraite. Les plaignants assurent avoir des retraites moindres malgré des durées de cotisation souvent plus importantes. Ils réclament ainsi en moyenne 400 000 euros de dommages et intérêts dont la moitié au titre du préjudice de retraite.

De son côté, la SNCF conteste ces calculs et nie avoir eu des pratiques discriminatoires entre les salariés de même qualification. L'entreprise a présenté un «panel» de comparaison de «plus de 1.000 agents» pour prouver ses dires. Son avocat, Me Jean-Luc Hirsch, ajoute qu'«on compare l'incomparable (...) la SNCF, entreprise publique, a deux statuts pour ses salariés, la loi le prévoit comme ça».
Les dossiers vont être étudiés par un juge professionnel jusqu'au 27 mars car les conseillers prud'homaux ne sont pas parvenus à se mettre d'accord. Le jugement devrait être mis en délibéré.