La richesse du transport aérien français

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Savez-vous qu’il existe 43 compagnies aériennes françaises à disposer d’un CTA (Certificat de Transport Aérien), autrement dit qui sont autorisées à vendre du transport aérien en vols réguliers ou non ? Avant de vérifier cette information, j’aurais été bien en peine d’en citer plus de 10. Certes, beaucoup d’entre elles sont basées dans les îles ou les DOM/TOM, c’est le cas de 13 d’entre elles. Le groupe Air France, à lui seul, en contrôle directement ou indirectement 5 et ce sont d’ailleurs parmi les plus importantes.

La richesse du transport aérien français
Il reste que 25 transporteurs indépendants sont enregistrés en Métropole seulement. Ils y font un travail souvent méconnu, je veux en particulier parler des compagnies régionales qui desservent quelques lignes seulement, mais combien utiles pour les collectivités locales intéressées. Donnons une mention particulière à Chalair, Twin Jet et HexAir qui ont repris le flambeau du transport régional, florissant dans les années 1970.

La situation de ces compagnies n’est pas facile. Elles opèrent des avions de capacité réduite, la plupart du temps des Beech 1900 de 19 sièges et ces derniers sont très onéreux à exploiter : il faut en particulier utiliser deux pilotes soit un pour 10 sièges alors que les Airbus 320 par exemple en ont un pour 80 sièges. On voit bien la difficulté de l’exercice qui consiste à fournir une prestation d’un niveau de fiabilité identique à celui des plus grands transporteurs, tout en restant compétitifs sur des axes à très faible trafic.

Pour tout dire, je pense que les mérites de ces petites compagnies ne sont pas reconnus à leur juste valeur et qu’elles ne sont pas utilisées au mieux des intérêts économiques nationaux et régionaux. Petit à petit, nous avons perdu le maillage aérien qui, seul, permettait une vraie décentralisation, non pas vers les grandes agglomérations, mais vers les petites communautés. Il est paradoxal d’avoir amené partout en France de formidables moyens de communication électroniques : les portables passent sans difficulté et Internet est accessible dans les coins les plus reculés, et d’avoir concentré la capacité d’accès rapide des entrepreneurs aux seules grandes métropoles. A quoi cela sert-il d’amener des outils formidables à Mende ou à Marvejols si les chefs d’entreprise ne peuvent installer une activité faute de moyens de transport ?

Le transport aérien régional français vit encore sous un régime dit d’OSP (Obligations de Service Public) qui date de la fin des années 1970. Le monde entre temps a changé considérablement et la géographie française a été fortement transformée par le TGV. La voie terrestre a gagné son combat contre le transport aérien pour tous les trafics volumineux dans le cas de destinations de moins de 3 heures, ce qui couvre la quasi-totalité du territoire. C’est parfait pour les grandes villes voire même les villes moyennes qui disposent d’une ramification TGV, c’est le cas de Saint Etienne, de Nîmes ou d’Angoulême pour n’en citer que quelques-unes, mais la conséquence a été la suppression des services aériens qui sont certes plus chers en exploitation, mais beaucoup plus rentables si on intègre les amortissements infiniment plus légers pour l’aérien que pour le ferroviaire.

Il est urgent de repenser le schéma aéronautique français et plus particulièrement métropolitain. Le système des OSP doit être revu pour un processus plus souple et, surtout, qui permette aux collectivités locales d’acheter elles-mêmes leurs heures de vol auprès de transporteurs après appels d’offres. Les entrepreneurs privés qui opèrent les compagnies mentionnées plus haut n’ont aucun intérêt à faire du service public à leur propre risque. Ils seraient par contre tout à fait prêts à proposer leurs services et leur expertise à des collectivités prêtes à leur acheter leurs heures de vol. Ils disposent de systèmes de distribution parfaitement insérés dans le monde entier, ils sont capables de collecter l’argent dans tous les pays de la planète et seraient sans doute tout à fait d’accord pour mettre ces capacités au service des collectivités économiques qui deviendraient leurs clients.

La France dispose encore d’un grand savoir-faire aéronautique. Elle est en train de perdre la bataille du moyen-courrier au profit de transporteurs «low cost» qui sont tous étrangers. Les transporteurs régionaux ne demandent pas la charité, ils souhaiteraient certainement avoir une législation plus adaptée et une compréhension meilleure de la part des Elus locaux et régionaux. La DGAC peut être très utile dans ce contexte.

Jean-Louis BAROUX