Le Surbooking

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Par Maître Emmanuelle Llop Cabinet CLYDE & CO Afin de lutter contre les désaffections de dernière minute, les compagnies aériennes ont pris l’habitude de vendre plus de places qu’il y en a de disponibles dans l’avion. Cette pratique, dénommée surbooking ou surréservation, trouve son origine dans le nombre important de personnes qui ne se présentent […]

Le Surbooking
Par Maître Emmanuelle Llop
Cabinet CLYDE & CO
Le Surbooking
Afin de lutter contre les désaffections de dernière minute, les compagnies aériennes ont pris l’habitude de vendre plus de places qu’il y en a de disponibles dans l’avion. Cette pratique, dénommée surbooking ou surréservation, trouve son origine dans le nombre important de personnes qui ne se présentent pas à l’embarquement (« no show » : jusqu’à 25%).
Des outils statistiques permettent aux compagnies aériennes de déterminer de manière plus ou moins fiable, le nombre de passagers concernés par le « no show ». Toutefois, chaque année, plus de 250 000 passagers aériens se voient refusés à l’embarquement, bien qu'ils soient munis d’un billet et qu’ils se soient présentés à l’heure.
La gratuité des systèmes de réservation, alliée à l’expansion du trafic aérien, a engendré une augmentation sensible de la demande (entre 7 et 10% par an) et une évolution des stratégies commerciales au sein des compagnies aériennes. Le surbooking répond ainsi au besoin de productivité accru de l’économie du voyage et représente une des stratégies de lutte contre le taux élevé des désistements.
Dans certains cas, la surréservation peut s’avérer extrêmement préjudiciable au passager, notamment lorsqu’il s’agit d’un voyage d’affaires où le temps est particulièrement compté.
Toutefois, les passagers en classes First ou Business sont le plus souvent épargnés par cette pratique dans la mesure où la demande est suffisamment limitée pour éviter le surbooking. En outre, les compagnies tendent à privilégier ces passagers et à leur offrir un service de meilleure qualité.
A l’inverse, il est fréquent que des passagers surbookés soient surclassés en Première ou Affaires, ce qui évite au transporteur de verser l’indemnité prévue mais également de surcharger les vols suivants, également surbookés…
Pour compenser les désagréments subis par les passagers en raison de cette pratique, critiquée mais légale, l'Union Européenne a pris des mesures, prévues par le Règlement Européen n°261/2004 du 11 février 2004, applicable depuis le 17 février 2005, à l’application desquelles compagnies aériennes et tours-opérateurs doivent veiller, en raison de leur caractère automatique.
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Qui sont les passagers concernés par une indemnisation ?

Pour prétendre à une indemnisation, les passagers doivent :
  • Voyager sur des vols réguliers, non réguliers (vol « charter »), ou compris dans un voyage à forfait (vol et séjour par exemple)
  • Avoir une réservation confirmée pour le vol concerné
  • S’être présentés à l’enregistrement, à l’heure indiquée par la Compagnie aérienne ou au plus tard 45 min avant l’heure de départ publiée
  • Se trouver au départ d'un Etat membre de l’Union Européenne ou d'un Etat tiers à destination d'un Etat membre, dès lors que le vol est assuré par un transporteur communautaire (à moins que les passagers ne reçoivent déjà un traitement similaire dans les pays tiers).
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Les mesures compensatoires

1.Avant de refuser les passagers à l’embarquement, le transporteur aérien doit faire appel à des volontaires qui acceptent de renoncer à leur réservation en échange de certains avantages convenus entre le passager et le transporteur aérien. Ces volontaires bénéficient en sus de l’assistance offerte à tous les passagers surréservés (volontaires ou non) développée ci-dessous.
2. Dans l’hypothèse où le nombre de volontaires n'est pas suffisant, le transporteur étant dès lors contraint de refuser l'embarquement de passagers contre leur volonté, ces derniers sont indemnisés immédiatement selon les modalités suivantes :

Droit à une assistance : remboursement ou réacheminement.

