La fin annoncée du Travel Manager

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Ce n'est pas la première fois que nous abordons ici ce sujet, encore sensible dans les entreprises. Pourquoi y revenir ? Tout simplement parce que l'arrivée de fonctions nouvelles en matière d'achat de voyages commence à se faire sentir aux États-Unis et dans les pays anglo-saxons. L'acheteur a pris le pas sur tout autre dénomination. C'est le cœur même du travel management qui est secoué par une vision plus serrée de la relation entre une entreprise et ses fournisseurs.

En France, il est intéressant de constater que la plupart des fonctions liées à la gestion du voyage d'affaires sont désormais orientées dans le monde des achats. Mais au-delà, c'est la structure même des services qui évolue. Dans un article récent des Échos, consacré à la Twizy de Renault, une mention a retenu mon attention, celle évoquant la fonction d'Hélène Billon, France Telecom/Orange, présentée comme la directrice "Business Travel", autant dire une vision avancée du mobility management. Pour l'avoir rencontré, je sais qu'elle est vient du contrôle de gestion, l'un des éléments clés des nouvelles fonctions qui apparaissent dans l'univers du voyage d'affaires. Il est vrai, et on le constate quotidiennement, qu'un acheteur est formé à la rigueur et à la négociation. Deux missions éloignées de toute considération affective.
Toujours en France, on constate que la fonction "Travel Manager" disparaît lentement mais sûrement des fiches de paye, au bénéfice d'un qualificatif plus proche des achats. Et ces fameux acheteurs ont une mission toujours plus tentaculaire, couvrant les besoins productifs et hors production de l'entreprise. Le voyage devient un produit comme un autre, simplement soumis à des avis d'experts, des consultants extérieurs qui vont construire l'enveloppe que l'acheteur remplira en fonction des spécificités et de la culture de l'entreprise. A priori, rien de bien surprenant à une époque où le prix et la capacité de réduire le coût sont devenus les deux pièces maîtresses du Travel Management. Au-delà, il est clair que c'est toute une formation professionnelle qui devra s'adapter. Non pas aux seules spécificités des compagnies aériennes ou ferroviaires que tout acheteur sait anticiper et moduler, mais aussi en intégrant la gestion affinée des dépenses engagées au titre des déplacements professionnels, donc des investissements. Cette nouvelle vision du poste va-t-elle profondément modifier la relation avec les fournisseurs ? Sans aucun doute. Certains s'y préparent déjà et d'autres commencent doucement à comprendre là où les clients vont les conduire. Seule la capacité à anticiper la vision d'un acheteur ou à lui opposer la qualité d'un service réellement utile fera sensiblement la différence ces prochaines années. L'acheteur, comme l'a toujours été le policier pour le gangster, se devra d'être sans cœur, sans amis, sans état d'âme et sans aucune vision prédéfinie de ce qu'il doit acheter. Tout l'inverse de ce qui existe aujourd'hui.

Marc Dandreau