Nouveau métier du voyage d’affaires : absenteur

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Je ne résiste pas à vous raconter l'anecdote que vient de me révéler l'un de mes amis, grand voyageur devant l'éternel puisqu'il compte à son actif une petite dizaine de tours du monde. Les faits remontent à quelques années. Son fils de 7 ans participait dans son école à une "olympiade des métiers" où chaque enfant raconte, en détail, le travail de ses parents. Bien sûr, dans cette classe comparable à toutes les autres, il y avait des manuels, des intellos, des fonctionnaires, quelques chômeurs et un job, encore unique à ce jour "absenteur" !

Inutile de chercher, vous ne trouverez pas. Pour Nicolas, son père faisait tout naturellement le métier qu'il avait deviné dans les propos de sa mère : "Mon mari est toujours absent", répétait cette épouse délaissée à ses amis. Absent, absenteur... Voilà donc recréée une profession qui possède, a priori, ses lettres de noblesse dans la tête des enfants. Au delà de l'anecdote, les faits sont révélateurs. Sans tomber dans une analyse psychologique de bazar, expliquer l'absence dans une famille n'est pas simple. Ajoutez à cela quelques difficultés dans le couple, et ce père (ou cette mère) absent(e) devient le sujet de toutes les attentions, de tous les rejets voire de toutes les haines.
Si j'évoque le sujet aujourd'hui, c'est qu'une grande enquête devrait être menée sur ce sujet en 2012. Engagée à l'initiative d'un cabinet de recrutement new yorkais, spécialisé dans les cadres de haut niveau, elle devrait permettre de mesurer la fragilité (pour ne pas dire la mauvaise conscience) des futurs dirigeants de haut niveau. Preuve qu'aux USA, le poids de la famille dans le bon équilibre moral et professionnel d'un dirigeant est important. Mais au delà de ce qui sera mesuré, on sait désormais que partir ne peut se faire sans explication. Il n'est pas toujours simple de trouver les mots qui résonneront dans la tête d'un gamin. Pas plus facile de ne pas rapporter un jouet pour se dédouaner du départ. On ne peut vivre dans la justification affective sans que cela ne pèse pas sur son quotidien. Existe t-il alors une méthode pour devenir un "absenteur" professionnel sans peur et sans reproche ? Visiblement, personne n'a de méthodes infaillibles. Preuve, sans doute, qu'il faut puiser dans sa propre éducation ce qui fera le caractère et donnera naissance à de très grands voyageurs détachés de leur environnement familial. Pas sûr que ce soit une qualité.

Hélène Retout