Le passager aura le choix entre :
  • Le remboursement du billet, dans un délai de sept jours, référence faite au prix payé pour la ou les parties du voyage non effectuées et pour la ou les parties du voyage déjà effectuées et devenues inutiles par rapport à son plan de voyage initial ainsi que le cas échéant, un vol retour vers leur point de départ initial dans les meilleurs délais
  • Un réacheminement vers sa destination finale, dans des conditions de transport comparables et dans les meilleurs délais
  • Un réacheminement vers sa destination finale, dans des conditions de transport comparables, à une date ultérieure à sa convenance.
En cas de changement d’aéroport (au sein d'une même ville, agglomération ou région), le transporteur prend à sa charge les coûts du transfert vers cet aéroport.

Droit à une prise en charge

Pendant le délai d’attente, le transporteur doit offrir gratuitement au passager :
  • Des rafraîchissements et des repas en suffisance
  • Un hébergement à l'hôtel (incluant le transfert aéroport-hôtel) si l'attente est d'une ou plusieurs nuits
  • Deux appels téléphoniques ou l'envoi de deux télex, deux télécopies ou deux messages électroniques.
Le transporteur doit en outre veiller aux besoins particuliers des personnes à mobilité réduite (et des personnes qui les accompagnent) ainsi que des enfants non accompagnés.

Droit à une compensation financière

  • 250 € pour tous les vols de moins de 1.500 km, en cas de remboursement et de réacheminement avec un retard de plus de 2h par rapport à l’heure d’arrivée du vol réservé
  • 400 € pour tous les vols de 1.500 à 3.500 km et les vols intracommunautaires de plus de 1.500 km, en cas de remboursement et de réacheminement avec un retard de plus de 3h par rapport à l’heure d’arrivée du vol réservé
  • 600 € pour tous les autres vols, en cas de remboursement et de réacheminement avec un retard de plus de 4h par rapport à l’heure d’arrivée du vol réservé.
En cas de réacheminement avec des écarts horaires inférieurs à ceux indiqués ci-dessus, le transporteur peut réduire de 50% le montant de l’indemnisation. Il convient de noter que le Règlement n’indemnise pas le retard de vol, évoqué par un texte différent . Codifiée par les instances européennes, la pratique du surbooking n’est pas automatiquement fautive. Ainsi, s’il invoque un préjudice supplémentaire induit par le surbooking, le passager devra alors le démontrer pour prétendre à un dédommagement financier.

Contestée par certaines compagnies aériennes (notamment les low-costs), l’indemnisation systématique satisfait au contraire les consommateurs, même si l’articulation des textes est complexe et ne facilite pas leur application, en ralentissant les paiements. Aux opérateurs concernés de préserver leur image en instaurant des politiques claires de mise en œuvre, pour faire alors mentir l’image de « faiseurs de profit » véhiculée par des passagers laissés à terre le jour de leur départ …
Conseils pratiques :
1. A priori : Pour limiter les risques de surbooking, il est recommandé de se présenter au comptoir d’embarquement bien avant l’heure indiquée par le transporteur aérien.
2. A posteriori : En cas de surréservation, la compagnie proposera les mesures compensatoires développées ci-dessus.
3. Compagnie non communautaire au départ d’un pays hors Union Européenne: On a vu que le Règlement Européen n’était pas applicable lorsque le vol assuré par un transporteur aérien non communautaire était en provenance d’un pays tiers à l’Union Européenne. Dans ce cas, les informations nécessaires seront disponibles au comptoir de la compagnie aérienne.
1 - Selon l’AFUTA (Association Française des Usagers des Transports Aériens) : "il est admis que 20 à 25 % des personnes qui ont réservé un vol ne se présentent pas à l'embarquement."
2 - Le remboursement peut se faire en espèces, par virement bancaire électronique, par virement bancaire ou par chèque ou avec l'accord signé et écrit du passager, sous forme de bons de voyage et/ou autres services.
3- Convention de Montréal du 28 mai 1999 articles 19 et suivants.